E-4170/2015 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière / procédure Dublin) et renvoi - Asile (non-entrée en matière / procédure Dublin) e...
Karar Dilini Çevir:
E-4170/2015 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière / procédure Dublin) et renvoi - Asile (non-entrée en matière / procédure Dublin) e...
B u n d e s v e rw a l t u ng s g e r i ch t
T r i b u n a l ad m i n i s t r a t i f f éd é r a l
T r i b u n a l e am m in i s t r a t i vo f e d e r a l e
T r i b u n a l ad m i n i s t r a t i v fe d e r a l








Cour V
E-4170/2015



Ar r ê t d u 1 3 j u i l l e t 2 0 1 5
Composition
Jean-Pierre Monnet, juge unique,
avec l'approbation de Gérard Scherrer, juge ;
Jean-Marie Staubli, greffier.

Parties
A._______, né le (…),
et sa compagne,
B._______, née le (…),
Mongolie,
(…),
recourants,



contre

Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM ;
anciennement Office fédéral des migrations, ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.


Objet
Asile (non-entrée en matière / procédure Dublin) et renvoi ;
décision du SEM du 23 juin 2015 / N (…).
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Vu
la demande d'asile déposée par les recourants en date du 5 juin 2015 au
Centre d'enregistrement et de procédure (ci-après : CEP) de Vallorbe,
les résultats du 8 juin 2015 de la comparaison de leurs données
dactyloscopiques avec celles enregistrées dans la base de données
Eurodac, dont il ressort que les recourants ont déposé une demande d'asile
en France, le 27 mars 2015,
les deux demandes conjointes du 11 juin 2015 du SEM aux autorités
françaises aux fins de reprise en charge des recourants, sur la base de
l'art. 18 par. 1 point b du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement
européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et
mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen
d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats
membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte)
(JO L 180/31 du 29.6.2013 ; ci-après : RD III),
les procès-verbaux des auditions des recourants du 15 juin 2015 au CEP,
la réponse positive du 19 juin 2015 des autorités françaises aux demandes
précitées, fondée sur la même disposition réglementaire,
la décision du 23 juin 2015, notifiée le 30 juin 2015, par laquelle le SEM
n'est pas entré en matière sur la demande d'asile des recourants, a
prononcé leur renvoi (transfert) de Suisse en France et a ordonné
l'exécution de cette mesure, précisant qu'un éventuel recours ne déployait
pas d'effet suspensif,
le recours interjeté le 2 juillet 2015 contre la décision précitée auprès du
Tribunal administratif fédéral (ci-après : Tribunal), par lequel les recourants
ont conclu à l'annulation de la décision du 23 juin 2015 et à l'entrée en
matière sur leur demande d'asile,
les demandes d'assistance judiciaire et de tenue d'une audience, dont il
est assorti,
l'annexe au recours précité, à savoir un écrit manuscrit et en langue
mongole, daté du 2 juillet 2015,
les mesures provisionnelles du 6 juillet 2015, par lesquelles l'exécution du
transfert des recourants a été suspendue,
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et considérant
qu'en vertu de l'art. 31 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif
fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal connaît des recours contre les
décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la
procédure administrative (PA, RS 172.021),
qu'en particulier, les décisions rendues par le SEM en matière d'asile et de
renvoi peuvent être contestées devant le Tribunal conformément à l'art.
105 de la loi du 26 juin 1998 sur l’asile (LAsi, RS 142.31) et à l'art. 33 let.
d LTAF,
que le Tribunal est donc compétent pour connaître du présent litige,
qu'il statue de manière définitive (cf. art. 83 let. d ch. 1 de la loi du
17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]),
que les recourants ont qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA),
que le recours, interjeté dans la forme (cf. art. 52 al. 1 PA) et le délai (cf. art.
108 al. 2 LAsi) prescrits par la loi, est recevable,
qu'à l'encontre d'une décision de non-entrée en matière et de transfert
