E-2159/2009 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi - Asile (non-entrée en matière) et renvoi ; décision...
Karar Dilini Çevir:
E-2159/2009 - Abteilung V - Asile (non-entrée en matière) et renvoi - Asile (non-entrée en matière) et renvoi ; décision...
Cour V
E-2159/2009
{T 0/2}
A r r ê t d u 7 a v r i l 2 0 0 9
Emilia Antonioni, juge unique,
avec l'approbation de Maurice Brodard, juge ;
Olivier Bleicker, greffier.
B._______,
Nigéria,
recourant,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Asile (non-entrée en matière) et renvoi ; décision de
l'ODM du 26 mars 2009 / N (...).
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
E-2159/2009
Faits :
A.
Le 18 décembre 2008, après avoir franchi illégalement la frontière,
B._______ a déposé une demande d'asile au Centre d'enregistrement
et de procédure (CEP) de (...).
A cette occasion, il lui a été remis un document dans lequel les auto-
rités compétentes attiraient son attention, d'une part, sur la nécessité
de déposer dans les 48 heures ses documents de voyage ou ses piè-
ces d'identité et, d'autre part, sur l'issue éventuelle de la procédure en
l'absence de réponse concrète à cette injonction.
B.
B.a Entendu les 23 décembre 2008 et 12 mars 2009, le requérant a
indiqué parler (informations sur la situation personnelle du requérant).
Il n'aurait jamais détenu une carte d'identité ou un document de
voyage et il aurait laissé son certificat de naissance à C._______
(Nigéria).
B.b Le requérant a fait valoir, en substance, les faits suivants à l'appui
de sa demande d'asile lors de ses auditions :
Au début des années 2000, à la suite de l'empoisonnement de son
père par des talibans, le requérant a été pressenti pour lui succéder à
la tête de la communauté de D._______. Craignant pour sa vie, il a
préféré fuir sa région d'origine, car les gens « démoniaques » qui ont
assassiné son père posséderaient d'importantes ressources
financières et seraient déterminés à éliminer sa lignée. Ses craintes
seraient d'ailleurs renforcées par l'incapacité du gouvernement
nigérian à mettre un terme aux violences de D._______, lesquelles
continueraient secrètement. A la fin de l'année 2008, à E._______, le
requérant aurait fortuitement rencontré un homme blanc,« Friend , qui
lui aurait permis de quitter le Nigéria.
B.c Au moyen d'un document de voyage « rouge » présenté aux auto-
rités nigérianes, le requérant aurait pu embarquer à bord d'un vol
international à destination d'un pays européen dont il ne connaît pas le
nom. Par la suite, il aurait erré pendant deux semaines dans divers
lieux inconnus jusqu'à rencontrer un tiers qui lui aurait conseillé de
demander l'asile à Vallorbe ou à Bâle.
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B.d A son arrivée au CEP, le requérant détenait un reçu espagnol
d'une communication téléphonique et le programme d'une convention
protestante.
C.
Le 16 mars 2009, le requérant a remis à l'ODM la copie d'une décla-
ration sous serment établie le 13 mars 2009 devant un commissaire à
l'assermentation de la ville de C._______ (Nigéria). Il présente ce
document comme étant un « certificat de naissance » requis par sa
mère. Il se propose de produire le document original dès que ses
proches auront les ressources financières nécessaires.
D.
Par décision du 26 mars 2009, l'Office fédéral des migrations
(ci-après : l'Office fédéral) n'est pas entré en matière sur la demande
d'asile du requérant en application de l'art. 32 al. 2 let. a de la loi du
26 juin 1998 sur l'asile (LAsi, RS 142.31), a prononcé son renvoi de
Suisse et a ordonné l'exécution de cette mesure un jour après son en-
trée en force.
Pour l'essentiel, l'Office fédéral a observé que le requérant n'avait pro-
duit aucun document de légitimation, que ses explications à ce sujet
étaient sérieusement sujettes à caution, que son récit était stéréotypé
et irréaliste et que, en tout état de cause, il n'avait pas démontré à suf-
fisance qu'il ne pouvait trouver une protection dans son pays d'origine.
E.
Par acte remis à la poste le 1er avril 2009 à l'attention de l'Office
fédéral, le requérant a interjeté recours contre la décision précitée. Il a
indiqué avoir quitté E._______ (...) pour l'Europe par l'entremise d'un
passeur, qu'il disposerait dans cette ville d'une situation financière
saine (revenu d'au moins Fr. 1 000.- par mois), que son père est
décédé en 2000 et qu'un retour au Nigéria l'exposerait à « un danger
et des circonstances graves ».
