C-4698/2008 - Abteilung III - Entrée - Refus d'autorisation d'entrée en Suisse
Karar Dilini Çevir:
C-4698/2008 - Abteilung III - Entrée - Refus d'autorisation d'entrée en Suisse
Cour III
C-4698/2008
{T 0/2}
A r r ê t d u 3 1 m a r s 2 0 0 9
Jean-Daniel Dubey (président du collège),
Andreas Trommer, Ruth Beutler, juges,
Jean-Luc Bettin, greffier.
A._______ et
B._______, agissant par sa mère A._______,
tous les deux représentés par Maître Mary Monnin-
Zwahlen, rue de la Plaine 38, case postale 546,
1401 Yverdon-les-Bains,
recourants,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Refus d'autorisation d'entrée en Suisse.
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
C-4698/2008
Faits :
A.
Le 10 mars 2008, A._______, ressortissante dominicaine, née le 29
juin 1962, a déposé auprès de l'Ambassade de Suisse à Saint-
Domingue, pour elle-même et pour son fils B._______, né le 14 mai
1997, une demande d'autorisation d'entrée en Suisse dans le but de
rendre visite à sa soeur, C._______, le mari de cette dernière,
D._______, les deux enfants du couple ainsi que les deux enfants de
C._______, fruits d'une précédente union. La requérante avait exprimé
le souhait de venir en Suisse durant 50 jours au cours des vacances
scolaires de B._______, lequel fréquente l'école Jean XXIII de Higüey,
en République dominicaine.
D._______ s'est engagé, dans des courriers datés respectivement des
28 février et 28 mai 2008, à assumer financièrement le séjour de sa
belle-soeur et de son neveu.
Après avoir refusé le visa sollicité, l'Ambassade de Suisse à Saint-
Domingue a transmis, le 11 mars 2008, le dossier à l'ODM afin que ce
dernier puisse statuer. Elle a précisé qu'à son avis, la sortie de Suisse
des intéressés n'était pas assurée, A._______ étant sans emploi et
vivant de la location d'une maison qu'elle avait achetée lorsqu'elle
travaillait en Suisse.
Le Service de la population du Canton de Vaud a rendu, en date du
3 juin 2008, un préavis favorable quant à la délivrance d'un visa aux
intéressés.
B.
Par décision du 10 juin 2008, l'ODM a rejeté la demande d'autorisation
d'entrée en Suisse déposée par A._______ en estimant notamment
que sa sortie de Suisse à l'échéance du visa ne pouvait être
considérée comme suffisamment garantie compte tenu de la situation
personnelle et professionnelle de l'intéressée et des conditions
socioéconomiques prévalant dans son pays d'origine. Par ailleurs,
l'autorité de première instance a estimé que A._______ n'avait pas, au
cours de la procédure, démontré posséder des attaches si étroites
avec son pays d'origine qu'elle doive impérativement retourner en
République dominicaine au terme de sa visite en Suisse. Finalement,
l'ODM a relevé que la requérante pourrait être tentée de prolonger son
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séjour en Suisse avec son enfant en raison de la situation familiale de
sa soeur.
C.
Par mémoire déposé le 15 juillet 2008, A._______ interjette recours à
l'encontre de la décision précitée, concluant principalement à ce
qu'une autorisation d'entrée de deux mois au maximum lui soit
accordée, ainsi qu'à son fils, subsidiairement que la décision querellée
soit annulée.
En substance, elle y relève tout d'abord que C._______ et D._______
avaient, à plusieurs reprises, effectué le voyage en République
dominicaine mais que ce long déplacement serait à l'avenir
notablement plus difficile et onéreux, le couple ayant à présent quatre
enfants à charge, le cadet devant naître tout prochainement.
A._______ rappelle qu'elle avait déjà effectué plusieurs déplacements
de courte durée en Suisse, entre 1991 et 1999, et qu'elle avait
toujours respecté la date d'échéance de son visa d'entrée.
