E-8548/2010 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi
Karar Dilini Çevir:
E-8548/2010 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi
Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal
Cour V
E-8548/2010
Arrêt du 21 décembre 2010
Composition Jean-Pierre Monnet, juge unique,
avec l'approbation de Gérald Bovier, juge ;
Céline Berberat, greffière.
Parties A._______, né le (…), Gambie
recourant,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure
Objet Asile (non-entrée en matière) et renvoi ; décision de l'ODM
du 3 décembre 2010 / N (…)..
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Vu
la demande d'asile déposée en Suisse par A._______ en date du
25 octobre 2010,
le document qui lui a été remis le même jour et dans lequel l'autorité
compétente attirait son attention, d'une part, sur la nécessité de déposer
dans les 48 heures ses documents de voyage ou ses pièces d'identité, et
d'autre part, sur l'issue éventuelle de la procédure en l'absence de
réponse concrète à cette injonction,
le procès-verbal de l'audition sommaire du 27 octobre 2010 et celui de
l'audition sur les motifs d'asile du 5 novembre 2010,
la décision du 3 décembre 2010, notifiée le jour suivant, par laquelle
l'ODM, en se fondant sur l'art. 32 al. 2 let. a LAsi, n’est pas entré en
matière sur la demande d'asile du recourant (motif pris que celui-ci n'avait
produit aucun document d'identité ou de voyage et qu'aucune des
exceptions visées par l'art. 32 al. 3 LAsi n'était réalisée), a également
prononcé son renvoi et ordonné l'exécution de cette mesure,
l'acte du 10 décembre 2010, posté le 13 décembre suivant, par lequel
l'intéressé a recouru contre la décision précitée, a conclu à son
annulation, à l'entrée en matière sur sa demande d'asile et,
subsidiairement, au prononcé d'une admission provisoire,
la demande d'assistance judiciaire partielle dont il est assorti,
la réception par le Tribunal administratif fédéral, le 15 décembre 2009, du
dossier relatif à la procédure de première instance auprès de l'ODM,
et considérant
qu'en vertu de l'art. 31 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal
administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal administratif fédéral
(ci-après : le Tribunal) connaît des recours contre les décisions au sens
de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure
administrative (PA, RS 172.021),
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qu'en particulier, les décisions rendues par l'ODM concernant l'asile et le
renvoi - lesquelles n'entrent pas dans le champ d'exclusion de l'art. 32
LTAF - peuvent être contestées devant le Tribunal conformément à l'art.
33 let. d LTAF et à l'art. 105 LAsi,
que le Tribunal est donc compétent pour connaître du présent litige,
qu'il statue de manière définitive (cf. art. 83 let. d ch. 1 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]),
que la procédure devant le Tribunal est régie par la PA, pour autant que
la LTAF n'en dispose pas autrement (art. 37 LTAF), ni non plus la LAsi
(art. 6 LAsi),
que le recourant a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA),
que son recours, interjeté dans la forme (cf. art. 52 PA) et le délai
(cf. art. 108 al. 2 LAsi) prescrits par la loi, est recevable,
qu'en vertu de l'art. 32 al. 2 let. a LAsi, il n'est pas entré en matière sur
une demande d'asile si le requérant ne remet pas aux autorités, dans un
délai de 48 heures après le dépôt de sa demande, ses documents de
voyage ou ses pièces d'identité,
que cette disposition n'est pas applicable lorsque le requérant rend
vraisemblable que, pour des motifs excusables, il ne peut pas le faire
(cf. art. 32 al. 3 let. a LAsi),
que selon l'art. 1a de l'ordonnance 1 sur l'asile du 11 août 1999 (OA 1,
RS 142.311), constitue un document de voyage, tout document officiel
autorisant l'entrée dans l'Etat d'origine ou dans d'autres Etats, tel qu'un
passeport ou un document de voyage de remplacement (let. b), tandis
qu'est considéré comme pièce d'identité tout document officiel
comportant une photographie et délivré dans le but de prouver l'identité
du détenteur (let. c),
qu'en l'occurrence, le recourant n'a pas remis ses documents de voyage
ou ses pièces d'identité dans un délai de 48 heures après le dépôt de sa
demande d'asile, en alléguant qu'il n'avait jamais eu de passeport et qu'il
n'était plus en possession de sa carte d'identité, document qu'il avait fait
établir en 2010 afin de pouvoir voyager jusqu'en Suisse,
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que toutefois, ses propos relatifs au lieu où se trouvait sa carte d'identité
ne sont pas cohérents,
qu'en effet, il a déclaré tout d'abord que ladite carte se trouvait chez une
connaissance au Sénégal (cf. p.-v. de l'audition du 27 octobre 2010 p. 3),
puis qu'il l'avait perdue dans un lieu inconnu, probablement dans la ville
sénégalaise de Ziguinchor et cherchée sur place sans succès (cf. p.-v. de
l'audition du 5 novembre 2010 Q 7-8),
que l'explication fournie par le recourant, selon laquelle ses dires avaient
été mal compris par le premier interprète, ne saurait être suivie (cf. p.-v.
