E-6562/2006 - Abteilung V - Asile et renvoi - Renvoi;Exécution du renvoi
Karar Dilini Çevir:
E-6562/2006 - Abteilung V - Asile et renvoi - Renvoi;Exécution du renvoi
Cour V
E-6562/2006/
{T 0/2}
A r r ê t d u 2 n o v e m b r e 2 0 0 7
Maurice Brodard (président du collège)
Madeleine Hirsig-Vouilloz et Therese Kojic, juges
Jean-Claude Barras, greffier.
A._______, née le 25 mars 1931, Macédoine,
représentée par le Service d'Aide Juridique aux
Exilé-e-s (SAJE) en la personne de Mme Karine
Povlakic, rue Enning 4, case postale 7359,
1002 Lausanne,
recourante,
contre
Office fédéral des migrations (ODM), Quellenweg 6,
3003 Berne,
autorité inférieure.
Décision du 15 juillet 2003 en matière d'exécution du
renvoi ; N_______
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
E-6562/2006
Faits :
A. A._______ a demandé l'asile à la Suisse le 26 novembre 2001.
B.
Entendue a Vallorbe le 4 décembre 2001 puis à Lausanne le 11 janvier
2002, elle a déclaré être d'ethnie gorani et venir de C._______ en
Macédoine. Elle y aurait vécu pendant cinquante ans, les dernières
années au côté de deux de ses fils et leur famille avec lesquels elle
partageait la maison familiale et un commerce. Ils auraient aussi été
les seuls Musulmans de l'endroit. Son mari serait décédé tantôt en
1989 tantôt le 3 avril 1991. En novembre 2001, elle avait dû fuir
C._______ car après l'assassinat d'un jeune homme
(vraisemblablement un Slavo-Macédonien) elle-même et les siens
auraient été régulièrement menacés et insultés. Ils n'auraient par
contre pas eu affaire aux autorités, la police allant même jusqu'à les
protéger de temps à autre. Lors de son audition cantonale, la
requérante qui est illettrée a produit une carte d'identité macédonienne
pour étrangers car elle n'aurait pas la nationalité macédonienne.
C.
Par décision du 15 juillet 2003, l'ODR (actuellement l'Office fédéral
des migrations : l'ODM) a rejeté la demande d'asile de A._______ au
motif que ses allégués de fait ne réalisaient pas les conditions mises
par l'art. 3 LAsi à la reconnaissance de la qualité de réfugié. Pour
l'ODM, il ne ressortait en effet pas des informations fiables à sa
disposition sur la situation en Macédoine que les Gorani étaient
systématiquement discriminés voire persécutés dans ce pays. Membre
du Conseil de l'Europe depuis 1995, la Macédoine avait ratifié le 10
avril 1997, la Convention européenne sur la protection des minorités
nationales et rien ne laissait penser que ses autorités transgressaient
leurs obligations. L'ODM a également prononcé le renvoi de Suisse de
la requérante de même que l'exécution de cette mesure qu'il a jugée
licite et possible, la requérante, qui avait passé plus de quinze ans en
Macédoine, ayant la possibilité d'en obtenir la nationalité (si elle ne
l'avait pas encore) d'autant plus facilement qu'en 2002, les autorités
de ce pays avaient offert la citoyenneté à tous les Gorani de
Macédoine qui en feraient la demande. Cet office a aussi estimé
raisonnablement exigible la mesure précitée eu égard à la situation en
Macédoine où, depuis l'Accord de paix (d'août 2001), la tension était
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durablement retombée aussi bien dans la région de Tetovo et
Kumanovo que dans l'agglomération de Skopje, eu égard aussi à la
situation de la requérante qui avait encore un fils en Macédoine et qui
pouvait y retourner avec ses deux autres fils déboutés de leur
demande d'asile en Suisse.
D.
