C-6454/2011 - Abteilung III - Annulation de la naturalisation facilitée - Annulation de la naturalisation facilitée
Karar Dilini Çevir:
C-6454/2011 - Abteilung III - Annulation de la naturalisation facilitée - Annulation de la naturalisation facilitée
B u n d e s v e rw a l t u ng s g e r i ch t
T r i b u n a l ad m i n i s t r a t i f f éd é r a l
T r i b u n a l e am m in i s t r a t i vo f e d e r a l e
T r i b u n a l ad m i n i s t r a t i v fe d e r a l








Cour III
C-6454/2011


A r r ê t d u 2 2 m a r s 2 0 1 3
Composition

Blaise Vuille (président du collège),
Elena Avenati-Carpani, Ruth Beutler, juges,
Fabien Cugni, greffier.



Parties

A._______,
représentée par Maître Minh Son Nguyen, avocat,
recourante,



contre


Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.

Objet

Annulation de la naturalisation facilitée.


C-6454/2011
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Faits :
A.
B._______, né le 21 mars 1964, originaire du canton du Valais, et
A._______, née le 7 février 1976, d'origine ukrainienne, se sont mariés
civilement le 9 juillet 2002 à Kiev (Ukraine); aucun enfant commun n'est
issu de cette union.

Le 14 septembre 2002, la prénommée a rejoint son époux à Lutry (VD) et
a été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour dans le canton de
Vaud.
B.
Le 4 septembre 2007, A._______ a introduit dans le canton du Valais une
demande de naturalisation facilitée basée sur ce mariage.

Dans le cadre de l'instruction de cette requête, la requérante et son
époux ont contresigné, le 2 mai 2008, une déclaration écrite aux termes
de laquelle ils confirmaient vivre en communauté conjugale effective et
stable, à la même adresse, et n'avoir aucune intention de se séparer ou
de divorcer. L'attention des époux a en outre été attirée sur le fait que la
naturalisation facilitée ne pouvait être octroyée lorsque, avant ou pendant
la procédure de naturalisation, l'un des conjoints demandait le divorce ou
la séparation ou que la communauté conjugale effective n'existait plus. Si
cet état de fait était dissimulé, la naturalisation facilitée pouvait
ultérieurement être annulée, conformément au droit en vigueur.
C.
Par décision du 27 juin 2008, l'ODM a accordé la naturalisation facilitée à
A._______, en vertu de l'art. 27 de la loi fédérale sur l'acquisition et la
perte de la nationalité suisse du 29 septembre 1952 (LN, RS 141.0), lui
conférant par là-même les droits de cité cantonal et communal de son
époux.
D.
Par courrier du 27 décembre 2010, la Direction de l'état civil du canton de
Vaud s'est adressé au Service valaisan de l'état civil et des étrangers
pour lui signaler, d'une part, l'existence d'une action en contestation de
paternité du fils d'A._______, C._______, né le 9 mars 2010 à Morges
(VD), et, d'autre part, le divorce des époux intervenu le 26 avril 2010.
E.
Le 11 janvier 2011, l'ODM a annoncé à A._______ qu'il envisageait
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d'examiner s'il y avait lieu d'ouvrir, conformément à l'art. 41 LN, une
procédure visant à l'annulation de la naturalisation facilitée octroyée le 27
juin 2008, compte tenu des faits relatés par les autorités cantonales
vaudoises. A cette occasion, l'office fédéral a invité l'intéressée à se
déterminer dans le cadre du droit d'être entendu.

C'est B._______ le 10 février 2011 qui s'est déterminé à ce sujet, étant
donné que son ex-épouse se trouvait alors à l'étranger et qu'il ne lui était
donc pas possible de répondre personnellement. Le prénommé a
notamment exposé qu'il avait connu A._______ en l'an 2000, que les
intéressés s'étaient mariés en 2002 et qu'ils avaient mené une vie
commune pendant neuf années, ayant partagé "tous les bons et mauvais
moments" qu'un couple pouvait traverser. Par ailleurs, il a insisté sur le
fait que le mariage contracté en 2002 était un mariage d'amour et non
"une recherche de passeport suisse".
F.
A la demande de l'ODM, le Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois a
transmis le 24 mai 2011, pour consultation, les dossiers de divorce et de
contestation de paternité concernant les époux A._______.

Par ailleurs, sur réquisition de l'ODM, l'autorité cantonale compétente a
procédé le 11 juillet 2011 à l'audition rogatoire de B._______. A cette
occasion, le prénommé a déclaré, entre autres, qu'il avait fait la
connaissance de sa future épouse le 8 mars 2011 (recte:
vraisemblablement 2001) à l'opéra de Kiev lors d'un voyage en Ukraine,
en précisant que sa compagne était alors en charge des relations
publiques pour cet opéra. En outre, il a exposé qu'ils avaient "tout de
suite sympathisé" et que c'était lui qui avait en premier pris l'initiative du
mariage. Par ailleurs, il a contesté avoir vécu séparé de son épouse "à
tout le moins depuis octobre 2008", comme cela ressortait de l'audience
du 31 août 2010 relative à l'action en contestation de filiation qu'il avait
intentée contre son ex-épouse et le fils de cette dernière. A ce propos,
B._______ a exposé qu'il avait trouvé un emploi à Zurich le 15 mai 2008,
qu'il avait vécu en cette ville pour des raisons professionnelles, qu'il avait
de moins en moins passé les week-ends au foyer conjugal à Lutry, qu'il
avait finalement rencontré une autre personne (mariée), à Zurich, et qu'il
avait été amené à tromper sa femme à partir du mois d'octobre 2008, et
cela jusqu'au 31 mars 2010. Il a ajouté que la question d'une séparation
ou d'un éventuel divorce avait été évoquée par le couple au début de
l'année 2009, soit au moment où A._______ avait également rencontré
un partenaire. Interrogé au sujet d'une éventuelle descendance
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commune, B._______ a indiqué que les époux avaient, chacun de leur
côté, consulté des médecins aux fins de procéder à différents tests de
fertilité, mais qu'aucun enfant n'était finalement né de leur union, malgré
les relations sexuelles fréquentes et non protégées. De plus, il a affirmé
que les époux avaient gardé les mêmes activités communes (shopping,
voyages, week-ends au bord du lac, etc.) entre le 27 juin 2008 (octroi de
la naturalisation facilitée) et le 1er octobre 2008 (séparation du couple). Il
a en outre assuré que la communauté conjugale était effectivement stable
au 27 juin 2008. Enfin, interrogé sur l'existence d'un événement
particulier qui serait intervenu juste après cette date, B._______ a
répondu que la "rencontre mutuelle d'autres partenaires" et le fait d'avoir
vécu séparément à Zurich et à Lutry étaient à l'origine de la rupture
irrémédiable de leur union conjugale.
G.
Le 15 juillet 2011, l'ODM a transmis à A._______ une copie du procès-
verbal de l'audition de son ex-époux, en lui fixant un délai pour lui
permettre de faire part de ses éventuelles remarques et de verser tout
document probant à ce sujet.