De l'exposé de la situation personnelle et professionnelle de la
recourante, attestée par pièces, il ressort que cette dernière n'est au
bénéfice d'aucun contrat de travail et qu'elle vit grâce aux revenus de
sa fortune immobilière constituée d'une maison, d'une valeur de
RD$ 3'000'000.-, et d'une parcelle de terrain estimée à RD$ 900'000.-,
représentant ainsi, selon le cours de change actuel, une fortune d'un
peu plus de Fr. 131'000.-. Les revenus ainsi perçus s'établissent à
RD$ 26'000.- mensuellement, soit RD$ 15'000.- (ou Fr. 500.- environ)
de loyers, RD$ 8'000.- (ou Fr. 270.-) de pension pour l'entretien de son
fils et RD$ 3'000.- (Fr. 100.-) de revenus bancaires. En plus, les
extraits de comptes ouverts auprès de trois banques en République
dominicaine attestent d'un montant d'économies, partiellement
liquides, s'élevant à un équivalent d'environ Fr. 21'000.-. La recourante
insiste sur le fait qu'elle dispose d'une fortune et de ressources
financières notablement supérieures à la moyenne de la population
dominicaine – ses revenus seraient cinq fois supérieurs à ceux de ses
compatriotes – lui permettant en conséquence de vivre
confortablement en République dominicaine, si bien qu'elle n'éprouve
aucunement le besoin de venir en Europe pour gagner sa vie.
Concernant sa situation personnelle, A._______ expose, dans ses
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écritures, être célibataire et mère d'un enfant, né en 1997, lequel est
scolarisé, rendant par ailleurs le voyage possible uniquement durant
les vacances scolaires, la recourante refusant que ce dernier puisse
manquer une période scolaire.
D.
Appelée à se prononcer sur le recours, l'autorité intimée conclut, par
préavis du 20 août 2008, à son rejet. En substance, elle estime les
liens unissant la République dominicaine et la recourante ainsi que les
garanties fournies par D._______ insuffisants pour exclure que cette
dernière puisse décider de prolonger son séjour en Suisse. De plus,
l'autorité de première instance relève, concernant les séjours effectués
dans le passé par la recourante en Suisse, que la réalité des visas
d'entrée entre 1991 et 1998 n'est pas démontrée, que si des visas ont
bien été délivrés, ils l'ont été de la propre compétence de la
représentation suisse à Saint-Domingue sans que les circonstances
précises en soient connues. L'ODM précise enfin que des demandes
avaient été faites, en octobre 1997 et décembre 2000, et que toutes
deux tendaient à l'octroi d'une autorisation de séjour.
Invitée à se prononcer sur ce préavis, la recourante, par l'intermédiaire
de sa mandante, a, en date du 8 octobre 2008, réitéré les garanties et
motifs avancés depuis le début de la procédure, insistant sur le fait
qu'il était impensable qu'elle renonce à la scolarisation de son fils et
qu'elle prenne le risque d'une condamnation pénale en Suisse où, à
l'évidence, estime-t-elle, elle ne trouverait pas d'emploi ou du moins
pas d'emploi "correct". Elle précise finalement qu'il est hors de
question d'adopter un comportement pouvant amener à la famille de
sa soeur des ennuis.
E.
Dans sa duplique du 12 février 2009, l'ODM précise que le droit
applicable à l'objet de la présente cause avait changé le
12 décembre 2008 en raison de l'entrée de la Suisse dans l'Espace
Schengen sans toutefois que cela doive entraîner une modification de
la décision attaquée. L'ODM relève également que la naissance d'un
nouvel enfant au sein de la famille de C._______ et D._______ le
11 septembre 2008 n'est pas susceptible de modifier son appréciation.
Par courrier du 23 février 2009, la recourante a déposé ses ultimes
remarques par lesquelles elle s'emploie à exposer que toutes les
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conditions légales sont remplies pour permettre la délivrance de deux
visas.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du
17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le
Tribunal administratif fédéral (ci-après: le TAF ou le Tribunal), en vertu
de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de
l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure
administrative (PA, RS 172.021) prises par les autorités mentionnées
à l'art. 33 LTAF. En particulier, les décisions en matière de refus
d'autorisation d'entrée en Suisse prononcées par l'ODM (cf. art. 33 let.
d LTAF) sont susceptibles de recours au Tribunal qui statue
définitivement (cf. art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 1
de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]).