Le 12 août 2003, A._______ a recouru contre cette décision en en
contestant uniquement le point du dispositif relatif à l'exécution de son
renvoi qu'en l'état elle n'estime pas raisonnablement exigible. A l'appui
de ses conclusions, elle a renvoyé l'autorité de recours, en
l'occurrence l'ancienne Commission suisse de recours en matière
d'asile (la Commission) à un rapport médical du docteur W._______,
spécialisé en médecine interne, du 23 juillet 2003. Il en ressort qu'à
l'époque elle souffrait d'un trouble du comportement consécutif à des
violences subies au Kosovo (sic!) et à deux autres incidents (dont
l'agression d'un de ses fils) survenus plus tard en Suisse. S'y
ajoutaient un diabète de type 2 et un psoriasis cutané. Son trouble du
comportement, qui se manifestait par un état dépressivo-anxieux, avait
d'emblée nécessité un traitement anti-dépressif et anxiolytique. Des
troubles cognitifs liés à son âge  la recourante est malentendante 
avaient cependant rendu difficile toute mesure visant à la rassurer.
C'est pourquoi malgré le traitement institué, son état était en voie
d'aggravation. Quoi qu'il en soit, il nécessitait un traitement psychique
visant autant que faire se peut à rassurer la recourante par rapport à
son vécu dans un environnement tranquille. La recourante relevait
aussi que la santé publique de Macédoine, avec ses infrastructures
fragiles et surchargées, était confrontée à de grandes difficultés, entre
autres dues au nombre important de déplacés accueillis dans le pays.
Aussi, en cas de renvoi, elle redoutait d'être privée, ne serait-ce qu'à
cause de son âge, de la prise en charge psycho-thérapeutique dont
elle avait besoin et de ses médicaments, ce qui risquait d'entraîner
une décompensation des troubles de son comportement vers un état
psychotique. Enfin, elle ajoutait ne pas pouvoir supporter l'idée d'être
renvoyée séparément de son fils dont elle dépendait depuis le décès
de son époux en 1989.
E.
Dans une détermination du 17 juin 2005, transmise à la recourante le
18 juillet suivant avec droit de réplique, l'ODM a proposé le rejet du
recours motifs pris que, fondés sur des documents datant de
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décembre 2001, ses arguments tombaient à faux au regard de
l'évolution récente de la santé publique en Macédoine où, grâce au
soutien de la communauté internationale après les troubles de 2001,
de gros investissements avaient été consentis dans le secteur de la
santé, ce qui faisait qu'en 2005, les possibilités de traitement dans ce
pays pouvaient être qualifiées de bonnes. L'ODM a également noté
que l'aggravation de l'état de la recourante était étroitement liée au
rejet de sa demande d'asile, ce qui tendait à démontrer que le
problème auquel on avait affaire n'était que partiellement médical,
l'apparition de troubles chez des requérants déboutés n'étant pas
inhabituelle. Dans le cas de la recourante, on pouvait d'ailleurs se
demander si son médecin la comprenait bien dans la mesure où il
imputait les troubles de sa patiente à son vécu au Kosovo alors qu'elle
vient de la Macédoine.
F.