Dans son écrit du 5 septembre 2011, la prénommée a confirmé
l'exactitude des propos tenus par B._______. De plus, elle a exprimé son
grand attachement à la Suisse et son désir de pouvoir élever et éduquer
son fils dans ce pays. Sur un autre plan, elle a fait savoir qu'elle n'était
plus en possession de son passeport ukrainien et qu'il n'était pas possible
d'avoir une double nationalité en Ukraine.
H.
Le 28 octobre 2011, l'autorité compétente du canton du Valais a donné
son assentiment à l'annulation de la nationalité suisse conférée à
A._______.
I.
Par décision du 3 novembre 2011, l'ODM a prononcé ladite annulation. Il
a relevé principalement l'enchaînement logique et chronologique des
événements démontrant le souhait d'A._______ de se procurer une
possibilité de séjour en Suisse, respectivement d'y obtenir rapidement la
nationalité afin de pouvoir, par la suite, y poursuivre son parcours
indépendamment du mariage dont elle s'était prévalue lors de sa requête
de naturalisation. A l'appui de cette argumentation, l'autorité de première
instance a mis en exergue le dépôt prématuré de la demande de
naturalisation facilitée de l'intéressée, la séparation de fait du couple
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intervenue moins de deux mois après l'entrée en force de la naturalisation
facilitée et les relations extraconjugales entretenues par A._______ avec
un citoyen américain. Sur ce dernier point, dite autorité a retenu que
l'enfant issu de ces relations avait été le sujet d'une contestation de
paternité de la part de B._______ moins de trois jours après l'entrée en
force du jugement de divorce ayant dissous le mariage du couple. L'ODM
a également relevé que la séparation des époux était intervenue en
l'absence de tout événement extraordinaire apte à entraîner
"subjectivement" une rupture rapide. Cela étant, il a conclu que le
mariage d'A._______ n'était pas constitutif d'une communauté conjugale
effective et stable au moment de la déclaration du 2 mai 2008 ou du
prononcé de la naturalisation facilitée, telle qu'exigée par la loi et définie
par la jurisprudence, de sorte que les conditions d'une annulation de la
naturalisation facilitée requises par l'art. 41 LN étaient remplies. Sur un
autre plan, l'ODM a considéré que le risque d'apatridie allégué par
A._______ ne constituait pas un obstacle à l'annulation de sa
naturalisation, dès lors que celle-ci avait été obtenue frauduleusement.
Enfin, il a estimé qu'il n'y avait pas de raison de renoncer à étendre dite
annulation à l'enfant de l'intéressée, puisque cet enfant pouvait acquérir
la nationalité américaine en vertu de la législation de ce pays.
J.
Par acte daté du 24 novembre 2011, complété par son conseil le 9
décembre 2011, A._______ a recouru contre cette décision devant le
Tribunal administratif fédéral (ci-après: le Tribunal), en concluant à son
annulation. A l'appui de son pourvoi, elle a contesté les motifs tirés de
l'enchaînement logique et chronologique des événements mis en avant
par l'ODM dans la décision attaquée, estimant que les motifs retenus
relevaient d'une appréciation erronée des éléments ressortant du dossier.
En premier lieu, elle a insisté sur le fait que B._______ avait élu un
domicile séparé à Zurich, le 15 mai 2008, pour des raisons
professionnelles. Elle a estimé qu'il n'y avait eu, sur ce point, aucune
dissimulation des faits essentiels puisque la déclaration sur l'union
conjugale avait été signée le 2 mai 2008, soit avant le début de l'activité
de son ex-mari en cette ville. De plus, la recourante a fait valoir que
B._______ avait relevé lors de son audition que les intéressés, avant leur
séparation en octobre 2008, époque à laquelle il avait "commencé à
fréquenter une autre femme" (mariée), avaient encore des activités
"caractéristiques d'une vie de couple", si bien que l'on ne pouvait pas
considérer que la vie commune avait pris fin avant octobre 2008. En
deuxième lieu, elle a observé que la relation extraconjugale de
B._______ en octobre 2008 constituait un événement extraordinaire au
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sens de la jurisprudence, puisqu'il s'agissait d'une relation "relativement
éphémère" ayant pris fin le 31 mars 2010. Par ailleurs, elle a affirmé que
sa relation avec un citoyen américain relevait du même ordre, ce qui était
démontré par la conception de leur enfant C._______, en été 2009, et le
départ précipité de Suisse du père au mois de février 2010, soit avant la
naissance de cet enfant le 9 mars 2010. En troisième lieu, A._______ a
soutenu que les éléments ayant conduit au divorce du couple se situaient
tous à partir d'octobre 2008, en ajoutant que les relations extraconjugales
respectives étaient les véritables facteurs en "causalité directe" avec la
rupture de l'union conjugale. Sur ce point, elle a observé que l'autorité
intimée n'avait fourni aucun élément concret permettant de prouver, ou du
moins rendre vraisemblable, que les "événements causaux" de la
dissolution de l'union conjugale existaient déjà au moment où elle avait
engagé sa procédure de naturalisation.
K.
Appelé à se prononcer sur le recours, l'ODM en a proposé le rejet par
préavis du 25 janvier 2012. Cette prise de position a été communiquée à
la recourante pour droit de réplique, par ordonnance du Tribunal du 30
janvier 2012.

