SKOROBOGATOVA c. RUSSIE
Karar Dilini Çevir:
SKOROBOGATOVA c. RUSSIE

 
 
 
 
TROISIÈME SECTION
DÉCISION
Requête no 47537/11
Natalya Vladimirovna SKOROBOGATOVA
contre la Russie
 
La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant le 7 mai 2019 en un comité composée de :
Branko Lubarda, président,
Georgios A. Serghides,
Erik Wennerström, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 8 juillet 2011,
Vu la déclaration déposée par le gouvernement défendeur le 10 avril 2017 et invitant la Cour à rayer la requête du rôle, ainsi que la réponse de la partie requérante à cette déclaration,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
FAITS ET PROCÉDURE
La requérante, Mme Natalya Vladimirovna Skorobogatova, est une ressortissante russe née en 1981. Elle réside à Chelyabinsk. Elle a été représentée devant la Cour par Me A.P. Kogosov, avocat exerçant à Chelyabinsk.
Le gouvernement russe (« le Gouvernement ») a été représenté par M. M. Galperine, représentant de la Fédération de Russie auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.
La partie de la requête relative aux griefs tirés des articles 3, 5 § 3 et 8 de la Convention avait été communiquée au Gouvernement.
EN DROIT
La requérante alléguait que les conditions de sa détention dans la maison d’arrêt no IZ-74/1 de la ville de Tchéliabinsk (« la maison d’arrêt ») et dans le tribunal du district Léninski de la ville de Tchéliabinsk, et les conditions de son transport vers et depuis ledit tribunal était constitutives de traitement dégradant, que la durée de sa détention provisoire n’était pas raisonnable ainsi qu’elle n’a pas pu bénéficier de visites de ses proches. Elle invoquait les articles 3, 5 § 3 et 8 de la Convention.
Après l’échec des tentatives de règlement amiable, par une lettre du 10 avril 2017 le Gouvernement a informé la Cour qu’il envisageait de formuler une déclaration unilatérale afin de résoudre la question soulevée par cette partie de la requête. Il a en outre invité la Cour à rayer celle-ci du rôle en application de l’article 37 de la Convention.
La déclaration était ainsi libellée :
« Je soussigné (...), représentant de la Fédération de Russie auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (...), déclare par la présente que les autorités russes reconnaissent qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention dans le chef de Natalya Vladimirovna Skorobogatova en raison des conditions de sa détention dans la maison d’arrêt no IZ-74/1, des conditions de son transport vers le tribunal et des conditions de sa détention au sein dudit tribunal, qu’il y a eu violation de l’article 5 § 3 de la Convention en raison de la détention de la requérante entre le 23 décembre 2010 et le 28 avril 2012 ainsi qu’il y a eu violation de l’article 8 de la Convention en raison des restrictions apportées au droit de la requérante de bénéficier de visites de ses proches.
Le Gouvernement est prêt à verser la somme de 10 425 Euros à la requérante à titre de satisfaction équitable.
En conséquence, [il] invite la Cour à rayer du rôle la présente requête. Il suggère à la Cour de considérer cette déclaration comme un « autre motif » justifiant de rayer la requête du rôle, aux termes de l’article 37 § 1 c) de la Convention.
La somme susmentionnée, destinée à couvrir tout dommage matériel et moral ainsi que les frais et dépens, ne sera soumise à aucun impôt. Elle sera payable dans un délai de trois mois à compter de la date de la notification de la décision de la Cour, en application de l’article 37 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et convertie en roubles russes au taux applicable à la date du paiement. Si elle n’était pas versée dans ce délai, le Gouvernement s’engage à la majorer, jusqu’au règlement, d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage. Le paiement vaudra règlement définitif des affaires. »
Par une lettre du 14 juin 2017, la partie requérante a indiqué qu’elle n’était pas satisfaite des termes de la déclaration unilatérale au motif que la somme proposée serait inadéquate.
La Cour rappelle qu’en vertu de l’article 37 de la Convention, à tout moment de la procédure, elle peut décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances l’amènent à l’une des conclusions énoncées aux alinéas a), b) ou c) du paragraphe 1 de cet article. L’article 37 § 1 c) lui permet en particulier de rayer une affaire du rôle si :
« (...) pour tout autre motif dont la Cour constate l’existence, il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête ».