de l'audition du 5 novembre 2010 Q 9), dès lors qu'il a explicitement
attesté le contraire avant de signer le procès-verbal de cette audition,
qu'à cela s'ajoute le fait que le récit de son voyage est peu circonstancié
et stéréotypé, partant invraisemblable,
qu'il n'a donné aucune indication quant à l'itinéraire emprunté de
Ziguinchor à Vallorbe,
qu'en particulier, il n'a pas pu citer le nom de la ville espagnole dans
laquelle il aurait débarqué et où il aurait séjourné durant sept jours, ce
bien qu'il ait indiqué y avoir rencontré d'autres "Noirs" avec lesquels il a
pu communiquer,
qu'en outre, il est peu plausible qu'il ait pu voyager sans bourse délier de
Gambie jusqu'en Suisse, grâce notamment à la générosité d'un "Noir",
rencontré par hasard dans une ville inconnue, qui lui aurait acheté un
billet de train jusqu'en Suisse,
qu'il en va de même de ses déclarations selon lesquelles il a pu effectuer
un si long périple vers la Suisse, sans document d'identité et sans jamais
avoir été contrôlé,
que dans ces conditions, le recourant n'a pas rendu vraisemblable
l'existence d'un motif excusable à la non-production, dans le délai requis,
de documents d'identité, de sorte que l'exception prévue à l'art. 32 al. 3
let. a LAsi n'est pas réalisée,
qu'il convient donc de vérifier si l'une ou l'autre des exceptions prévues à
l'art. 32 al. 3 let. b et let. c LAsi est réalisée,
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qu'il sied tout d'abord de rappeler qu'avec la réglementation prévue à l'art.
32 al. 2 let. a et al. 3 LAsi, le législateur a introduit une procédure
sommaire au terme de laquelle - nonobstant la dénomination de "décision
de non-entrée en matière" - il est jugé, sur le fond, sinon de l'existence,
du moins de la non-existence de la qualité de réfugié,
qu'ainsi, selon ladite disposition, il n'est pas entré en matière sur une
demande d'asile si, déjà sur la base d'un tel examen, il peut être constaté
que le requérant n'a manifestement pas la qualité de réfugié,
que le caractère manifeste de l'absence de la qualité de réfugié peut
résulter de l'invraisemblance ou encore du manque de pertinence des
allégués,
qu'entendu sur ses motifs d'asile, le recourant a allégué être musulman,
d'ethnie (...) et avoir toujours vécu à B._______, où il était employé dans
deux restaurants (C._______ ; D._______),
que, depuis 2008, à trois reprises, des membres du parti (d'opposition)
UDP seraient venus le trouver au D._______ et auraient fait pression sur
lui pour qu'il accepte de placer des affiches dudit parti dans cet
établissement,
qu'après avoir refusé à deux reprises, en déclarant qu'il ne faisait pas de
politique, il aurait donné son accord, durant le mois de ramadan 2010, à
la pose des affiches,
qu'à la fin du ramadan, des inconnus seraient venus le chercher en
voiture au D._______, l'auraient enlevé et séquestré dans un lieu
inconnu,
que ses ravisseurs ne lui auraient rien dit, mais l'auraient frappé,
que deux jours après son enlèvement, le recourant aurait été libéré et
ramené par ses ravisseurs à son lieu de travail,
qu'un mois plus tard, des inconnus seraient à nouveau venus le trouver
au D._______,
que par crainte d'être tué par ces personnes, il aurait quitté B._______ le
même jour et se serait rendu à pied jusqu'à la ville sénégalaise de