A._______ a présenté ses déterminations le 10 mai 2012 en y joignant
diverses pièces, dont plusieurs photographies censées "très clairement"
démontrer l'existence d'une vie de couple jusqu'à la rencontre de
B._______ avec une autre femme vivant à Zurich. Par ailleurs, elle a fait
valoir que le prénommé gardait "un excellent contact" avec elle et l'enfant
C._______. En outre, elle a requis la fixation d'une audience devant le
Tribunal pour entendre notamment son ex-époux. Enfin, elle a souligné
que l'annulation de la naturalisation facilitée n'était point "impérative" dans
le cas d'espèce et qu'un telle décision irait à l'encontre de l'intérêt
supérieur de l'enfant, au sens de l'art. 3 de la Convention du 20
novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE, RS 0.107), au vu
"des liens très forts" unissant B._______ et l'enfant prénommé.

Le 22 mai 2012, sur réquisition du Tribunal, l'autorité inférieure a présenté
ses remarques au sujet de ladite réplique. Cette réponse a été portée à la
connaissance de la recourante le 30 mai 2012 qui, par écritures du 13
juin 2012, a fait part de ses observations.

Par pli du 22 juin 2012, A._______ a transmis au Tribunal un tirage de
trois photos mettant, selon elle, en évidence la date de leur prise de vue.
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Page 7
L.
Les divers autres arguments invoqués de part et d'autre dans le cadre de
la procédure de recours seront examinés, si nécessaire, dans les
considérants en droit ci-après.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le
Tribunal, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les
décisions au sens de l'art. 5 PA prises par les autorités mentionnées à
l'art. 33 LTAF.
1.2 En particulier, les recours contre les décisions de l'ODM en matière
d'annulation de la naturalisation facilitée peuvent être déférées au
Tribunal de céans qui statue comme autorité précédant le Tribunal
fédéral (cf. art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. b a contrario
de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]).
1.3 A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant
le Tribunal est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF).
1.4 A._______ a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Son
recours, présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, est
recevable (cf. art. 50 et art. 52 PA).
2.
2.1 La recourante peut invoquer devant le Tribunal la violation du droit
fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la
constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que
l'inopportunité de la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité
cantonale a statué comme autorité de recours (cf. art. 49 PA). Il en
découle que le Tribunal n'a pas seulement à déterminer si la décision
de l'administration respecte les règles de droit, mais également si elle
constitue une solution adéquate eu égard aux faits (cf. ANDRÉ
MOSER/MICHAEL BEUSCH/LORENZ KNEUBÜHLER, Prozessieren vor dem
Bundesverwaltungsgericht, Helbing Lichtenhahn Verlag, Bâle 2008, ad
ch. 2.149ss).
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Page 8
2.2 Selon la maxime d'office régissant la présente procédure (cf. art.
62 al. 4 PA en relation avec l'art. 12 de la même loi), le Tribunal
applique le droit d'office. Tenu de rechercher les règles de droit
applicables, il peut s'écarter aussi bien des arguments des parties que
des considérants juridiques de la décision querellée. Il en résulte que
le Tribunal, pour autant qu'il reste dans le cadre de l'objet du litige,
peut maintenir une décision en la fondant sur d'autres éléments de fait
que ceux retenus par l'autorité inférieure (cf. sur ces questions,
notamment PIERRE MOOR, Droit administratif, Berne 2002, vol. II, p.
264s., ch. 2.2.6.5; ATF 130 III 707 consid. 3.1).
3.
3.1 En vertu de l'art. 27 al. 1 LN, un étranger peut, ensuite de son
mariage avec un ressortissant suisse, former une demande de
naturalisation facilitée s'il a résidé en Suisse pendant cinq ans en tout
(let. a), s'il y réside depuis une année (let. b) et s'i l vit depuis trois ans
en communauté conjugale avec un ressortissant suisse (let. c).
3.2 La notion de communauté conjugale dont il est question dans la loi
sur la nationalité, en particulier à l'art. 27 al. 1 let. c et l'art. 28 al. 1 let.
a LN, présuppose non seulement l'existence formelle d'un mariage - à
savoir d'une union conjugale au sens de l'art. 159 al. 1 du Code civil
suisse du 10 décembre 1907 (CC, RS 210) -, mais implique, de
surcroît, une communauté de fait entre les époux, respectivement une
communauté de vie effective, fondée sur la volonté réciproque des
époux de maintenir cette union (cf. ATF 135 II 161 consid. 2 et jurispr.
cit.).

Une communauté conjugale au sens de l'art. 27 al. 1 let. c et de l'art.
28 al. 1 let. a LN suppose donc l'existence, au moment de la décision
de naturalisation facilitée, d'une volonté matrimoniale intacte et
orientée vers l'avenir (« ein auf die Zukunft gerichteter Ehewille »),
autrement dit la ferme intention des époux de poursuivre la
communauté conjugale au-delà de la décision de naturalisation
facilitée. Il y a lieu de mettre en doute l'existence d'une telle volonté
lorsque le mariage est dissous peu après l'obtention de la
naturalisation facilitée par le conjoint étranger. Dans ces
circonstances, il y a lieu de présumer que la communauté conjugale
n'était plus étroite et effective durant la procédure de naturalisation
facilitée, la volonté réciproque des époux de poursuivre leur vie
commune n'existant plus alors (cf. ATF 135 II précité, ibidem).
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Page 9
3.3 La communauté conjugale telle que définie ci-dessus doit non
seulement exister au moment du dépôt de la demande, mais doit
subsister pendant toute la procédure jusqu'au prononcé de la décision
sur la requête de naturalisation facilitée (cf. ATF 135 II précité consid.
2 et jurispr. cit.; arrêt du Tribunal fédéral 1C_193/2010 du 4 novembre
2010 consid. 2.2). Il sied de relever que le législateur fédéral, lorsqu'il
a créé l'institution de la naturalisation facilitée en faveur du conjoint
étranger d'un ressortissant suisse, avait en vue la conception du
mariage telle que définie par les dispositions du Code civil sur le droit
du mariage, à savoir une union contractée par amour en vue de la
constitution d'une communauté de vie étroite (de toit, de table et de lit)
au sein de laquelle les conjoints sont prêts à s'assurer mutuellement
fidélité et assistance, et qui est envisagée comme durable, à savoir
comme une communauté de destin (cf. art. 159 al. 2 et al. 3 CC; ATF
124 III 52 consid. 2a/aa, 118 II 235 consid. 3b), voire dans la
perspective de la création d'une famille (cf. art. 159 al. 2 CC in fine).