F.
Le 3 avril 2009, l'Office fédéral a transmis le mémoire de recours et le
dossier de la cause au Tribunal administratif fédéral comme objet de
sa compétence.
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Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal
administratif fédéral (ci-après : le Tribunal), en vertu de l'art. 31 LTAF,
connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi
fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative
[PA, RS 172.021) prises par les autorités mentionnées aux art. 33
et 34 LTAF.
1.2 Le recourant a qualité pour recourir (art. 48 al. 1 PA). Présenté
dans les formes (art. 52 PA) et le délai (art. 108 al. 2 LAsi) prescrits
par la loi, le recours est recevable.
2.
Dans la mesure où l'ODM a rendu une décision de non-entrée en ma-
tière sur la demande d'asile du recourant, l'objet du recours ne peut
porter que sur le bien-fondé de cette décision (cf. ATAF 2007/8
consid. 5 p. 76 ss ; Jurisprudence et informations de la Commission
suisse de recours en matière d'asile [JICRA] 2004 n° 34 consid. 2.1
p. 240 s. ; JICRA 1996 n° 5 consid. 3 p. 39 ; JICRA 1995 n° 14
consid. 4 p. 127 s. ; ULRICH MEYER/ISABEL VON ZWEHL, L'objet du litige en
procédure de droit administratif fédéral, in Mélanges en l'honneur de
Pierre Moor, Berne, 2005, p. 435 ss, p. 439 ch. 8).
Les motifs d'asile invoqués ne peuvent dès lors faire l'objet d'un exa-
men matériel, sauf dans la mesure strictement nécessaire à l'examen
des conditions de la clause limitative de l'art. 32 al. 3 LAsi.
3.
3.1 Dans le cas particulier, il y a lieu de déterminer si l'Office fédéral
était fondé à faire application de l'art. 32 al. 2 let. a LAsi, disposition
aux termes de laquelle il n'est pas entré en matière sur une demande
d'asile si le requérant ne remet pas aux autorités, dans un délai de
48 heures après le dépôt de sa demande d'asile, ses documents de
voyage ou ses pièces d'identité ; cette disposition n'est applicable ni
lorsque le requérant rend vraisemblable que, pour des motifs excu-
sables, il ne peut pas le faire, ni si sa qualité de réfugié est établie au
terme de l'audition, conformément aux art. 3 et 7 LAsi, ni si l'audition
fait apparaître la nécessité d'introduire d'autres mesures d'instruction
pour établir la qualité de réfugié ou pour constater l'existence d'un em-
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pêchement à l'exécution du renvoi (cf. art. 32 al. 3 LAsi ; ATAF 2007/8
consid. 5.6.5-5.7 p. 90 ss).
3.2 Selon la jurisprudence, la notion de « documents de voyage ou
pièces d'identité » au sens de l'art. 32 al. 2 let. a LAsi comprend seule-
ment les documents et pièces qui ont été délivrés par les autorités
nationales et qui permettent une identification certaine du requérant.
De tels documents doivent, d'une part, prouver l'identité, y compris la
nationalité, de sorte que subsiste aucun doute et de manière à ga-
rantir l'absence de falsification, et, d'autre part, permettre le rapa-
triement dans le pays d'origine sans grandes formalités adminis-
tratives. D'autres documents que les cartes d'identité classiques peu-
vent cependant être également considérés comme des pièces d'iden-
tité au sens de la disposition précitée, par exemple des passeports in-
térieurs. En revanche, les documents qui fournissent des rensei-
gnements sur l'identité, mais qui sont établis en premier lieu dans un
autre but, comme les permis de conduire, les cartes professionnelles,
les certificats de naissance, les cartes scolaires ou les certificats de
fin d'études, ne peuvent être considérés comme des pièces d'identité
au sens de l'article précité (ATAF 2007/7 consid. 4-6 p. 58 ss).
4.
4.1 En l'espèce, à son arrivée au CEP de (...), le recourant n'a pas
remis aux autorités ses documents de voyage ou ses pièces d'identité
et n'a rien entrepris dans les 48 heures dès le dépôt de sa demande
d'asile pour s'en procurer.