Ziguinchor,
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qu'à l'appui de ses déclarations, le recourant a déposé deux attestations
de travail, la première établie par le C._______ (datée du 30 août 2008)
et la seconde par le D._______ (datée du 12 mars 2006), ainsi que deux
lettres de recommandation de ces mêmes établissements, datées du 12
mars 2006,
qu'il ressort de l'attestation de travail du D._______ que l'intéressé a
travaillé dans cet établissement durant six ans comme cuisinier,
que force est d'emblée de constater que les propos du recourant relatifs à
son enlèvement et à sa séquestration sont particulièrement inconsistants,
de sorte qu'ils ne peuvent être le reflet d'une expérience vécue,
qu'il n'a donné aucun détail sur le déroulement de sa séquestration
prétendant qu'il avait "tout oublié, car c'était des moments difficiles" et
que les coups reçus "avaient tout embrouillé dans sa tête" (cf. p.-v. de
l'audition du 5 novembre 2010 Q 86-102),
qu'il ne sait pas qui étaient les personnes responsables de son
enlèvement ni quel était le mobile de cet acte (cf. p.-v. de l'audition du 5
novembre 2010 Q 87-88, 98),
que la datation des événements à l'origine de sa demande d'asile n'est
pas cohérente avec celle de son départ du pays,
qu'en effet, il a indiqué avoir autorisé la pose des affiches de l'UDP au
début du mois de ramadan 2010 et avoir été séquestré à la fin de celui-ci
(durée officielle du ramadan : du 10 août au 10 septembre 2010), alors
qu'il a prétendu avoir quitté son pays d'origine en mai 2010 (cf. p.-v. de
l'audition du 27 octobre 2010 p. 6 ; p.-v. de l'audition du 5 novembre 2010
Q 20-21 et 77-78),
qu'en sus, le récit du recourant relatif à la dernière intrusion d'inconnus
sur son lieu de travail est incohérent, voire contradictoire,
que, dans une première version, ces personnes auraient signifié au
recourant qu'elles avaient besoin de lui bien après qu'il ait "voulu enlever
les affiches" (cf. p.-v. de l'audition du 27 octobre 2010 p. 5), puis dans
une seconde version, elles l'auraient menacé, car les affiches de l'UPD
étaient toujours exposées dans le restaurant (p.-v. de l'audition du 5
novembre 2010 Q 97, 105 à 109, 112),
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que l'explication donnée sur cette contradiction, selon laquelle ses dires
avaient été mal traduits par le premier interprète, ne saurait être suivie
(p.-v. de l'audition du 5 novembre 2010 Q 119), pour la même raison
qu'indiquée plus haut,
que l'intéressé a prétendu que des "personnes différentes" étaient à
l'origine de son enlèvement et de la dernière intrusion sur son lieu de
travail (cf. p.-v. de l'audition du 27 octobre 2010 p. 5), puis qu'il s'agissait
des "mêmes personnes" (cf. p.-v. de l'audition du 5 novembre 2010 Q 47,
97) et enfin qu'il s'agissait de personnes faisant probablement partie d'un
même groupe d'opposition à l'UDP non identifié (cf. recours p. 3),
qu'en outre, il est peu plausible que des membres de l'UDP se soient
obstinés, durant trois ans, à obtenir à tout prix l'autorisation du recourant
– simple subalterne – pour poser des affiches au D._______, alors que
l'établissement comptait un gérant, E._______ (cf. lettre de
recommandation du 12 mars 2006) et un propriétaire, F._______ (cf. p.-v.
