NIKOLOV c. BULGARIE
Karar Dilini Çevir:
NIKOLOV c. BULGARIE

 
Communiquée le 22 janvier 2019
 
CINQUIÈME SECTION
Requête no 68504/11
Stoyan Todorov NIKOLOV
contre la Bulgarie
introduite le 13 octobre 2011
EXPOSÉ DES FAITS
Le requérant, M. Stoyan Todorov Nikolov, était un ressortissant bulgare né en 1960 et résidant à Rogosh. Il est décédé le 3 avril 2015. Ses héritiers, Mme Kostadinka Nikolova, M. Todor Nikolov et M. Ivan Nikolov, ont exprimé leur souhait de continuer la procédure devant la Cour. Ils sont représentés devant la Cour par Mes M. Ekimdzhiev et K. Boncheva, avocats exerçant à Plovdiv.
A. Les circonstances de l’espèce
Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.
Le requérant était agriculteur de métier. Le 9 février 2009, il se rendit à l’aéroport de Sofia d’où il devait prendre un vol à destination de Londres. Il portait sur lui la somme de 34 300 euros en espèces qu’il destinait à l’achat d’un tracteur. Après avoir passé le contrôle d’identité, le requérant fut abordé par une douanière qui lui demanda s’il avait des devises étrangères sur lui. Le requérant répondit par l’affirmative est présenta l’argent qu’il portait.
Le même jour, la douanière dressa un constat d’infraction administrative dans lequel il fut reproché au requérant de ne pas avoir déclaré la somme de 34 300 euros et de ne pas avoir présenté un certificat d’absence de dettes vis-à-vis du trésor public. L’argent fut saisi.
Des poursuites pénales pour non-observation de l’obligation déclarative à la douane furent ouvertes contre ce requérant et la procédure administrative fut suspendue. Le 19 février 2009, le requérant fut formellement mis en examen dans le cadre de la procédure pénale pour non-observation de l’obligation déclarative à la douane, infraction pénale réprimée par l’article 251, alinéa 1 du code pénal.
Le 30 septembre 2009, le procureur en charge du dossier pénal mit fin aux poursuites pénales contre le requérant au motif que, en l’absence d’une faute intentionnelle de la part du prévenu, les faits en cause n’étaient pas constitutifs d’une infraction pénale. À la suite de cette décision du parquet, la procédure administrative suspendue reprit son cours.
Par une décision du 25 novembre 2009, le chef de la douane à l’aéroport de Sofia constata que le requérant n’avait pas accompli ses obligations déclaratives découlant de la législation interne en ce qui concernait la somme de 34 300 EUR. Il ordonna la confiscation de cette somme et imposa au requérant une amende de 1 000 levs bulgares (BGN) (soit environ 500 EUR).
Le requérant contesta cette décision devant le tribunal de district de Sofia. Dans son mémoire, l’avocat du requérant souleva plusieurs arguments relatifs à l’illégalité de la décision attaquée, y compris un argument tiré de l’incompatibilité de la sanction avec le droit de l’Union européenne, qui prévoyait une obligation de déclaration uniquement aux frontières extérieures de l’Union.
Par un jugement du 15 novembre 2010, le tribunal de district de Sofia annula la décision du 25 novembre 2009 du chef de la douane. Le tribunal estima d’abord que le constat dressé le 9 février 2009 ne reflétait pas fidèlement les événements en cause, ce qui constituait un manquement aux règles procédurales. Il estima ensuite que les pièces du dossier ne démontraient pas que le requérant avait eu un comportement fautif. Le tribunal constata enfin que la partie introductive de la décision attaquée, qui mentionnait un règlement de l’Union européenne, ne correspondait pas au texte du dispositif de celle-ci où ce règlement n’avait pas été mentionné.
La douane interjeta appel.
Par un arrêt définitif du 13 avril 2011, le tribunal administratif de Sofia infirma le jugement du tribunal de district et confirma la décision du chef de la douane du 25 novembre 2009. Sur la base des preuves recueillies, il estimait que le requérant avait omis par négligence de déclarer par écrit aux autorités douanières bulgares qu’il transportait la somme de 34 300 EUR en espèces et de soumettre une déclaration d’absence de dettes vis-à-vis du trésor public. Le tribunal administratif estima que, dans le cadre de la procédure administrative, le requérant avait eu connaissance des faits qu’on lui reprochait, ce qui lui avait permis d’exercer pleinement son droit à la défense. Il estima également que la différence entre la partie introductive et le dispositif de la décision attaquée ne constituait pas un vice de procédure majeur : la mention du règlement européen en cause dans la partie introductive de la décision de la douane était due à une erreur lors de la rédaction du constat du 9 février 2009 que le chef de la douane avait rectifié en retenant dans le dispositif de sa décision uniquement ces dispositions du droit interne qui avaient été méconnues par le requérant.
B. Le droit interne pertinent
En vertu de l’article 11, alinéa 3 de la loi sur les devises et de l’article 2, alinéas 2 et 4, de l’ordonnance ministérielle no 10 du 16 décembre 2003 sur l’application de cette loi, dans leurs rédactions en vigueur à l’époque des faits, les citoyens bulgares qui exportaient du territoire du pays des sommes d’une valeur supérieure à 25 000 levs bulgares (BGN) devaient déclarer aux autorités douanières bulgares le montant et la provenance de l’argent et présenter un certificat d’absence de dettes vis-à-vis du trésor public.
En vertu de l’article 18 de la loi sur les devises, dans sa rédaction en vigueur à l’époque des faits, la méconnaissance des règles de l’article 11 de cette loi était sanctionnée par une amende administrative pouvant aller de 1 000 à 3 000 BGN. En vertu de l’article 20 de la même loi, l’objet de l’infraction était confisqué au profit de l’État.
GRIEFS
Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint que le tribunal administratif de Sofia n’a pas répondu à son argument selon lequel la sanction administrative en cause était contraire au droit de l’Union européenne.
Invoquant l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention, le requérant se plaint qu’il a été sanctionné par une amende et par la confiscation de l’argent non déclaré à la douane bulgare.
Invoquant l’article 13 de la Convention, le requérant se plaint de l’absence de voies de recours internes pour remédier à la violation alléguée de l’article 1 du Protocole no 1.
QUESTIONS AUX PARTIES
1. L’arrêt du tribunal administratif de Sofia du 13 avril 2011 était-il suffisamment motivé, comme l’exige l’article 6 § 1 de la Convention. En particulier, le tribunal administratif avait-il répondu à l’argument du requérant relatif à la contradiction entre la sanction imposée et les règles établis par la législation de l’Union européenne en matière de contrôle aux frontières ?
2. L’imposition d’une sanction administrative au requérant et la confiscation de la somme de 34 300 euros, constituaient-elles une ingérence dans le droit du requérant au respect de ses biens, au sens de l’article 1 du Protocole no 1 ? Dans l’affirmative, cette ingérence, était-elle prévue par la loi, poursuivait-elle un but légitime et était-elle proportionnée au but poursuivi (voir Grifhorst c. France, no 28336/02, §§ 87-106, 26 février 2009 ; Ismayilov c. Russie, no 30352/03, §§ 31-38, 6 novembre 2008; Boljević c. Croatie, no 43492/11, §§ 39-45, 31 janvier 2017) ?
3. Le requérant avait-il à sa disposition, comme l’exige l’article 13 de la Convention, un recours interne effectif au travers duquel il aurait pu formuler son grief de méconnaissance de l’article 1 du Protocole no 1 à la Convention ?

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