Certes, un affidavit attesterait de sa citoyenneté nigériane. Cette
démarche est toutefois largement tardive (cf. JICRA 1999 n° 16
consid. 5 p. 108 ss), en contradiction avec les déclarations tenues lors
de son audition du 12 mars 2009 (cf. p.-v. d'audition du 12 mars 2009
[ci-après : pièce A11/10], p. 3 réponse 9), et le Tribunal a déjà jugé
qu'un tel document ne pouvait remplacer utilement une pièce d'identité
ou un document de voyage dans la présente procédure (cf. arrêt du
Tribunal administratif fédéral E-6029/2008 du 10 décembre 2008,
consid. 3.1). Une déclaration solennelle d'un proche n'engage en effet
pas les autorités du pays en question et ne permet pas une
identification certaine du recourant, dès lors qu'elle repose sur la seule
foi du déclarant. Par surabondance, ce document est manifestement
dépourvu de garanties suffisantes d'authenticité.
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4.2 Le recourant n'a pas non plus rendu vraisemblable l'existence d'un
motif excusable susceptible de justifier la non-production de tels docu-
ments, au sens de l'art. 32 al. 3 let. a LAsi.
Ainsi, les circonstances de temps et de lieu des différentes étapes de
son voyage sont évoqués en termes si généraux qu'elles excluent
toute recherche sérieuse pour tenter de retrouver son itinéraire ou son
identité. D'ailleurs, si le recourant avait sérieusement voulu invoquer
une circonstance personnelle excusable, il aurait certainement été en
mesure de renseigner l'autorité de façon utile sur les démarches à
entreprendre, comme il en avait le devoir, et il ne se serait pas abstenu
de procéder lui-même à des recherches. Il ne se serait en tout cas pas
borné à prétendre qu'il n'avait jamais possédé la moindre pièce d'iden-
tité au Nigéria (cf. p.-v. d'audition du 23 décembre 2008 [ci-après :
pièce A4/11], p. 4 ch. 13 ; cf. pièce A11/10, p. 3 réponse 6 et 7), qu'un
dénommé « Friend » lui avait procuré gratuitement un document de
voyage « rouge » pour embarquer à bord d'un vol international à desti-
nation de l'Europe (cf. pièce A4/11, p. 7 ch. 16 ; cf. pièce A11/10, p. 3
réponse 13), qu'il avait atterri dans un aéroport européen dont il ignore
tout – à commencer par son nom ou son emplacement – sauf qu'il est
« très grand » (cf. pièce A4/11, p. 7 ch. 16) et que le reçu téléphonique
espagnol trouvé en sa possession n'était qu'un papier quelconque
dont un tiers avait utilisé le verso pour lui indiquer l'emplacement des
CEP (cf. pièce A4/11, p. 7 ch. 16). Par suite, ses déclarations réalisent
typiquement les cas de figure visés par l'art. 32 al. 2 let. a LAsi et
l'Office fédéral était fondé à soutenir qu'il existait des indices sérieux
permettant de conclure que l'intéressé cherche à cacher les véritables
circonstances de sa venue en Suisse, qu'il a en réalité voyagé en étant
muni de ses documents d'identité et que leur non-production ne vise
qu'à dissimuler des indications y figurant. Au demeurant, le recourant
reconnaît expressément avoir suivi le « système » mis en place par
son passeur (cf. pièce A11/10, p. 3 réponse 6), ce qui ne saurait mani-
festement être une circonstance personnelle excusable.
4.3 C'est également à juste titre que l'Office fédéral a considéré que la
qualité de réfugié du recourant n'était pas établie au terme de l'audi-
tion (art. 32 al. 3 let. b LAsi ; ATAF 2007/8 consid. 5.6.4 p. 89 ss).
Il apparaît en effet d'emblée que les faits pertinents allégués sont
invraisemblables. Tout d'abord, en tant qu'elle ne s'épuise pas dans
une critique purement appellatoire, l'argumentation développée par le
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recourant à l'appui de son recours ne saurait conduire à la conclusion
que l'Office fédéral aurait violé le droit fédéral en lui refusant le statut
de réfugié. Il affirme en effet avoir vécu dans un quartier de la capitale
nigériane et, contrairement à ses précédentes déclarations (cf. p. ex.
pièce A11/10, p. 6 réponse 42), avoir disposé de ressources maté-
rielles convenables. Ensuite, les allégations tenues par le recourant
lors de ses auditions ne sont corroborées de façon concluante par
aucun élément de preuve et elles sont fortement sujettes à caution. Le
recourant ignore en effet tout du Royaume de D._______, de la nature
du conflit qui s'y déroule et il n'est pas à même d'indiquer les
circonstances de temps et de lieu des différents événements invoqués.