de l'audition du 5 novembre 2010 Q 43, 66),
que les documents produits par le recourant (attestations de travail et
lettres de recommandation) ne sont pas non plus de nature à prouver les
motifs de protection allégués,
qu'en conclusion, ses déclarations ne sont manifestement pas
vraisemblables,
que l'exception prévue à l'art. 32 al. 3 let. b LAsi ne s'applique pas,
qu'au vu du dossier, d'autres mesures d'instruction visant à établir la
qualité de réfugié ou à constater l'illicéité de l'exécution du renvoi ne sont
pas non plus nécessaires (art. 32 al. 3 let. c LAsi ; Arrêts du Tribunal
administratif fédéral suisse [ATAF] 2009/50 consid. 5-8),
qu’au vu de ce qui précède, c’est à juste titre que l’ODM n’est pas entré
en matière sur la demande d’asile du recourant,
que, sur ce point, son recours doit donc être rejeté et la décision de
première instance confirmée,
qu’aucune des conditions de l’art. 32 OA 1 n’étant réalisée, en l'absence
notamment d'un droit du recourant à une autorisation de séjour ou
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d'établissement, l'autorité de céans est tenue de confirmer le renvoi (cf.
art. 44 al. 1 LAsi),
que l'exécution du renvoi ne contrevient pas au principe de non-
refoulement de l'art. 5 LAsi, le recourant n'ayant pas rendu vraisemblable
(cf. supra) qu'il serait, en cas de retour dans son pays, exposé à de
sérieux préjudices au sens de l'art. 3 LAsi,
que, pour les mêmes raisons, le recourant n'a pas non plus rendu
crédible qu'il existerait pour lui un véritable risque concret et sérieux
d'être victime, en cas de retour dans son pays d'origine, de traitements
inhumains ou dégradants (cf. art. 3 de la Convention du 4 novembre 1950
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
[CEDH, RS 0.101] et art. 3 de la Convention du 10 décembre 1984 contre
la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
[Conv. torture, RS 0.105]),
que l'exécution du renvoi s'avère donc licite (cf. art. 83 al. 3 de la loi
fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 [LEtr, RS 142.20]) ;
JICRA 1996 n° 18 consid. 14b/ee p. 186s., et jurisp. cit.),
qu'elle est également raisonnablement exigible (art. 83 al. 4 LEtr ; JICRA
2003 n° 24 consid. 5 p. 157s., et jurisp. cit.), dans la mesure où elle ne
fait pas apparaître, en l'espèce, une mise en danger concrète du
recourant,
que la Gambie ne connaît pas, sur l'ensemble de son territoire, une
situation de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, qui
permettrait de présumer, à propos de tous les requérants provenant de
cet Etat, et indépendamment des circonstances de chaque cas
particulier, l'existence d'une mise en danger concrète au sens de la
disposition précitée,
qu'en outre, le recourant est jeune, au bénéfice d'une longue expérience
professionnelle dans la restauration, et n'a pas allégué de problème de
santé particulier,
que l'exécution du renvoi est enfin possible (cf. art. 83 al. 2 LEtr ; JICRA
1997 n° 27 consid. 4a et b p. 207s., et jurisp. cit.), le recourant étant tenu
de collaborer à l'obtention de documents de voyage lui permettant de
retourner dans son pays d'origine (cf. art. 8 al. 4 LAsi),
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que le recours, en tant qu'il porte sur le renvoi et son exécution, doit ainsi
également être rejeté,
que s'avérant manifestement infondé, le recours est rejeté dans une
procédure à juge unique, avec l'approbation d'un second juge (cf. art. 111
let. e LAsi),
qu'il est dès lors renoncé à un échange d'écritures, le présent arrêt
n'étant motivé que sommairement (cf. art. 111a al. 1 et 2 LAsi),
que la demande d'assistance judiciaire partielle est rejetée, les
conclusions du recours étant d'emblée vouées à l'échec (cf. art. 65 al. 1
PA),
que vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la
charge du recourant, conformément aux art. 63 al. 1 PA et 2 et 3 let. b du
règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités
fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2),
(dispositif page suivante)
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Le Tribunal administratif fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
La requête d’assistance judiciaire partielle est rejetée.
3.
Les frais de procédure, d’un montant de Fr. 600.-, sont mis à la charge du
la recourant. Ce montant doit être versé sur le compte du Tribunal dans
les 30 jours dès l’expédition du présent arrêt.
4.
Le présent arrêt est adressé au recourant, à l'ODM et à l'autorité
cantonale compétente.
Le juge unique : La greffière :
Jean-Pierre Monnet Céline Berberat
Expédition :