1.2 A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant
le TAF est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF).
1.3 A._______ et son fils B._______ agissant par l'intermédiaire de sa
mère A._______ ont qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA).
Présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, le recours est
recevable (cf. art. 50 et 52 PA).
2.
Le recourant peut invoquer devant le TAF la violation du droit fédéral, y
compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation
inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que l'inopportunité de
la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité cantonale a statué
comme autorité de recours (cf. art. 49 PA). Dans le cadre de la
procédure de recours, le TAF applique d'office le droit fédéral.
Conformément à l'art. 62 al. 4 PA, l'autorité de recours n'est pas liée
par les motifs invoqués à l'appui du recours. Aussi peut-elle admettre
ou rejeter le pourvoi pour d'autres motifs que ceux invoqués. Dans son
arrêt, elle prend en considération l'état de fait et de droit régnant au
moment où elle statue (cf. consid. 1.2 de l'arrêt du Tribunal fédéral
2A.451/2002 du 28 mars 2003, partiellement publié in ATF 129 II 215).
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3.
3.1 Dans la mesure où A._______ invoque un vice de procédure en
reprochant à l'autorité inférieure d'avoir violé son droit d'être entendue
(cf. mémoire de recours, p. 10) en rendant la décision querellée avant
que son conseil ait pu consulter le dossier fédéral, à savoir le dossier
de demandes de visas, le Tribunal examinera en priorité ce grief. En
effet, le droit d'être entendu est de nature formelle, de sorte que sa
violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée sans
qu'il soit nécessaire de vérifier si, au fond, la décision apparaît justifiée
ou non (cf. ATF 121 I 320 consid. 2a, 120 Ib 279 consid. 3b).
3.2 Le droit d'être entendu, dont la garantie se trouve inscrite à
l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 (Cst.,
RS 101), comprend le droit pour le justiciable de prendre
connaissance du dossier (cf. ATF 132 II 485 consid. 3, 126 I 7
consid. 2b), de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une
décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des
preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à des offres de
preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves
essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque
cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 124 II 132
consid. 2b et la jurisprudence citée). Le droit d'être entendu est
consacré, en procédure administrative fédérale, par les art. 26 à 28
(droit de consulter les pièces), les art. 29 à 33 (droit d'être entendu
sticto sensu) et l'art. 35 PA (droit d'obtenir une décision motivée).
L'art. 30 la. 1 PA prévoit en particulier que l'autorité entend les parties
avant de prendre une décision. C'est le droit pour le justiciable de
s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit
prise touchant sa situation juridique, soit le droit d'exposer ses
arguments de droit, de fait ou d'opportunité, de répondre aux
objections de l'autorité et de se déterminer sur les autres éléments du
dossier (cf. ATF 126 I 7 consid. 2b; ANDRÉ GRISEL, Traité de droit
administratif, Neuchâtel 1984, vol. I, p. 380 ss; FRITZ GYGI,
Bundesverwaltungsrechtspflege, Berne 1983, p. 69).
3.3 Toutefois, la violation du droit d'être entendu peut, à titre
exceptionnel, pour autant que ladite violation ne soit pas
particulièrement grave, être considérée comme guérie lorsque la
cognition de l'instance de recours n'est pas limitée par rapport à celle
de l'instance inférieure et qu'il n'en résulte aucun préjudice pour le
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recourant (ATF 129 I 129 consid. 2.2.3 p. 135 et la référence citée;
cf. BERNHARD WALDMANN/PHILIPPE WEISSENBERGER (Hrsg), VwVG
Praxiskommentar zum Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren,
Zurich 2009, ad art. 29 nos 106-127).