fondée sur la loi sur l'asile et le RD III, le recourant peut invoquer, en vertu
de l'art. 106 al. 1 LAsi, la violation du droit fédéral, notamment l'abus ou
l'excès dans l'exercice du pouvoir d'appréciation (let. a), et l'établissement
inexact ou incomplet de l'état de fait pertinent (let. b),
qu'il ne peut pas invoquer l'inopportunité de la décision attaquée
(cf. ATAF E-641/2014 du 13 mars 2015 consid. 5.4 [prévu à publication]),
que, saisi d'un recours contre une décision de non-entrée en matière sur
une demande d'asile, le Tribunal se limite à examiner le bien-fondé d'une
telle décision (cf. ATAF 2012/4 consid. 2.2),
qu'au préalable, la demande des recourants tendant à être entendus lors
d'une audience d'instruction avec l'assistance d'un interprète doit être
rejetée,
que les garanties minimales en matière de droit d'être entendu découlant
de l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.,
RS 101) ne comprennent en principe pas le droit d'être entendu oralement
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(arrêt du Tribunal fédéral 2C_901/2014 du 27 janvier 2015, consid. 3 ; ATF
134 I 140 consid. 5.3 p. 148 ; ATF 130 II 425 consid. 2.1 p. 428),
qu'en l'occurrence, une telle audience ne se justifie pas, dès lors que les
recourants ont été dûment entendus par le SEM, le 15 juin 2015, qu'ils ont
pu faire valoir tous leurs arguments dans le cadre de leur recours, et que
le Tribunal a fait d'office procéder à la traduction de leur écrit annexé à leur
recours,
qu'en l'espèce, l'autorité inférieure a fait application de l'art. 31a al. 1
let. b LAsi, disposition en vertu de laquelle elle n'entre pas en matière sur
une demande d'asile lorsque le requérant peut se rendre dans un Etat tiers
compétent, en vertu d'un accord international, pour mener la procédure
d'asile et de renvoi,
qu'en vertu de l'Accord du 26 octobre 2004 entre la Confédération suisse
et la Communauté européenne relatif aux critères et aux mécanismes
permettant de déterminer l'Etat responsable de l'examen d'une demande
d'asile introduite dans un Etat membre ou en Suisse (AAD,
RS 0.142.392.68), le SEM examine la compétence relative au traitement
d'une demande d'asile selon les critères fixés dans le RD III (cf. art. 1 et
29a al. 1 de l'ordonnance 1 sur l'asile du 11 août 1999 [OA 1, RS 142.311]
dans sa nouvelle version conforme à la modification du 12 juin 2015
[RO 2015 1848 spéc. 1854]),
que, s'il ressort de l'examen de la compétence relative au traitement d'une
demande d'asile selon les critères fixés dans le RD III qu'un autre Etat est
responsable du traitement de la demande d'asile, l'autorité inférieure rend
une décision de non-entrée en matière après que l'Etat requis a accepté la
prise ou la reprise en charge du requérant d'asile,
que, conformément à l'art. 18 par. 1 point b RD III, l'Etat membre
responsable de l'examen d'une demande de protection internationale en
vertu du règlement est tenu de reprendre en charge – dans les conditions
prévues aux art. 23, 24, 25 et 29 – le demandeur dont la demande est en
cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre Etat
membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre
Etat membre,
que, toutefois, sur la base de l'art. 17 par. 1 RD III (clause de souveraineté),
chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection
internationale qui lui est présentée par le ressortissant d'un pays tiers ou
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un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères
fixés dans le règlement,
qu'en l'occurrence, les investigations menées par le SEM ont révélé que
les recourants ont déposé une demande d'asile en France le 27 mars 2015,
que, le 19 juin 2015, les autorités françaises ont expressément accepté,
sur la base de l'art. 18 par. 1 point b RD III, de reprendre en charge les
recourants connus en France sous de fausses identités et nationalités,
que la France a ainsi reconnu sa compétence pour traiter la demande
d'asile des intéressés, ce que ceux-ci ne contestent pas,
qu'en l'espèce, l'art. 3 par. 2 al. 2 RD III n'est pas applicable, dès lors qu'il
n'y a aucune raison de croire qu'il existe en France des défaillances
systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des
demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant
au sens de l'art. 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne (ci-après Charte UE),
que, lors de leurs auditions, dans leur recours et dans leur écrit manuscrit
y annexé, les recourants ont fait valoir qu'en France, ils craignaient d'être
exposés aux agissements d'un individu, auquel ils auraient déjà eu affaire
dans leur pays d'origine, et qui réclamait au recourant le paiement d'une
forte somme détournée par un cadre de la fonction publique,
qu'ils ont soutenu que cet individu avait appris en Mongolie leur arrivée en
France et les avait menacés par l'entremise de leurs proches de
représailles qui seraient mises en œuvre par des groupes mafieux
implantés en France, avec lesquels il entretiendrait des liens,
qu’ils ont également allégué qu'ils seraient retrouvés en France assez
aisément en raison d'une importante communauté mongole, qu'ils n'y
pourraient ainsi bénéficier d'aucune protection, que leurs conditions de vie
dans ce pays avaient été difficiles et indignes et qu'ils souhaitaient un
examen médical,
qu'ainsi, ils ont implicitement sollicité l'application de la clause de
souveraineté (art. 17 par. 1 RD III),
que la France est liée à la Charte UE, et est partie à la Convention du
28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (Conv. réfugiés, RS 0.142.30),
à la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de l'homme
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et des libertés fondamentales (CEDH, RS 0.101), et à la Convention du
10 décembre 1984 contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants (Conv. torture, RS 0.105),
que la France est également liée par la directive no 2013/32/UE du
Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des
procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection
internationale [refonte] (JO L 180/60 du 29.6.2013, ci-après : directive
Procédure) et la directive no 2013/33/UE du Parlement européen et du
Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l'accueil des
personnes demandant la protection internationale [refonte] (JO L 180/96
du 29.6.2013, ci-après : directive Accueil),
que ces directives qui abrogent et remplacent les anciennes directives
no 2005/85/CE (cf. art. 53 directive Procédure) et no 2003/9/CE (cf. art. 32
directive Accueil) avec effet au 21 juillet 2015, pourront être invoquées,
dans leurs dispositions inconditionnelles et suffisamment précises, par les
particuliers devant les juridictions nationales françaises à partir de cette
date (cf. CJUE, arrêt du 24 novembre 2011, ASNEF c. Administración del
Estado, C-468/10 et 469/10, par. 51), au cas où le projet de loi relative à la
réforme du droit de l'asile no 566 2014-2015, adopté en nouvelle lecture
par l'Assemblée nationale le 25 juin 2015, ne serait pas encore en vigueur
au 21 juillet 2015,
qu'en l'absence d'une pratique avérée, en France de violation
systématique de ces normes minimales de l'Union européenne, cet Etat
est présumé respecter ses obligations tirées du droit international public,
en particulier le principe de non-refoulement énoncé expressément à
l'art. 33 Conv. réfugiés, ainsi que l'interdiction des mauvais traitements
ancré à l'art. 3 CEDH et à l'art. 3 Conv. torture (cf. CourEDH, arrêt du
4 novembre 2014, Affaire Tarakhel c. Suisse, requête no 29217/12,
par. 103, et arrêt du 21 janvier 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce, requête
no 30696/09, par. 352 s. et 359),
que cette présomption peut être renversée par des indices sérieux que,
dans le cas concret, les autorités de cet Etat ne respecteraient pas le droit
international (cf. ATAF 2010/45 consid. 7.4 et 7.5),
qu'en l'espèce, les recourants n'ont pas démontré ni même allégué des
indices sérieux que, dans leur cas concret, leurs conditions d'existence en
France revêtiraient un tel degré de pénibilité et de gravité qu'elles seraient
constitutives d'un traitement contraire à l'art. 3 CEDH ou encore à
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l'art. 3 Conv. torture, ni que les autorités françaises ne respecteraient pas
le droit international (cf. ATAF 2010/45 consid. 7.4 et 7.5),
