E-4125/2010 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi - Non-entrée en matière
Karar Dilini Çevir:
E-4125/2010 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi - Non-entrée en matière
Cour V
E-4125/2010/wan
{T 0/2}
A r r ê t d u 1 6 j u i n 2 0 1 0
Jenny de Coulon Scuntaro, juge unique,
avec l'approbation de Gérard Scherrer, juge ;
Astrid Dapples, greffière.
A._______, son épouse
B._______, et leurs enfants
C._______,
D._______,
E._______,
Serbie,
recourants,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Asile (non-entrée en matière) et renvoi; décision de
l'ODM du 2 juin 2010 / N_______.
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
E-4125/2010
Vu
la demande d'asile déposée en Suisse par les intéressés et leurs
enfants en date du 20 mai 2010,
les procès-verbaux de leurs auditions, lors desquelles ils ont allégué
être ressortissants serbes, d'ethnie rom et avoir eu leur dernier
domicile à F._______, dans la municipalité de G._______,
leurs déclarations selon lesquelles ils auraient quitté leur village en
raison des menaces proférées à leur encontre par un voisin, dont le
fils aurait été blessé accidentellement par un conducteur automobile,
l'attitude de ce voisin, qui n'aurait pas hésité à frapper le conducteur
automobile avant de chercher à s'en prendre au médecin, au recourant
et à son fils aîné, lequel, selon les déclarations du conducteur
automobile, aurait poussé son camarade de jeu sous les roues du
véhicule,
la décision des intéressés de quitter leur domicile, suite au conseil de
la police, arrivée sur les lieux pour entendre les différentes parties,
d'agir dans ce sens, dès lors qu'elle serait dans l'impossibilité
d'affecter un agent à la surveillance des intéressés,
le déplacement des intéressés à H._______, chez les parents de la
recourante,
le fait que le jour même, des inconnus s'en seraient pris à la maison
des parents, jetant des pierres jusqu'à l'arrivée de la police, laquelle
les aurait fait fuir,
la crainte des intéressés de ne plus être en sécurité sur sol serbe,
suite aux menaces proférées à leur encontre par leur ancien voisin,
le fait que leur domicile aurait été brûlé après leur départ,
les difficultés d'ordre plus général rencontrées par les intéressés dans
la vie courante,
la décision du 2 juin 2010, par laquelle l'ODM, constatant que la
Serbie faisait partie des pays considérés par le Conseil fédéral, en
application de l'art. 6a al. 2 let. a de la loi du 26 juin 1998 sur l'asile
Page 2
E-4125/2010
(LAsi, RS 142.31), comme libres de persécution (safe country), et esti-
mant que le dossier ne révélait pas d'indices de persécution, n'est pas
entré en matière sur la demande d'asile des recourants, conformément
à l'art. 34 al. 1 LAsi, a prononcé leur renvoi et ordonné l'exécution de
cette mesure,
l'acte du 7 juin 2010, par lequel les recourants ont recouru contre cette
décision, ont conclu à l'entrée en matière sur leur demande d'asile et à
la reconnaissance de leur qualité de réfugié,
la demande d'assistance judiciaire partielle, dont leur mémoire de
recours est assorti,
les documents produits à l'appui du mémoire de recours, relatifs à la
situation des Roms en Serbie,
l’apport du dossier relatif à la procédure de première instance auprès
de l'ODM que le Tribunal administratif fédéral a requis à réception du
recours,
et considérant
que, sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du