Malgré l'évolution des mœurs et des mentalités, seule cette conception
du mariage, communément admise et jugée digne de protection par le
législateur fédéral, est susceptible de justifier - aux conditions prévues
aux art. 27 et 28 LN - l'octroi de la naturalisation facilitée au conjoint
étranger d'un ressortissant helvétique. En facilitant la naturalisation du
conjoint étranger d'un ressortissant suisse, le législateur fédéral
entendait favoriser l'unité de la nationalité dans la perspective d'une
vie commune se prolongeant au-delà de la décision de naturalisation
(cf. ATF 135 II précité, ibidem). L'institution de la naturalisation facilitée
repose en effet sur l'idée que le conjoint étranger d'un citoyen
helvétique (à la condition naturellement qu'il forme avec ce dernier une
communauté conjugale solide telle que définie ci-dessus)
s'accoutumera plus rapidement au mode de vie et aux usages suisses
qu'un étranger n'ayant pas un conjoint suisse, qui demeure, lui, soumis
aux dispositions régissant la naturalisation ordinaire (cf. Message du
Conseil fédéral relatif à la modification de la loi sur la nationalité du 26
août 1987, Feuille fédérale [FF] 1987 III 300ss, ad art. 26 et 27 du
projet; voir aussi ATF 130 II 482 consid. 2 et 128 II 97 consid. 3a).

4.
4.1 Conformément à l'art. 41 al. 1 LN, dans sa teneur jusqu'au 1er mars
2011, l'ODM peut, avec l'assentiment de l'autorité du canton d'origine,
annuler dans les cinq ans une naturalisation facilitée obtenue par des
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déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels et
qui n'aurait pas été accordée si ces faits avaient été connus (sur se
point, cf. Message du Conseil fédéral relatif à un projet de loi sur
l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 9 août 1951 [FF
1951 II 700/701, ad art. 39 du projet]).

L'annulation de la naturalisation présuppose donc que celle-ci ait été
obtenue frauduleusement, c'est-à-dire par un comportement déloyal et
trompeur. A cet égard, il n'est pas nécessaire qu'il y ait eu fraude au
sens du droit pénal. Il faut néanmoins que l'intéressé ait consciemment
donné de fausses indications à l'autorité, respectivement qu'il ait laissé
faussement croire à l'autorité qu'il se trouvait dans la situation prévue
par les art. 27 al. 1 let. c ou 28 al. 1 let. a LN, violant ainsi le devoir
d'information auquel il est appelé à se conformer en vertu de cette
disposition (cf. ATF 135 II précité, ibidem; voir également arrêt du
Tribunal fédéral 1C_228/2011 du 6 décembre 2011 consid. 2.1.1 et
jurispr. cit.). Lorsque le requérant déclare former une union stable avec
son conjoint, alors qu'il envisage de divorcer ultérieurement, une fois
obtenue la naturalisation facilitée, il n'a pas la volonté de maintenir une
telle communauté de vie. Sa déclaration doit donc être qualifiée de
mensongère. Peu importe, à cet égard, que son mariage se soit
déroulé de manière harmonieuse (cf. arrêt du Tribunal fédéral
1C_387/2010 du 6 décembre 2010 consid. 2.1.1 et jurispr. cit.).
4.2
4.2.1 La procédure administrative fédérale est régie par le principe de
la libre appréciation des preuves (art. 40 de la loi fédérale du 4
décembre 1947 de procédure civile fédérale [PCF, RS 273], applicable
par renvoi de l'art. 19 PA). Ce principe vaut également devant le
Tribunal (art. 37 LTAF). L'appréciation des preuves est libre dans ce
sens qu'elle n'obéit pas à des règles de preuve légales prescrivant à
quelles conditions l'autorité devrait admettre que la preuve a abouti et
quelle valeur probante elle devrait reconnaître aux différents moyens
de preuve les uns par rapport aux autres. Lorsque la décision
intervient - comme en l'espèce - au détriment de l'administré,
l'administration supporte le fardeau de la preuve. Si elle envisage
d'annuler la naturalisation facilitée, elle doit rechercher si le conjoint
naturalisé a menti lorsqu'il a déclaré former une union stable avec son
époux suisse; comme il s'agit-là d'un fait psychique en relation avec
des faits relevant de la sphère intime, qui sont souvent inconnus de
l'administration et difficiles à prouver, il apparaît légitime que l'autor ité
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Page 11
s'appuie sur une présomption. Partant, si l'enchaînement rapide des
événements fonde la présomption de fait que la naturalisation a été
obtenue frauduleusement, il incombe alors à l'administré, en raison,
non seulement de son devoir de collaborer à l'établissement des faits
(art. 13 al. 1 PA; cf. à ce sujet notamment ATF 135 précité, consid. 3),
mais encore de son propre intérêt, de renverser cette présomption (cf.
ATF 135 précité, ibid.).
4.2.2 S'agissant d'une présomption de fait, qui ressortit à l'appréciation
des preuves et ne modifie pas le fardeau de la preuve (ATF 135
précité, ibid., et réf. cit.), l'administré n'a pas besoin, pour la renverser,
de rapporter la preuve contraire du fait présumé, à savoir faire acquérir
à l'autorité la certitude qu'il n'a pas menti; il suffit qu'il parvienne à faire
admettre l'existence d'une possibilité raisonnable qu'il n'a pas menti en
déclarant former une communauté stable avec son conjoint. Il peut le
faire en rendant vraisemblable, soit la survenance d'un événement
extraordinaire susceptible d'expliquer une détérioration rapide du lien
conjugal, soit l'absence de conscience de la gravité de ses problèmes
de couple au moment de la signature de la déclaration commune (ATF
135 précité, ibid.; voir également arrêts du Tribunal fédéral
1C_158/2011 du 26 août 2011, consid. 4.2.2, et 1C_264/2011 du 23
août 2011, consid. 3.1.2, ainsi que réf. cit.).