Par exemple, à la simple question de la dénomination du gouver-
nement local de D._______, il n'a pas été en mesure de trancher entre
les gouvernements de F._______ et de G._______ (cf. pièce A4/11,
p. 2 ch. 3). Il ne connaît en outre rien des personnes ou du
groupement de personnes qui se sont rebellés ces dernières années
contre le pouvoir coutumier, les appelant de manière largement
convenue « talibans » ou « Evil Men » (cf. pièce A11/10, p. 5 réponse
32). Enfin, s'il prétend que son père était « à un moment donné » à la
tête de la communauté de D._______ (cf. pièce A11/10, p. 6 réponse
34), il perd de vue qu'il s'agit d'un royaume coutumier dirigé par un
monarque.
4.4 Les motifs d'asile du recourant, étant en conséquence manifes-
tement sans fondement, l'ODM n'avait pas à procéder à d'autres
mesures d'instruction pour établir sa qualité de réfugié ou pour consta-
ter l'existence d'un empêchement à l'exécution de son renvoi, au sens
de l'art. 32 al. 3 let. c LAsi.
4.5 La décision de non-entrée en matière sur la demande d'asile de
l'intéressé, prononcée par l'ODM, est dès lors confirmée.
5.
Aucune exception à la règle générale du renvoi n'étant en l'occurrence
réalisée (cf. art. 32 de l'ordonnance 1 du 11 août 1999 sur l’asile rela-
tive à la procédure [OA 1, RS 142.311]), le Tribunal est tenu de confir-
mer cette mesure (art. 44 al. 1 LAsi).
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6.
6.1 L’exécution du renvoi est ordonnée si elle est licite, raisonna-
blement exigible et possible (art. 44 al. 2 LAsi). Elle est réglée par
l'art. 83 de la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers
(LEtr, RS 142.20).
6.2 Pour les motifs exposés ci-dessus, le recourant n'a pas rendu
vraisemblable que son retour dans son pays d'origine l'exposerait à un
risque de traitement contraire à l'art. 5 LAsi ou aux engagements
internationaux contractés par la Suisse (cf. à ce propos : JICRA 1996
n° 18 consid. 14b let. ee p. 186 s. et les références citées). L'exécution
du renvoi est donc licite au sens de l'art. 83 al. 3 LEtr.
6.3 Elle est également raisonnablement exigible (art. 83 al. 4 LEtr)
non seulement vu l’absence de violence généralisée au Nigéria mais
également eu égard à la situation personnelle de celui-ci. En effet, le
recourant est (informations sur la situation personnelle du recourant)
et il n'a pas allégué de problèmes de santé actuels particuliers.
6.4 L’exécution du renvoi est enfin possible (art. 83 al. 2 LEtr) et le
recourant tenu de collaborer à l’obtention de documents de voyage lui
permettant de quitter la Suisse (art. 8 al. 4 LAsi).
6.5 C’est donc également à bon droit que l'ODM a prononcé le renvoi
du recourant et l’exécution de cette mesure.
7.
Le recours s'avérant manifestement infondé, il est rejeté dans une pro-
cédure à juge unique, avec l'approbation d'un second juge (art. 111 let.
e LAsi). Le présent arrêt n'est motivé que sommairement (art. 111a
LAsi).
8.
Au vu de l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de pro-
cédure, par Fr. 600.-, à la charge du recourant, conformément aux
art. 63 al. 1 PA et 2 et 3 let. b du règlement du 21 février 2008 concer-
nant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif
fédéral (FITAF, RS 173.320.2).
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 600.-, sont mis à la charge
du recourant. Ce montant doit être versé sur le compte du Tribunal
dans les 30 jours dès l'expédition du présent arrêt.
3.
Le présent arrêt est adressé :
- au recourant (par courrier recommandé ; annexe : un bulletin de
versement)
- à l'ODM, Division séjour, avec le dossier N (...) (en copie)
- au canton de (...) (en copie)
La juge unique : Le greffier :
Emilia Antonioni Olivier Bleicker
Expédition :
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