17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le
Tribunal administratif fédéral, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des
recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du
20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021)
prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF,
qu'en particulier, les décisions rendues par l'ODM concernant l'asile
peuvent être contestées devant le Tribunal administratif fédéral
conformément à l'art. 105 LAsi et 37 LTAF,
que les recourants ont qualité pour recourir pour eux-mêmes et pour
leurs enfants (cf. art. 48 al. 1 PA) et que leur recours, interjeté dans la
forme (cf. art. 52 PA) et le délai (cf. art. 108 al. 2 LAsi) prescrits par la
loi, est recevable,
Page 3
E-4125/2010
que, saisie d'un recours contre une décision de non-entrée en matière
sur une demande d'asile, l'autorité de recours se limite à examiner le
bien-fondé d'une telle décision ; que les motifs d'asile invoqués dans
un tel recours ne peuvent faire l'objet d'un examen matériel
(cf. Jurisprudence et informations de la Commission suisse de recours
en matière d’asile [JICRA] 2004 n° 34 consid. 2.1. p. 240s. ; 1996 n° 5
consid. 3 p. 39 ; 1995 n° 14 consid. 4 p. 127s., et jurisp. cit.),
qu'aussi, en tant que le recours conclut également à la
reconnaissance de la qualité de réfugié, cette conclusion est
irrecevable,
que, conformément à l'art. 6a al. 2 let. a LAsi, le Conseil fédéral
désigne les Etats d'origine ou de provenance sûrs, à savoir ceux dans
lesquels il estime que le requérant est à l'abri de toute persécution,
qu'il soumet à un contrôle périodique les décisions qu'il prend sur ce
point (cf. art. 6a al. 3 LAsi),
que si le requérant vient de l'un de ces Etats, l'office n'entre pas en
matière sur sa demande, à moins qu'il n’existe des indices de
persécution (cf. art. 34 al. 1 LAsi),
que la notion de persécution de l'art. 34 al. 1 LAsi correspond à celle
de l'art. 18 LAsi,
qu'elle comprend les préjudices, subis ou craints, émanant de l'être
humain, soit les sérieux préjudices au sens de l'art. 3 LAsi, les risques
de violation des droits humains et les situations de guerre, de guerre
civile ou de violence menaçant un individu en particulier, à l'exclusion
des autres empêchements à l'exécution du renvoi (cf. JICRA 2004 n° 5
consid. 4c/aa p. 35; 2003 n° 20 consid. 3c p. 130; 2003 n° 19
consid. 3c p. 124 s.; 2003 n°18 p. 109 ss),
que le Conseil fédéral a désigné la Serbie comme Etat exempt de
persécutions avec effet au 1er avril 2009,
que la question de savoir s'il existe des indices de persécution
nécessitant qu'il soit entré en matière sur une demande d'asile doit
faire l'objet d'un examen à titre préjudiciel; que les exigences relatives
au degré de preuve sont réduites en la matière; que dès qu'un examen
succinct des faits allégués laisse apparaître des signes tangibles,
Page 4
E-4125/2010
apparents et probables de préjudices émanant de l'être humain quel
qu'il soit (agent étatique ou personne privée), il y a lieu d'entrer en
matière sur la demande d'asile et de procéder à un examen matériel
de celle-ci; qu'un examen matériel à titre préjudiciel de la qualité de
réfugié, dans le cadre d'une procédure tendant à l'application de l'art.
18, de l'art. 33 al. 3 let. b ou de l'art. 34 al. 1 LAsi, n'est pas admis (cf.
dans ce sens JICRA 2004 n° 35 consid. 4.3. p. 247s., JICRA 2004 n°
34 consid. 4.2. p. 242, JICRA 2004 n° 5 consid. 4c/bb p. 36 et jurisp.