Le 25 août 2005, la recourante a fait suivre à la Commission un
rapport médical du 17 août précédent des docteurs R._______ et
V._______, chef de clinique et médecin assistant à la Policlinique
médicale universitaire (PMU) de Lausanne. Il en ressort qu'à l'époque,
elle était suivie pour un diabète de type 2, une hypertension artérielle,
un syndrome obstructif léger, une hyperlipidémie mixte, un psoriasis
cutané, une cécité de l'oeil droit, une cataracte à l'oeil gauche et des
douleurs ostéoarticulaires ; s'y ajoutait un trouble de l'humeur sous
forme d'état anxio-dépressif avec probable syndrome de stress post-
traumatique pour le traitement desquels lui avait été prescrite une
médication incluant du "Daonil" (diabète), du "Co-
Enatec" (hypertension), du "Tranxilium" (réducteur de la tension
nerveuse et de l'instabilité émotionnelle et du
"Citalopram" (antidépresseur). Ces praticiens prévoyaient aussi des
troubles macro et micro-vasculaires avec une péjoration de son
atteinte oculaire si le traitement de son diabète et de son hypertension
venait à cesser. Fortement lié au contexte social un pronostic sur son
trouble de l'humeur n'était par contre pas exprimable en l'état. Enfin,
selon ces médecins, le soutien que son fils et la famille de celui-ci
assurait à la recourante dans la prise en charge de sa maladie et dans
ses activités quotidiennes lui permettait de conserver une autonomie
relativement bonne ; aussi l'interruption de cet indispensable soutien,
en cas de renvoi, risquait avoir d'importantes répercussions sur sa
santé. Avec le rapport médical précité figurait aussi une attestation du
"World Macedonian Congress" du 9 août 2005. Cette organisation y
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laissait entendre que la sécurité des non-slaves n'était pas encore
garantie en Macédoine où de nombreux déplacés n'avaient toujours
pas pu rentrer chez eux.
G.
Dans un courrier du 3 septembre 2007, la recourante a maintenu
qu'en l'état son renvoi de Suisse n'était pas raisonnablement exigible
voire était illicite. Agée et partiellement impotente, elle dépend en effet
fortement de son fils dans la famille duquel elle vit depuis 1989
(1991?) et qui vient d'obtenir une autorisation de séjour. En outre son
renvoi en Macédoine où elle n'a plus ni famille sur laquelle s'appuyer
ni logement où s'installer risquait de la plonger dans la précarité voire
pis.
H.
A la demande du Tribunal, la recourante lui a fait suivre, le 9 octobre
2007, un rapport médical du 26 septembre précédent de la doctoresse
M._______, médecin-assistant à la PMU de Lausanne et un écrit du 5
octobre 2007 de M. E._______, psychologue auprès de l'association
"Appartenances". Selon la doctoresse M._______, l'état de la
recourante est en train de s'aggraver au point que son traitement
antidiabétique oral a récemment dû être accru ; un suivi
psychothérapeutique s'est aussi avéré nécessaire en raison d'une
péjoration de son anxiété. Enfin, dès août dernier du "Fluoxétine" lui a
été prescrit pour traiter ses troubles de l'humeur, ce qui rendait difficile
leur évaluation. Le pronostic, sans traitement de son diabète et de son
hypertension, recoupe celui des docteurs R._______ et V._______
dans leur rapport d'août 2005, la doctoresse M._______ y ajoutant
des risques d'atteinte cardiovasculaire. Eu égard à son état, la
recourante doit aussi se soumettre chaque année à quatre contrôles
de l'hémoglobine glyquée, à un examen ophtalmique et à un bilan
lipidique et de la fonction rénale. Pour la doctoresse M._______, c'est
l'encadrement familial dont bénéficie la recourante - toujours
accompagnée de sa belle-fille à ses consultations - qui rend possible
un suivi régulier. Aussi l'interruption de ce soutien pourrait avoir chez
elle de graves répercussions, tant somatiques que psychiques ; un
retour au pays l'exposerait d'ailleurs à une sévère réactivation de son
trouble anxieux. Enfin, il ressort du certificat du 5 octobre 2007 que la
recourante est suivie à la consultation de l'association
"Appartenances" depuis le 30 juillet de cette année pour un état
dépressif sévère sans symptômes psychotiques. Pour y remédier ont
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été mis en place des entretiens psycho-thérapeutiques à raison d'une
séance par quinzaine parallèlement au traitement médicamenteux
prescrit par la doctoresse M._______ puis ajusté par le docteur
D._______ de l'association précitée. La recourante y répond
favorablement mais relativement lentement. Actuellement, son état
nécessite toujours la poursuite de cette prise en charge, notamment
en regard des risques importants qu'elle coure en raison de son âge.
Droit :
1.