En l'occurrence, A._______ soutient que l'autorité inférieure n'a fourni
aucun élément concret permettant de prouver, ou du moins de rendre
vraisemblable que les "événements causaux" de la dissolution de
l'union conjugale existaient déjà au moment où elle a engagé sa
procédure de naturalisation (cf. mémoire de recours, p. 5). Sur ce
point, il est important de préciser que le moment décisif au sens de la
jurisprudence précitée n'est pas celui de l'introduction de ladite
procédure auprès de l'autorité compétente, mais bien celui de la
signature de la déclaration sur l'union conjugale ou de l'octroi de la
naturalisation facilitée.
5.
A titre préliminaire, le Tribunal constate que les conditions formelles de
l'annulation de la naturalisation facilitée prévues par l'art. 41 LN sont
réalisées dans le cas particulier. En effet, la naturalisation facilitée
accordée le 27 juin 2008 à A._______ a été annulée par l'autorité
inférieure en date du 3 novembre 2011, soit avant l'échéance du délai
péremptoire prévu par la disposition légale précitée, en vigueur à cette
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Page 12
époque (RO 2011 348), avec l'assentiment de l'autorité compétente du
canton d'origine (Valais).
6.
Il convient d'examiner si les circonstances d'espèce répondent aux
conditions matérielles de l'annulation de la naturalisation facilitée
résultant du texte de la loi, de la volonté du législateur et de la
jurisprudence développée en la matière.
6.1 Dans le cas particulier, l'autorité inférieure a principalement retenu
dans la décision querellée l'enchaînement logique et chronologique entre
le dépôt prématuré de la demande de naturalisation facilitée d'A._______,
la séparation de fait du couple intervenue moins de deux mois après
l'entrée en force de cette naturalisation, les relations extraconjugales
entretenues par la prénommée avec un citoyen américain, l'enfant issu de
ces relations et la contestation en paternité de cet enfant de la part de
son ex-époux, procédure qui a été introduite moins de trois jours après
l'entrée en force du jugement de divorce ayant dissous le mariage de
l'intéressée.

L'examen des faits pertinents de la cause, ainsi que leur déroulement
chronologique relativement rapide depuis le dépôt de la demande de
naturalisation facilitée, amènent le Tribunal à une conclusion identique.

6.2 Ainsi, il ressort du dossier qu'A._______ a contracté mariage le 9
juillet 2002 à Kiev. Le 14 septembre 2002, elle a rejoint son mari à Lutry,
après avoir été mise au bénéfice d'une autorisation de séjour dans le
canton de Vaud, le 13 septembre 2002, au titre du regroupement familial.
Le 4 septembre 2007, soit dix jours avant le délai légal de l'art. 27 al. 1
let. a LN, elle a introduit auprès de l'autorité compétente une requête
visant à l'obtention de la naturalisation facilitée. Le 2 mai 2008, elle a
cosigné avec son époux la déclaration relative à la stabilité de leur union.
En date du 27 juin 2008, l'ODM a conféré la nationalité suisse à
A._______. Le mari de l'intéressée, B._______, après avoir élu un
domicile séparé à Zurich le 13 (ou le 15) mai 2008 pour des raisons
professionnelles, a commencé à fréquenter une autre femme résidant en
cette ville. La date à laquelle l'intéressé a réellement fait la connaissance
de cette personne et a débuté cette relation ne ressort pas clairement du
dossier, toutefois il admet avoir commencé à tromper son épouse avec
cette femme dès octobre 2008; il est donc vraisemblable que la rencontre
ait eu lieu déjà quelques semaines, voire quelques mois auparavant. Par
requête commune déposée le 19 octobre 2009 auprès du Tribunal (civil)
C-6454/2011
Page 13
d'arrondissement de l'Est vaudois, les époux A._______ ont tous deux
conclu au divorce et requis la ratification de la convention sur les effets
accessoires du divorce signée les 5 et 9 octobre 2009. Ledit Tribunal civil
a prononcé le divorce des intéressés par jugement du 14 avril 2010,
devenu définitif et exécutoire le 26 avril 2010. Enfin, le 29 avril 2010,
B._______ a déposé auprès de ce même Tribunal une demande en
contestation de paternité de l'enfant C._______, né le 9 mars 2010 à
Morges. Par jugement du 13 octobre 2010, le Tribunal civil a admis cette
requête en prononçant que l'enfant précité n'était pas le fils de B.