cit.),
qu'en l'espèce, le dossier ne révèle aucun fait propre à établir
l'existence d'indices de persécution au sens rappelé ci-dessus,
que l'appartenance à la minorité ethnique rom des intéressés ne
saurait, à elle seule, démontrer la présence de tels indices,
que si les membres de cette minorité sont certes victimes en Serbie
de brimades et de tracasseries de la part de tiers ou parfois d'autorités
locales, on ne saurait considérer, aussi blâmables que soient de tels
comportements, que les Roms sont systématiquement l'objet d'actes
de violence ou de graves discriminations entraînant une pression
psychique insupportable au sens de la loi sur l'asile,
qu'il convient également de préciser que la Serbie a mis sur pied
l'institution des « ombudsmann » (cf. Law on the Protector of Citizens
de 2005), susceptibles d'être appelés en cas de discriminations
ethniques,
que dans la province d'origine des recourants, à savoir en I._______, il
existe également un tel ombudsman qui garantit une assistance
juridique gratuite dans la réalisation des droits garantis par les lois du
pays et contre les discriminations,
que certes, les intéressés auraient fait l'objet de menaces verbales de
la part d'un ancien voisin, lequel ne s'en serait pas tenu à celles-ci
mais aurait également fait intervenir d'autres personnes au domicile du
père, respectivement beau-père des intéressés, où ils auraient trouvé
refuge,
qu'il doit cependant être constaté que dans les deux altercations
relatées impliquant le voisin en question, les recourants ont pu, selon
Page 5
E-4125/2010
leurs dires, compter sur l'intervention de la police qui a pu faire cesser
les agissements de celui-ci,
que de plus, les recourants n'ont fourni aucun élément ou moyen de
preuve susceptible de retenir la vraisemblance de leur récit présenté à
la base de leur demande en protection,
qu'en effet, il est singulier de constater que l'intéressé et son épouse
n'ont pas été à même de fournir quelque précision que ce soit quant à
la personne qui les menacerait, se contentant de déclarer qu'elle
s'appelait «I._______», alors que selon leurs propos, elle aurait été
leur voisin,
que le Tribunal émet certains doutes quant aux réelles raisons de leur
départ, dès lors qu'il ressort tant des déclarations de la recourante que
celles du recourant que des motifs liés à une situation économique
difficile et des problèmes de prise en charge en vue de soins qualifiés
seraient éventuellement à la base de la motivation de la famille de
quitter leur pays d'origine,
que ces motifs ne sauraient cependant être retenus dans le cadre des
indices de persécution de l'art. 34 al. 1 LAsi, justifiant une entrée en
matière, ce d'autant que les Roms de Serbie bénéficient d'une
assurance maladie étatique couvrant les frais médicaux essentiels ( cf.
Council of Europe: Report by the Commissioner for Human Rights,
Thommas Hammarberger, on his visit to Serbia, 11.03.2009, p. 33),
que dans leur recours, les intéressés n'ont pas davantage apporté
d'élément susceptible d'attester le récit présenté à l'origine de leur
demande d'asile,
que les documents produits ne sauraient apporter un nouvel élément
permettant de retenir des indices de persécution au sens précité, vu
qu'ils s'agit non seulement de documents généraux, datant en partie
de 10 ans, mais encore de pièces se référant à des situations
étrangères à la leur,
qu'en effet, alors que les documents produits font état de la situation
difficile et des mauvaises conditions de logement des Roms déplacés
du Kosovo et s'étant installés au sud de la Serbie, voire ceux habitant
dans des camps de fortune de ce pays, il doit être constaté que non
seulement les recourants ont prétendu avoir résidé toute leur vie en
Page 6
E-4125/2010
Serbie, plus exactement au nord de ce pays, mais encore ils ont
affirmé avoir toujours vécu dans une maison, que ce soit celle du père,
voire du beau-père, ou celle mise à disposition par l'Etat serbe, soit
dans des circonstances non comparables à celles décrites dans les
articles déposés dans le cadre de leur recours,
qu'en outre, les intéressés, contrairement à la documentation
présentée, possèdent des documents d'identité et sont enregistrés