1.1 le Tribunal connaît de manière définitive des recours contre les
décisions (art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la
procédure administrative [PA, RS 172.021]) de l'ODM (art. 105 de la loi
sur l'asile du 26 juin 1998 [LAsi, RS 142.31] et art. 31 à 34 LTAF; art.
83 let. d ch. 1 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RO
2006 1205]).
1.2 Les recours encore pendants devant la Commission suisse de
recours en matière d'asile sont traitées dès le 1er janvier 2007 par le
Tribunal administratif fédéral dans la mesure où il est compétent
(art. 53 al. 2 phr. 1 LTAF). Le nouveau droit de procédure s applique
(art. 53 al. 2 phr. 2 LTAF).
1.3 la recourante a qualité pour recourir. Présenté dans la forme et les
délais prescrits par la loi, son recours est recevable (art. 48ss PA).
2. A._______ conteste uniquement l'exécution de son renvoi ; elle n a
pas recouru contre la décision de l'ODM en tant qu'elle rejette sa
demande d'asile de sorte qu'en ce qui concerne la reconnaissance de
sa qualité de réfugié et l'octroi de l'asile, la décision en question a
acquis force de chose décidée.
3.
3.1 Lorsqu il rejette la demande d'asile ou qu'il refuse d'entrer en
matière à ce sujet, l'ODM prononce, en règle générale, le renvoi de
Suisse et en ordonne l'exécution; il tient compte du principe de l'unité
de la famille (art. 44 al. 1 LAsi). Le renvoi ne peut être prononcé, selon
l'art. 32 de l'ordonnance sur l'asile relative à la procédure du 11 août
1999 (OA 1, RS 142.311), lorsque le requérant d asile dispose d une
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autorisation de séjour ou d établissement valable, ou qu il fait l objet
d une décision d extradition ou d une décision de renvoi conformément
à l art. 121 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 décembre 1998
(Cst., RS 101).
3.2 Aucune exception à la règle générale du renvoi n'étant en
l'occurrence réalisée, le Tribunal est tenu, de par la loi, de confirmer
cette mesure.
4.
4.1 L exécution du renvoi est ordonnée si elle est licite,
raisonnablement exigible et possible (art. 44 al. 2 LAsi).
4.2 L'exécution n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son
Etat d'origine ou de provenance ou dans un Etat tiers est contraire aux
engagements de la Suisse relevant du droit international (art. 14a al. 3
de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l établissement des
étrangers; LSEE, RS 142.20). Aucune personne ne peut être
contrainte, de quelque manière que ce soit, à se rendre dans un pays
où sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté serait menacée pour
l'un des motifs mentionnés à l'art. 3 al. 1 LAsi, ou encore d'où elle
risquerait d'être astreinte à se rendre dans un tel pays (art. 5 al. 1
LAsi). Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou
traitements inhumains ou dégradants (art. 3 de la Convention du 4
novembre 1950 de sauvegarde des droits de l homme et des libertés
fondamentales (CEDH, RS 0.101).
4.3 L'exécution ne peut notamment pas être raisonnablement exigée
si elle implique la mise en danger concrète de l'étranger (art. 14a al. 4
LSEE).
4.4 L'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut quitter la
Suisse, ni être renvoyé, ni dans son Etat d'origine ou de provenance,
ni dans un Etat tiers (art. 14a al. 2 LSEE).
5.
En l'occurence, comme dit plus haut, A._______ a recouru contre la
décision de l'ODR du 15 juillet 2003 en en contestant uniquement le
point du dispositif relatif à l'exécution de son renvoi de Suisse qu'elle
n'estime pas raisonnablement exigible voire illicite. Ici, il convient de
rappeler que les trois conditions mises à l'empêchement de l'exécution
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d'un renvoi par les art. 14a al. 2 à 4 LSEE et 44 al. 2 LAsi sont de
nature alternative : dès lors il suffit que l'une de ces conditions ne soit
pas réalisée pour qu'un renvoi ne soit pas exécutable. En l'occurrence,
il y a d'abord lieu de se demander si, en l'état, l'exécution du renvoi est
raisonnablement exigible.