La Cour rappelle aussi que, dans certaines circonstances, il peut être indiqué de rayer une requête du rôle en vertu de l’article 37 § 1 c) sur la base d’une déclaration unilatérale du gouvernement défendeur même si le requérant souhaite que l’examen de l’affaire se poursuive.
À cette fin, la Cour a examiné la déclaration à la lumière des principes que consacre sa jurisprudence, en particulier l’arrêt Tahsin Acar (Tahsin Acar c. Turquie (question préliminaire) [GC], no 26307/95, §§ 75‑77, CEDH 2003‑VI, WAZA Sp. z o.o. c. Pologne (déc.), no 11602/02, 26 juin 2007, et Sulwińska c. Pologne (déc.), no 28953/03, 18 septembre 2007).
La Cour a établi dans un certain nombre d’affaires, dont celles dirigées contre la Russie, sa pratique en ce qui concerne les griefs tirés de la violation de l’article 3 de la Convention quant aux conditions de détention et de transport de détenus (voir, par exemple, Dudchenko c. Russie, no 37717/05, §§ 116‑123, 7 novembre 2017, Yaroslav Belousov c. Russie, nos 2653/13 et 60980/14, §§ 103‑111, 4 octobre 2016, M.S. c. Russie, no 8589/08, §§ 71‑77, 10 juillet 2014, Vyatkin c. Russie, no 18813/06, §§ 36‑44, 11 avril 2013, et Ananyev et autres c. Russie, nos 42525/07 et 60800/08, §§ 160‑166, 10 janvier 2012), de l’article 5 § 3 de la Convention quant à la durée de la détention provisoire de détenus (G. c. Russie, no 42526/07, §§ 114‑119, 21 juin 2016, Korkin c. Russie, no 48416/09, §§ 88‑96, 12 novembre 2015, Dirdizov c. Russie, no 41461/10, §§ 108‑111, 27 novembre 2012, Romanova c. Russie, no 23215/02, §§ 121‑133, 11 octobre 2011, et Lamazhyk c. Russie, no 20571/04, §§ 88‑98, 30 juillet 2009) ainsi que de l’article 8 de la Convention quant au droit de détenus de bénéficier de visites familiales en prison (Andrey Smirnov c. Russie, no 43149/10, §§  39‑43, 13 février 2018, Moïsseïev c. Russie, no 62936/00, §§ 248‑251, 9 octobre 2008, et Vlassov c. Russie, no 78146/01, §§ 123‑127, 12 juin 2008).
Eu égard à la nature des concessions que renferme la déclaration du Gouvernement, ainsi qu’au montant de l’indemnisation proposée – qui est conforme aux montants alloués dans des affaires similaires –, la Cour estime qu’il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête (article 37 § 1 c)).
En outre, à la lumière des considérations qui précèdent, et eu égard en particulier à sa jurisprudence claire et abondante à ce sujet, la Cour estime que le respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles n’exige pas qu’elle poursuive l’examen de la requête (article 37 § 1 in fine).
La Cour interprète cette déclaration dans le sens que cette somme, convertie en roubles russes au taux applicable à la date du paiement, devra être versée dans les trois mois suivant la date de la notification de la décision de la Cour rendue conformément à l’article 37 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme. À défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement devra verser, à compter de l’expiration de celui-ci et jusqu’au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage.
Enfin, la Cour souligne que, dans le cas où le Gouvernement ne respecterait pas les termes de sa déclaration unilatérale, la requête pourrait être réinscrite au rôle en vertu de l’article 37 § 2 de la Convention (Josipović c. Serbie (déc.), nº 18369/07, 4 mars 2008).
En conséquence, il convient de rayer l’affaire du rôle pour ce qui concerne les griefs susvisés.
Invoquant l’article 3 de la Convention la partie requérante se plaignait également du caractère, selon elle, inadéquat des soins médicaux dispensés au sein de la maison d’arrêt no IZ-74/1 de la ville de Tchéliabinsk.
Compte tenu de l’ensemble des éléments en sa possession, et pour autant qu’elle ait compétence pour connaître des allégations formulées, la Cour n’a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles.
Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Prend acte des termes de la déclaration du gouvernement défendeur concernant les articles 3, 5 § 3 et 8 de la Convention et des modalités prévues pour assurer le respect des engagements ainsi pris ;
Décide de rayer cette partie de la requête du rôle en application de l’article 37 § 1 c) de la Convention ;
Déclare le restant de la requête irrecevable.
Fait en français puis communiqué par écrit le 28 mai 2019.
              Stephen PhillipsBranko Lubarda
GreffierPrésident
 

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