3.4 En l'espèce, il appert qu'après la transmission du préavis et du
dossier de l'autorité cantonale à l'ODM, le conseil de la recourante a
requis, par deux courriers datés respectivement des 5 et 10 juin 2008,
que lui soient transmis les documents contenus dans le dossier de
demandes de visas déposées à l'Ambassade de Suisse à Saint-
Domingue. Il convient de constater que l'autorité intimée n'a pas
donné suite auxdits courriers avant de rendre la décision du
10 juin 2008, objet de la présente procédure. En conséquence, c'est
ainsi à raison que la recourante se plaint d'une violation du droit d'être
entendu.
Toutefois, le Tribunal de céans constate que les documents requis ont
finalement été portés à la connaissance du conseil de la recourante,
que celui-ci a eu l'occasion, dans le cadre de la procédure de recours,
de commenter en détail lesdites pièces, commentaire qui a été versé
au dossier de la cause. L'autorité de céans, dont la cognition est
identique en fait et en droit à celle de l'ODM, a examiné ces pièces et
leur commentaire, pièces qui ont principalement trait à la situation
financière de la recourante. Le TAF a pris ces documents en
considération dans sa décision. En regard de ce qui précède, la
violation du droit d'être entendu doit être considéré comme guérie. Un
renvoi à l'autorité inférieure prolongerait en outre inutilement la
procédure et heurterait le principe d'économie de procédure.
Mal fondé, ce grief doit ainsi être rejeté.
4.
La législation suisse sur les étrangers ne garantit aucun droit ni quant
à l'entrée en Suisse, ni quant à l'octroi d'un visa. Comme tous les
autres Etats, la Suisse n'est en principe pas tenue d'autoriser l'entrée
de ressortissants étrangers sur son territoire. Sous réserve des
obligations découlant du droit international, il s'agit d'une décision
autonome (cf. Message du Conseil fédéral concernant la loi sur les
étrangers du 8 mars 2002, in FF 2002 3531; voir également
ATF 133 I 185 consid. 2.3).
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5.
Le 1er janvier 2008 sont entrées en vigueur la loi fédérale du
16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr, RS 142.20) et les
ordonnances d'exécution y relatives (notamment l'ordonnance du 24
octobre 2007 sur la procédure d'entrée et de visas [OPEV, RO 2007
5537]). Lors de la votation du 5 juin 2005, le peuple suisse a accepté
l'arrêté fédéral du 17 décembre 2004 portant approbation et mise en
œuvre des accords bilatéraux d'association à l'Espace Schengen et à
l'Espace Dublin (RS 362). Les accords d'association correspondants
(au nombre desquels figure l'Accord du 26 octobre 2004 entre la
Confédération suisse, l'Union européenne et la Communauté
européenne sur l'association de la Confédération suisse à la mise en
œuvre, à l'application et au développement de l'acquis de Schengen
[AAS, RS 0.360.268.1]) sont effectivement entrés en vigueur pour la
Suisse le 12 décembre 2008. Depuis cette dernière date, la Suisse est
tenue d'appliquer l'acquis repris de Schengen et de le transposer,
dans son droit national, notamment pour ce qui est des dispositions
sur la politique commune de délivrance des visas, telles que
contenues dans les divers actes juridiques de l'Union européenne. En
vue de la mise en oeuvre des accords d'association à Schengen, le
législateur a donc dû procéder à des adaptations correspondantes
dans la LEtr (cf. en particulier art. 2 al. 4 LEtr, selon lequel les
dispositions sur la procédure en matière de visa ainsi que sur l’entrée
en Suisse et la sortie de Suisse ne s’appliquent que dans la mesure
où les accords d’association à Schengen ne contiennent pas de
dispositions divergentes). En outre, la reprise de l'acquis de Schengen
a nécessité une révision complète de l'OPEV qui a été remplacée par
l'ordonnance du 22 octobre 2008 sur l'entrée et l'octroi de visas (OEV,
RS 142.204). Selon l'art. 57 OEV, le nouveau droit s'applique aux
procédures pendantes à la date de l'entrée en vigueur de l'OEV. Cela
signifie que la Suisse, en vertu de ses obligations de droit
international, est tenue, malgré la disposition transitoire de
l'art. 126 al. 1 LEtr, d'appliquer aux procédures pendantes au
12 décembre 2008 le nouveau droit (cf. sur la question de la
prééminence du droit international, ATF 131 II 352 consid. 1.3.1,
119 V 171 consid. 4, ainsi que jurisprudence et doctrine citées; RAINER
J. SCHWEIZER, Zur Einleitung: Das Bundesverwaltungsgericht im System
der öffentlich-rechtlichen Rechtspflege des Bundes, in: BERNHARD
EHRENZELLER/RAINER J. SCHWEIZER (Hrsg.), Le Tribunal administratif
fédéral: Statut et missions, St-Gall 2008, p. 24).