6.
6.1 Selon l'art 44 al. 2 LAsi, en relation avec l'art. 14a al. 4 LSEE,
l'exécution du renvoi peut notamment ne pas être raisonnablement
exigée si elle implique une mise en danger concrète de l'étranger.
Cette disposition s'applique en premier lieu aux "réfugiés de la
violence", soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de
la qualité de réfugié parce qu'ils ne sont pas personnellement
persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile
ou de violences généralisées, et ensuite aux personnes pour qui un
retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment
parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont
besoin. L'autorité à qui incombe la décision doit donc dans chaque cas
confronter les aspects humanitaires liés à la situation dans laquelle se
trouverait l'étranger concerné dans son pays après l'exécution du
renvoi à l'intérêt public militant en faveur de son éloignement de
Suisse (JICRA 1999 n° 28 p. 170 et jurisp. citée ; 1998 n° 22 p. 191).
6.2 Dans le cas particulier, il convient de se pencher en premier sur
les motifs médicaux que la recourante oppose à la mise en oeuvre de
son renvoi car si ces motifs devaient se révéler pertinents, l'examen de
la situation en Macédoine et des possibilités de la recourante de s'y
réinsérer ne serait alors plus nécessaire.
6.3 L'art. 14a al. 4 LSEE, auquel renvoie l'art. 44 al. 2 LAsi, vaut aussi
pour les personnes dont l'exécution du renvoi ne peut être
raisonnablement exigée parce qu'en cas de retour dans leur pays
d'origine ou de provenance, elles pourraient ne plus recevoir les soins
essentiels garantissant des conditions minimales d'existence ; par
soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et
d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine
(cf. JICRA 2003 no 24 consid. 5b p.157s. ; GABRIELLE STEFFEN, Droit aux
soins et rationnement, Berne 2002, p. 81s. et 87). L'art. 14a al. 4
LSEE, disposition exceptionnelle tenant en échec une décision
d'exécution du renvoi, ne saurait en revanche être interprétée comme
une norme qui comprendrait un droit de séjour lui-même induit par un
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droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à
recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que
l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays
d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteint pas le standard
élevé qu'on trouve en Suisse (JICRA 2003 précitée, ibidem, et JICRA
1993 no 38 p. 274s.). Ainsi, si les soins essentiels nécessaires
peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance de
l'étranger concerné, l'exécution du renvoi dans l'un ou l'autre de ces
pays sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, au sens de
l'art. 14a al. 4 LSEE si, en raison de l'absence de possibilités de
traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très
rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en
danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et
notablement plus grave de son intégrité physique (cf. JICRA 2003
précitée, ibidem ; GOTTFRIED ZÜRCHER, Wegweisung und
Fremdenpolizeirecht : die verfahrensmässige Behandlung von
medizinischen Härtefällen, in Schweizerisches Institut für
Verwaltungskurse, Ausgewählte Fragen des Asylrechts, Lucerne
1992). Cela dit, il sied de préciser que si, dans un cas d'espèce, le
mauvais état de santé ne constitue pas en soi un motif d'inexigibilité
sur la base des critères qui précèdent, il peut demeurer un élément
d'appréciation dont il convient alors de tenir compte dans le cadre de
la pondération de l'ensemble des éléments ayant trait à l'examen de
l'exécution du renvoi (JICRA 2003 précitée, ibidem).