qu'en particulier, les allégations des recourants relatives aux prétendues
craintes d'être exposés en France à des agissement de tiers, sont vagues,
non circonstanciées et lacunaires,
que, force est de constater avec le SEM que rien ne permet de considérer
que les recourants ne pourraient pas s'adresser aux autorités françaises
compétentes d'abord pour invoquer leurs vrais motifs d'asile, puis pour y
déposer une plainte ou requérir leur protection contre toutes menaces
concrètes à leur égard,
que s'ils devaient être contraints par les circonstances à mener une
existence non conforme à la dignité humaine, ou s'ils devaient estimer que
la France violait ses obligations d'assistance à leur encontre ou de toute
autre manière portait atteinte à leurs droits fondamentaux, ils leur
appartiendrait de faire valoir leurs droits directement auprès des autorités
de ce pays en usant des voies de droit adéquates,
qu'il convient encore de rappeler que le règlement Dublin III ne confère pas
aux demandeurs d'asile le droit de choisir l'Etat membre offrant, à leur avis,
les meilleures conditions d'accueil comme Etat responsable de l'examen
de leur demande d'asile (cf. ATAF 2010/45 consid. 8.3),
qu'au vu de ce qui précède, le transfert des recourants en France n’est pas
contraire aux obligations de la Suisse découlant des dispositions
conventionnelles précitées,
qu’en outre, les recourants n’ont fait valoir aucun grief ni argument qui
serait constitutif de raisons humanitaires au sens de l'art. 29a al. 3 OA 1,
comme le SEM l'a d'ailleurs relevé à juste titre dans la décision attaquée,
qu’en conséquence, il y a donc pas lieu de faire application de la clause
discrétionnaire de l’art. 17 par. 1 RD III,
qu'au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le SEM n'est pas entré
en matière sur la demande de protection des intéressés, en application de
l'art. 31a al. 1 let. b LAsi, et qu'il a prononcé leur transfert de Suisse vers
la France conformément à l'art. 44 LAsi, aucune exception à la règle
générale du renvoi n'étant réalisée (art. 32 OA 1),
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qu'enfin, lorsqu'une décision de non-entrée doit être prononcée en
application de la loi sur l'asile et du RD III, parce qu'un autre Etat membre
de l'espace Dublin est responsable de l'examen de la demande de
protection internationale et qu'aucune clause discrétionnaire ne s'applique,
il n'y a pas de place pour un examen séparé d'un éventuel empêchement
à l'exécution du renvoi au sens de l'art. 83 LEtr (cf. ATAF 2010/45 consid.
8.2.3 et 10),
qu'ainsi, le recours doit être rejeté et la décision attaquée confirmée,
que, s'avérant manifestement infondé, il doit être rejeté dans une
procédure à juge unique, avec approbation d'un second juge
(cf. art. 111 let. e LAsi),
qu'il est dès lors renoncé à un échange d'écritures, le présent arrêt n'étant
motivé que sommairement (cf. art. 111a al. 1 et 2 LAsi),
qu'avec le présent prononcé, les mesures provisionnelles prononcées le 6
juillet 2015 prennent fin,
que les conclusions du recours étant d'emblée vouées à l'échec, la
demande des recourants tendant à l'octroi de l'assistance judiciaire est
rejetée (cf. art. 65 al. 1 PA),
que, vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la
charge des recourants, conformément à l'art. 63 al. 1 PA et aux art. 2 et 3
let. a du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et
indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2),
qu'il appartiendra au SEM de restituer aux recourants la carte d'identité de
A._______ ainsi que le permis de conduire de B._______, remis par ceux-
ci au cours de la procédure,

(dispositif page suivante)
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le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
La requête d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais de procédure, d'un montant de 600 francs, sont mis à la charge
des recourants. Ce montant doit être versé sur le compte du Tribunal dans
les 30 jours dès l'expédition du présent arrêt.
4.
Le présent arrêt est adressé aux recourants, au SEM et à l'autorité
cantonale compétente.

Le juge unique : Le greffier :

Jean-Pierre Monnet Jean-Marie Staubli


Expédition :