6.3 Le Tribunal de céans estime que ces divers éléments sont de nature
à fonder la présomption de fait selon laquelle la communauté conjugale
des époux A._______ n'était pas stable et orientée vers l'avenir, ni au
moment de la signature de la déclaration commune, ni au moment de
l'octroi de la naturalisation facilitée.
6.3.1 En particulier, le laps de temps entre cette déclaration (2 mai 2008),
l'octroi de la naturalisation facilitée (27 juin 2008), la séparation de fait du
couple (octobre 2008), le dépôt de la requête commune en divorce (19
octobre 2009) et la demande en contestation de paternité déposée par
B._______ (29 avril 2010), soit un peu moins de deux ans, tendent à
confirmer que les époux A._______ n'envisageaient pas de mener une
vie partagée lors de la signature de la déclaration concernant la
communauté conjugale, à tout le moins lors du prononcé de la
naturalisation facilitée. Il est en effet conforme à la jurisprudence en la
matière d'admettre une présomption de fait selon laquelle la communauté
conjugale n'était pas stable lors de l'octroi de la naturalisation si la
séparation des époux intervient quelques mois plus tard (cf. ATF 135 II
161 consid. 4.3, 130 II 482 consid. 3.3, arrêt du Tribunal fédéral
1C_399/2010 du 4 mars 2011 consid. 3.3). En l'occurrence, il ne s'est
écoulé environ que quatre mois entre l'octroi de la naturalisation facilitée
et la séparation de fait des époux A._______.
6.3.2 La recourante conteste l'argumentation de l'ODM tirée de
l'enchaînement logique et chronologique des événements. Elle fait en
particulier valoir qu'il convient de bien distinguer entre la constitution d'un
domicile séparé et "l'extinction" de la vie commune, en soulignant que
selon elle, cette dernière n'est intervenue qu'en octobre 2008 (soit après
la naturalisation), les époux ayant encore eu jusque-là des activités
caractéristiques d'une vie de couple.
C-6454/2011
Page 14
Le Tribunal ne saurait se rallier à cette manière de présenter les
événements. S'agissant de la nécessité de prendre des domiciles
séparés, le Tribunal relève que les époux en étaient conscients avant la
signature de la déclaration commune le 2 mai 2008 (cf. infra consid. 7.2)
et qu'ils ont en conséquence accepté le risque que leur union ne survive
pas à cette séparation, ce qu'il est bel et bien advenu à peine quatre mois
plus tard. Au demeurant, les activités caractéristiques de la vie de couple
auxquelles la recourante fait référence doivent être singulièrement
relativisées : il suffit de se référer aux déclarations de B._______ qui a
admis avoir "fréquenté deux femmes en même temps", nonobstant le fait
que les relations au sein du couple lui semblaient encore excellentes (cf.
ibidem). Il s'ensuit que cette argumentation n'est pas de nature à remettre
en cause la présomption de fait précitée.

7.
Cela étant, conformément à la jurisprudence précitée (cf. consid. 4.2.1 et
4.2.2), il incombe à la recourante de renverser la présomption de fait
évoquée plus haut en rendant vraisemblable, soit la survenance d'un
événement extraordinaire, susceptible d'expliquer une dégradation aussi
rapide du lien conjugal, soit l'absence de conscience de la gravité de ses
problèmes de couple au moment de la signature de la déclaration
commune.

7.1 A._______ invoque comme cause de la rupture du lien conjugal à la
fois la relation extraconjugale "éphémère" de son ex-époux, à partir du
mois d'octobre 2008, et la sienne à partir du début de l'année 2009, ces
deux événements constituant, selon elle, "les facteurs qui sont en
causalité directe" avec dite rupture. Elle considère, en particulier, que la
relation extraconjugale de B._______ constitue "un événement
extraordinaire" au sens de la jurisprudence. De plus, elle expose que la
séparation du couple résulte de la nécessité de prendre des domiciles
séparés pour des raisons professionnelles (cf. mémoire de recours, pp. 4
et 5). Sur ce dernier point, elle souligne que la déclaration sur l'union
conjugale a été signée le 2 mai 2008, soit avant que son mari ne débute
son activité professionnelle à Zurich, le 15 mai 2008, et insiste sur le fait
que la vie commune n'a pas pris fin avant le mois d'octobre 2008. Pour
appuyer ses dires, elle a produit dans le cadre de la procédure de recours
trois photographies censées prouver que les intéressés avaient encore
une vie de couple, "avec tout (que) cela comporte", jusqu'à ce que
B._______ ait rencontré une autre femme vivant à Zurich (cf. pli du 10
mai 2012).

C-6454/2011
Page 15
7.2 Après avoir examiné les pièces du dossier, le Tribunal estime que
cette argumentation ne peut être suivie pour plusieurs raisons.
7.2.1 Contrairement à ce que laisse accroire A._______ dans ses
écritures du 9 décembre 2011, les époux étaient déjà au courant au mois
d'avril 2008, soit avant la signature de la déclaration du 2 mai 2008, de
l'imminence de la prise de résidence séparée de B._______ à Zurich.
Pareille constatation ressort clairement de l'acte de recours daté du 24
novembre 2011 (p. 1, ch. 4), dans lequel la recourante indique que son
ex-mari, après avoir connu une période de chômage en 2008, a retrouvé
un travail "in extremis" au sein d'une banque à Zurich, son engagement
ayant eu lieu "fin avril" (2008). Ainsi, au moment de la signature de la
déclaration commune le 2 mai 2008, les signataires ne pouvaient ignorer
l'éventualité, voire la nécessité de devoir prendre des domiciles séparés
et, donc, les conséquences que cette manière de vivre pouvait impliquer
sur la stabilité de leur union.
Par ailleurs, B._______ soutient dans le cadre de la procédure de recours
avoir "fréquenté deux femmes en même temps" fin 2008 et début 2009
(cf. courrier du 4 mai 2012 produit le 10 mai 2012, ch. 8). Or, quand bien
même les époux A._______ auraient encore entretenu des rapports
épisodiques pendant cette période relativement brève (six mois), force
est cependant d'admettre qu'une telle conception de la vie en couple n'est
pas compatible avec l'existence d'une communauté conjugale, telle
qu'exigée en matière de naturalisation facilitée (cf. consid. 3.3 ci-dessus).
Dans ces circonstances, et contrairement à ce que laisse accroire la
recourante, tout indique que cette dernière et son ex-époux ont adopté en
pleine connaissance de cause un mode de vie qui s'apparente à celui
d'un couple séparé, et non à celui d'époux formant une communauté de
vie telle que seule admise et jugée digne de protection par le législateur
fédéral s'agissant de justifier – aux conditions prévues à l'art. 28 LN –
l'octroi de la naturalisation facilitée au conjoint étranger d'un ressortissant
helvétique.