6.4 La recourante soutient n'avoir aujourd'hui en Macédoine ni
proches sur lesquels s'appuyer ni logement où s'installer. Compte tenu
de son âge, de son état et des pathologies qui l'affectent, elle ne
pourrait donc y vivre décemment si elle devait y être renvoyée. De fait,
le Tribunal ne saurait raisonnablement exiger d'une veuve de 76 ans,
partiellement aveugle et partiellement sourde, en proie à de multiples
pathologies dont des troubles psychiques, qu'elle affronte seule les
difficultés que lui occasionnerait son retour en Macédoine avec pour
tout soutien l'aide financière que ses enfants à l'étranger seraient
susceptibles de lui fournir. Cela dit, le Tribunal était aussi en droit
d'attendre de la recourante qu'elle prouve ses dires en produisant des
documents officiels attestant du séjour ou de l'établissement de ses
enfants à l'étranger. Pour autant, il ne peut ignorer qu'éventuellement
depuis le décès de son mari en 1989 (1991?), assurément en tout cas
depuis son arrivée en Suisse, en novembre 2001, la recourante vit
chez son fils B._______ auquel les autorités de son canton de
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domicile viennent d'octroyer une autorisation de séjour. Dans la famille
de ce fils, elle y a ses habitudes et ses repères, surtout elle y
bénéficie du soutien dont elle a besoin en raison de son état  sa
belle-fille l'accompagne à toutes ses consultations médicales et, selon
la doctoresse M._______, son suivi régulier est possible grâce à cet
encadrement familial  elle y trouve aussi la quiétude et la sécurité
nécessaires à son équilibre fragile. En fait, cet encadrement est si
déterminant pour la recourante que, toujours selon la doctoresse
M._______, sa fin abrupte pourrait avoir de graves répercussions sur
son état comme sur sa santé psychique. C'est pourquoi, même si à la
lumière des principes rappelés au chiffre précédent, on doit admettre
que, sur un plan strictement médical, le renvoi de la recourante serait
envisageable dès lors que ses pathologies ne sont pas graves au point
d'empêcher la mise en oeuvre de cette mesure et que les
médicaments comme la prise en charge psychothérapeutique dont elle
a besoin sont disponibles en Macédoine, sa situation personnelle et le
risque de sévère réactivation de son trouble anxieux (PTSD) auquel
l'exposerait son retour en Macédoine amènent en fin de compte le
Tribunal à considérer qu'en l'état l'exécution de son renvoi n'est pas
raisonnablement exigible.
7.
Partant, le recours doit être admis. Les points 4 et 5 du dispositif de la
décision du 15 juillet 2003 sont annulés. L'ODM est invité à prononcer
l'admission provisoire de la recourante.
7.1 Vu l'issue de la cause, il n'est pas perçu de frais de sorte que la
demande d'assistance judiciaire partielle devient sans objet (art. 65 al.
1 PA).
7.2 Par ailleurs, dans la mesure où elle obtient gain de cause, la
recourante peut prétendre à l'allocation de dépens aux conditions
prévues dans le règlement concernant les frais, dépens et indemnités
fixés par le Tribunal administratif (FITAF, RS 173.320.2), en particulier
à ses art. 10 et 14. En l'occurrence, au vu de l'affaire considérée dans
son ensemble, le Tribunal décide de faire suite au décompte de
prestations produit en cause le 9 octobre 2007 et alloue à la
recourante un montant de 580 francs à titre d'indemnité de partie.
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est admis.
2.
Les chiffres 4 et 5 du dispositif de la décision du 15 juillet 2003 sont
annulés.
3.
L'ODM est invité à régler les conditions de résidence en Suisse de la
recourante conformément aux dispositions de la LSEE relatives à
l'admission provisoire.
4.
Il n'est pas perçu de frais de procédure. Partant, la demande
d'assistance judiciaire partielle est sans objet.
5.
L'ODM versera à la recourante un montant de 580 francs (TVA
comprise) à titre de dépens.
6.
Le présent arrêt est communiqué :
- à la mandataire de la recourante par lettre recommandée ;
- à l'autorité inférieure, en copie (avec dossier n° réf. N_______) ;
- au [...] du canton [...] [...], [...] à [...]
Le juge : Le greffier :
Maurice Brodard Jean-Claude Barras
Expédition :
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