dans leur pays d'origine,
que de plus, ils ont déclaré avoir comme langue maternelle le serbo-
croate et être de religion orthodoxe, soit autant d'éléments leur
permettant de vivre en Serbie, sans être exposés aux problèmes
décrits dans les pièces fournies,
qu'au vu de ce qui précède, n'étant à l'évidence pas menacés de
persécution au sens de l'art. 3 LAsi, les intéressés ne peuvent
bénéficier de l'art. 5 al. 1 LAsi qui reprend en droit interne le principe
du non-refoulement généralement reconnu en droit international public
et énoncé expressément à l'art. 33 de la Convention du 28 juillet 1951
relative au statut des réfugiés (Conv., RS 0.142.30),
qu'il ne ressort en outre du dossier aucun indice d'un risque, pour leur
personne, d'être soumis en cas de renvoi à un traitement prohibé par
l'art. 3 de la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits
de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, RS 0.101) ou par
l'art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants (RS 0.105; Conv. torture;
cf. JICRA 1996 n° 18 consid. 14b/ee p. 186 s.),
que la Serbie ne connaît pas une situation de guerre, de guerre civile
ou de violence généralisée qui permettrait de présumer, à propos de
tous les requérants provenant de cet Etat, et indépendamment des
circonstances de chaque cas particulier, l'existence d'une mise en
danger concrète au sens de l'art. 83 al. 4 de la loi fédérale sur les
étrangers du 16 décembre 2005 [LEtr, RS 142.20]),
qu'il s'ensuit qu'il n'existe aucun indice de persécution au sens de
l'art. 34 al. 1 LAsi et que c’est à juste titre que l’ODM n’est pas entré
en matière sur la demande d’asile des intéressés,
Page 7
E-4125/2010
que, sur ce point, le recours doit donc être rejeté et la décision de
première instance confirmée,
que lorsqu'il refuse d'entrer en matière sur une demande d'asile,
l'ODM prononce en principe le renvoi de Suisse et en ordonne
l'exécution (cf. art. 44 al. 1 LAsi),
qu’aucune des conditions de l’art. 32 de l'ordonnance 1 du 11 août
1999 sur l'asile relative à la procédure (OA 1, RS 142.311) n’étant
réalisée, en l'absence notamment d'un droit des recourants à une
autorisation de séjour ou d'établissement, le Tribunal est tenu de
confirmer le renvoi,
que, pour les motifs exposés ci-dessus, l'exécution du renvoi doit être
considérée comme licite (cf. art. 44 al. 2 LAsi et art. 83 al. 3 LEtr),
qu'elle est également raisonnablement exigible (art. 83 al. 4 LEtr;
JICRA 2003 n° 24 consid. 5 p. 157 s., et jurisp. cit.), dans la mesure où
elle ne fait pas apparaître, en l'espèce, une mise en danger concrète
des recourants,
qu'elle est enfin possible (cf. art. 83 al. 2 LEtr; JICRA 1997 n° 27
consid. 4a et b p. 207 s., et jurisp. cit.), les recourants étant tenus de
collaborer à l'obtention de documents de voyage leur permettant de
retourner dans leur pays d'origine (cf. art. 8 al. 4 LAsi),
que le recours, en tant qu’il porte sur le renvoi et son exécution, doit
ainsi également être rejeté,
que s'avérant manifestement infondé, il est rejeté dans une procédure
à juge unique, avec l'approbation d'un second juge
(art. 111 let. e LAsi),
qu'il est dès lors renoncé à un échange d'écritures, le présent arrêt
n'étant motivé que sommairement (cf. art. 111a al. 1 et 2 LAsi),
que, vu l’issue de la cause, il y aurait lieu de mettre des frais de
procédure à la charge des recourants (cf. art. 63 al. 1 PA et art. 2 et 3
let. b du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et
indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF,
RS 173.320.2]); qu'au vu des circonstances particulières du cas
Page 8
E-4125/2010
d'espèce, il y est renoncé à titre exceptionnel (art. 6 let. b FITAF) de
sorte que la demande d'assistance judiciaire partielle est sans objet.
(dispositif page suivante)
Page 9
E-4125/2010
le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Il est statué sans frais.
3.
La demande d'assistance judiciaire partielle est sans objet.
4.
Le présent arrêt est adressé aux recourants, à l'autorité inférieure et
au canton.
La juge unique : La greffière :
Jenny de Coulon Scuntaro Astrid Dapples
Expédition :
Page 10