7.2.2 Cela étant, le Tribunal relève que quatre mois seulement séparent
l'octroi de la naturalisation facilitée en faveur d'A._______ le 27 juin 2008
de la relation extraconjugale entamée par son époux au mois d'octobre
2008 (ou six mois si l'on prend comme base de départ la signature de la
déclaration commune le 2 mai 2008), de sorte que l'on ne saurait sans
autre retenir que cette prétendue cause de la rupture de l'union conjugale
se situait clairement après événements. En effet, il est permis de douter
que B._______ ait encore eu, en ces occurrences, la volonté intacte de
C-6454/2011
Page 16
maintenir une union conjugale stable et tournée vers l'avenir au sens de
la jurisprudence évoquée plus haut. En entamant une relation
extraconjugale dans les circonstances prédécrites, B._______ devait
avoir forcément conscience des conséquences directes que la
fréquentation d'une autre femme étaient susceptibles d'entraîner sur la
stabilité de l'union conjugale, en ce sens qu'il prenait délibérément le
risque de mettre en péril son mariage. Aussi peut-on déceler, à travers
pareil comportement, un indice sérieux que la communauté conjugale des
époux A._______ n'était déjà plus stable au moment de l'octroi de la
naturalisation facilitée (cf., dans ce sens, arrêts du Tribunal fédéral
1C_167/2010 du 21 juin 2010 consid. 4 et 1C_52/2009 du 4 août 2009
consid. 3.2). Il n'est pas vraisemblable en effet que la relation
extraconjugale entretenue par B._______ ait été de nature à provoquer, à
elle seule, la désunion du couple dans le laps de temps de temps d'à
peine quatre mois qui sépare la décision conférant la nationalité suisse à
son ex-épouse et la séparation effective du couple. En effet, il ne ressort
nullement du dossier que cette relation se soit apparentée à un subit
coup du destin auquel l'intéressé n'aurait pu échapper; il apparaît au
contraire bien plutôt que cette aventure extraconjugale se soit inscrite tout
naturellement dans le courant de l'existence.
7.2.3 Au vu de ce qui précède, il y a tout lieu d'en déduire que la liaison
de B._______ ne constituait pas le facteur prépondérant et décisif qui a
conduit à la désunion du couple, l'instabilité de l'union conjugale devant
être considérée comme latente déjà au moment de la signature de la
déclaration sur la vie commune le 2 mai 2008, ou à tout le moins lors de
l'octroi de la naturalisation facilitée en faveur de son épouse. Il ne
s'agissait donc pas d'un événement extraordinaire, qui serait survenu de
manière inattendue et subite, précisément quelques mois seulement
après l'obtention de la nationalité suisse. Il convient de relever, ce qui est
d'ailleurs symptomatique, l'absence de toute trace d'éventuels efforts
entrepris pour sauver l'union conjugale. Au contraire, les déclarations des
ex-époux laissent plutôt entrevoir une sorte d'acceptation consensuelle
de ce nouveau mode d'existence.

7.3 Ainsi, force est d'admettre que la recourante n'a pas été en mesure
de renverser ladite présomption en rendant vraisemblable la survenance
d'un événement extraordinaire de nature à expliquer une détérioration
rapide du lien conjugal, au sens indiqué plus haut (cf. ch. 4.2.2).
7.4 Les autres arguments mis en avant dans le cadre de la procédure de
recours, à savoir pour l'essentiel le fait que B._______ garde un excellent
C-6454/2011
Page 17
contact avec la recourante et qu'il entretient "des liens très forts" avec
l'enfant de cette dernière, enfant qui le considère comme son père (cf.
déterminations du 10 mai 2012, ch. 7 et 8), ne permettent pas d'affaiblir la
présomption que la naturalisation octroyée à la recourante a été obtenue
frauduleusement. Il en va de même des photographies produites à l'appui
des déterminations du 10 mai 2012, censées démontrer que ce couple
"avait vécu une existence parfaitement normale". En effet, ces allégués et
moyens de preuve ne changent rien au fait qu'il n'existait plus d'union
conjugale stable selon la loi et la jurisprudence, au moment de la
signature de la déclaration sur l'union conjugale ou de l'octroi de la
nationalité suisse.
8.
En conclusion, le Tribunal de céans est d'avis qu'il y a lieu de s'en tenir à
la présomption de fait, basée essentiellement sur les événements relatés
ci-dessus (cf. ch. 6.2 et 6.3), que la naturalisation facilitée a été obtenue
de façon frauduleuse. Partant, si tant est qu'A._______ et son époux
aient voulu fonder une communauté conjugale effective, au sens de l'art.
27 LN, l'autorité inférieure pouvait considérer, à bon droit, que cette
volonté n'existait plus lors de la signature de la déclaration commune ou,
a fortiori, au moment de l'octroi de la nationalité suisse.
9.
Dans le cadre de la procédure de recours, A._______ a requis son
audition personnelle, ainsi que celle de B._______ à titre de témoin (cf.
courriers des 13 avril et 13 juin 2012).
En l'occurrence, le Tribunal estime que les faits de la cause sont
suffisamment établis par les pièces figurant au dossier, de sorte qu'il ne
s'avère pas indispensable de donner suite à ladite requête. Quoi qu'en
pense la recourante, le Tribunal ne voit pas en effet ce que des
explications orales supplémentaires de la part de ces personnes
apporteraient dans la présente affaire, au vu des développements
antérieurs. A noter que B._______ a été entendu par la police cantonale
vaudoise sur les circonstances de son mariage avec A._______ et sur les
motifs de leur séparation. De plus, il appert que la prénommée a pu
présenter ses propres explications dans le premier mémoire de recours
qu'elle a déposé le 28 novembre 2011 en son propre nom devant
l'instance de recours (cf. acte daté du 24 novembre 2011). Quant à
B._______, il a également eu la possibilité d'exposer valablement son
point de vue dans le cadre de la procédure de recours (cf. écrit du 4 mai
2012 produit le 10 mai 2012). Au demeurant, le doit d'être entendu, dont
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Page 18
la garantie est expressément consacrée à l'art. 29 al. 2 de la Constitution
fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.; RS 101), ne
confère notamment pas aux parties le droit de s'exprimer verbalement
devant l'autorité appelée à prendre une décision (cf. notamment arrêt du
Tribunal fédéral 6B_145/2009 du 28 mai 2009 consid. 3.2). La partie ne
peut ainsi exiger d'être entendue oralement en procédure administrative
(cf. MOSER, BEUSCH, KNEUBÜHLER, op. cit., ad ch. 3.86). En outre,
l'audition de témoins n'étant prévue qu'à titre subsidiaire en procédure
administrative (cf. art. 14 al. 1 PA), il n'est procédé à l'audition personnelle
de tiers que si cela paraît indispensable à l'établissement des faits (cf.
ATF 122 II 464 consid. 4c). A cela s'ajoute que l'autorité est fondée à
mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont
permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non
arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore
proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier
son opinion (cf. ATF 131 I 153 consid. 3, 130 II 425 consid. 2.1). En
l'occurrence, les éléments essentiels sur lesquels le Tribunal a fondé son
appréciation ressortent du dossier et ne nécessitent donc aucun
complément d'instruction (sur cette problématique, cf. arrêt du Tribunal
fédéral 1C_135/2009 du 17 juillet 2009 consid. 3.4 et jurispr. cit., en
particulier ATF 130 II 169 consid. 2.3.3).
10.