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6.
6.1 S'agissant des conditions d'entrée en Suisse pour un séjour
n'excédant pas trois mois, l'art. 2 al. 1 OEV renvoie au Règlement (CE)
n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006
établissant un code communautaire relatif au franchissement des
frontières par les personnes (code frontières Schengen [JO L 105 du
13 avril 2006 p. 1-32]). L'art. 5 par. 1 du code frontières Schengen
définit les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers.
Ceux-là doivent être en possession d'un document ou de documents
de voyage en cours de validité permettant le franchissement de la
frontière et - s'ils sont soumis à l'obligation du visa - être en
possession d'un visa en cours de validité (let. a et b). Ils doivent
justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des
moyens de subsistance suffisants (let. c). En outre, ils ne doivent pas
être signalés aux fins de non-admission dans le Système d'information
Schengen (SIS) et ne pas être considérés comme constituant une
menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou
les relations internationales de l'un des Etats membres (let. d et e).
6.2 Les conditions d'entrée prévues par le code frontières Schengen
correspondent, pour l'essentiel, à celles posées à l'art. 5 al. 1 let. a à d
LEtr. L'obligation faite à l'étranger de justifier l'objet et les conditions
du séjour envisagé, telle que contenue à l'art. 5 par. 1 let. c du code
frontières Schengen, n'est pas explicitement mentionnée à l'art. 5 al. 1
LEtr. L'art. 5 al. 2 LEtr exige en revanche de l'étranger qui prévoit un
séjour temporaire en Suisse d'apporter la garantie qu'il quittera la
Suisse. Cette condition, ancrée dans le droit national, ne constitue
toutefois pas une exigence supplémentaire et n'entre pas en
contradiction avec le code frontières Schengen. En effet, l'indication de
l'objet du séjour temporaire envisagé constitue de fait une déclaration
d'intention de quitter le pays une fois le but de ce séjour atteint.
Partant, en cas d'indications contradictoires ou invraisemblables sur
l'objet du séjour, il y aura lieu de conclure que le requérant n'est pas
disposé à quitter l'Espace Schengen à l'échéance du séjour projeté.
C'est dans ce sens également que vont les Instructions consulaires
communes du 22 décembre 2005 adressées aux représentations
diplomatiques et consulaires de carrière (ICC, JO 2005 C 326
p. 1-149). Les ICC exigent en particulier que soit évalué le risque
migratoire; il convient en ce sens d'examiner si le requérant cherche "à
pénétrer et à s'établir dans le territoire des Etats membres sous le
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couvert de visa pour tourisme, affaires, études, travail ou visite à des
parents" (C 326 p. 10). L'Annexe I du code frontières Schengen
contient au surplus une liste non exhaustive des pièces justificatives
nécessaires à démontrer l'objet et les conditions du séjour envisagé
au sens de l'art. 5 par. 1 let. c du code précité.
6.3 Au vu des considérations qui précèdent, l'examen de l'objet et des
conditions du séjour envisagé au sens de l'art. 5 par. 1 let. c du code
frontières Schengen correspond à l'examen de la garantie de sortie de
Suisse au sens de l'art. 5 al. 2 LEtr. Aussi la pratique et la
jurisprudence appliquées à cette dernière disposition peuvent-elles
être reprises.