10.1 A._______ laisse entendre que la décision attaquée aurait pour effet
de la rendre apatride, de même que son fils C._______ (cf. mémoire de
recours du 24 novembre 2011, p. 2). Selon la jurisprudence du Tribunal
fédéral, le risque que la recourante devienne apatride ne fait pas obstacle
à l'annulation de la naturalisation facilitée. Si celle-ci a été obtenue
frauduleusement, l'intéressée doit en effet supporter les conséquences
qui résultent pour elle de la perte de la nationalité suisse. Admettre qu'il
en aille autrement reviendrait à conférer aux apatrides potentiels une
protection absolue contre une éventuelle annulation de la naturalisation
facilitée, ce qui contreviendrait au principe de l'égalité de traitement (cf.
arrêt du Tribunal fédéral 1C_439/2008 du 6 novembre 2008 consid. 5 et
jurispr. cit.).
10.2 Sauf décision expresse, l'annulation fait également perdre la
nationalité suisse aux membres de la famille qui l'ont acquise en vertu de
la décision annulée (cf. art. 41 al. 3 LN). Il en va ainsi de l'enfant issu de
la relation extraconjugale de la recourante, C._______, né 9 mars 2010
(cf. jugement du Tribunal civil du 13 octobre 2010, ch. 2). A cet égard, le
C-6454/2011
Page 19
Tribunal observe qu'il n'apparaît pas, au vu de la législation ukrainienne
en vigueur (cf. loi sur la nationalité de l'Ukraine, dans sa version du 18
janvier 2001, in BERGMANN ALEXANDER / FERID MURAD / HEINRICH DIETER,
Internationales Ehe- und Kindschaftsrecht mit Staatsangehörigkeitsrecht,
Ukraine, p. 11ss), que l'enfant prénommé soit menacé d'apatridie, de
sorte qu'il ne se justifie pas en l'espèce de s'écarter de la norme prévue
par la disposition mentionnée.
10.3 La recourante fait encore valoir que l'annulation de la naturalisation
facilitée constitue "un acte gravissime" et qu'elle irait à l'encontre de
l'intérêt supérieur de l'enfant (art. 3 CDE), en raison "des liens très forts"
unissant B._______ et l'enfant C._______. Dans ce contexte, elle se
prévaut de la jurisprudence du Tribunal fédéral (ATF 135 II 161) selon
laquelle l'annulation de la naturalisation ne s'étend pas impérativement à
tous les membres de la famille naturalisés (cf. déterminations du 10 mai
2012, ch. 10). Sur ce point, le Tribunal relève que C._______ n'est âgé
que de trois ans et que son sort est donc encore intimement lié à celui de
sa mère. Contrairement à l'avis défendu par la recourante, il ne s'impose
nullement, in casu, d'examiner si les critères d'intégration fixés dans
ladite jurisprudence (comportement irréprochable, accomplissement du
service militaire, formation, activité professionnelle, utilisation du droit de
vote) s'opposent à l'annulation de nationalité suisse conférée à l'enfant
C._______. Force est donc d'admettre que la décision de l'ODM du 3
novembre 2011, en tant qu'elle étend l'annulation de la naturalisation
facilitée à l'enfant C.________, n'est ni contraire au sens et au but de la
loi sur la nationalité ni constitutif d'une violation du principe de la
proportionnalité. Au demeurant, il sied de noter que la disposition
conventionnelle invoquée par la recourante n'apporte aucune précision et
n'a, pour ce motif, pas de portée propre. Tout au plus, l'art. 3 CDE
rappelle-t-il que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération
primordiale pour toutes les décisions qui concernent les enfants, ce qui
correspond également au but de art. 307ss CC (cf. arrêt du Tribunal
fédéral 5A_858/2008 du 15 avril 2009 consid. 4.2 et réf. cit.).

11.
Il ressort de ce qui précède que, par sa décision du 3 novembre 2011,
l'ODM n'a ni violé le droit fédéral ni constaté des faits pertinents de
manière inexacte ou incomplète; en outre, cette décision n'est pas
inopportune (cf. art. 49 PA).

En conséquence, le recours doit être rejeté.

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Vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la
charge de la recourante (cf. art. 63 al. 1 PA en relation avec les art. 1 à 3
du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et
indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS
173.320.2]).

(dispositif page suivante)


C-6454/2011
Page 21
Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais de procédure, d'un montant de 1'000 francs, sont mis à la
charge de la recourante. Ce montant est compensé par l'avance versée
le 11 janvier 2012.
3.
Le présent arrêt est adressé :
– à la recourante (Acte judiciaire)
– à l'autorité inférieure, dossier en retour
– au Service de la population et des migrations du canton du Valais (en
copie), pour information et dossier cantonal en retour.

Le président du collège :

Le greffier :

Blaise Vuille Fabien Cugni

Indication des voies de droit :
Le présent arrêt peut être attaqué devant le Tribunal fédéral, 1000
Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les
trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 de la loi
fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]). Le
mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les
conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. L'arrêt
attaqué et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour
autant qu'ils soient en mains du recourant (art. 42 LTF).

Expédition :