7.
Le Règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 (JO L 81
du 21 mars 2001, p. 1-7) différencie, en son art. 1 par. 1 et 2, les
ressortissants des Etats tiers selon qu'ils sont soumis ou non à
l'obligation du visa. L'annexe I du règlement énumère ainsi les pays
dont les ressortissants doivent être munis d'un visa pour le
franchissement des frontières extérieures des Etats membres de
l'Espace Schengen, alors que l'annexe II énumère les pays dont les
ressortissants sont exemptés de cette obligation. En tant que
ressortissants de la République dominicaine, les recourants sont
soumis à l'obligation du visa.
8.
Dans la décision attaquée, rendue en application de l'art. 5 LEtr,
l'ODM a refusé d'autoriser la requérante et son fils à entrer en Suisse
au motif que leur sortie de ce pays au terme de leur séjour ne pouvait
pas être considérée comme suffisamment garantie. Il convient par
conséquent d'examiner l'objet et les conditions du séjour envisagé, au
sens de l'art. 5 par. 1 let. c du code frontières Schengen, afin de
déterminer si les intéressés sont disposés à quitter la Suisse et
l'Espace Schengen à l'échéance de leur séjour ou s'il apparaît, au
contraire, qu'ils cherchent à pénétrer et à s'établir sur le territoire des
Etats membres ou de l'un d'entre eux sous couvert d'un visa pour
visite familiale.
9.
9.1 Il est vrai qu'au regard de la situation socioéconomique prévalant
en République dominicaine où résident la recourante et son fils, on ne
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saurait d'emblée écarter les craintes émises par l'ODM de voir la
recourante chercher à prolonger son séjour dans l'Espace Schengen
au-delà de la validité du visa sollicité. A ce sujet, il sied de relever que
l'économie de la République dominicaine, malgré une croissance forte
de son produit intérieur brut (PIB) durant ces dernières années,
atteignant même un sommet en 2006 avec 10.9 %, reste fragile et très
dépendante du secteur du tourisme. On ne saurait en outre perdre de
vue que, malgré un fort taux de croissance, il demeure une différence
importante du niveau de vie entre la Suisse et la République
dominicaine. Pour preuve, le PIB par habitant s'établissait en 2008 à
4'626 US$, soit à un niveau plus de dix fois inférieur à celui de la
Suisse [source: site internet: ; état : février
2009].
9.2 Cet état de fait entraîne inévitablement une forte pression
migratoire, pression encore renforcée, comme l'expérience l'a
démontré, lorsque la personne concernée peut s'appuyer à l'étranger
sur un réseau social (parents, amis) préexistant, ce qui est le cas en
l'espèce.
9.3 Toutefois, contrairement à ce qu'affirme la recourante dans son
recours, la seule situation économique dans le pays d'origine ne suffit
pas à conclure à l'absence de garantie quant à la sortie de l'Espace
Schengen à l'issue du séjour, toutes les particularités du cas d'espèce
devant être prises en considération.
10.
10.1 Si la situation patrimoniale de la recourante, que rien ne permet
légitimement de mettre en doute, la place indubitablement dans une
catégorie aisée de la société dominicaine, elle ne saurait à elle seule
permettre d'affirmer, avec le degré de vraisemblance exigé par la
pratique, que la recourante ne pourrait pas être tentée, une fois en
Suisse, d'essayer d'y rester en compagnie de son fils.
10.2 Au-delà de l'aspect patrimonial demeurent décisifs, afin de
pouvoir affirmer que la condition de la très haute vraisemblance d'une
sortie de Suisse et du territoire de l'Espace Schengen à l'échéance du
visa est remplie, les liens concrets liant la personne requérante avec
son pays. A ce titre, force est, à la lecture du dossier de la cause, de
constater que la recourante, célibataire et sans emploi, ne laisserait
vacante en République dominicaine aucune responsabilité
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professionnelle, familiale – A._______ se rendant en Suisse avec son
enfant B._______ – ou sociale. La gestion d'un patrimoine immobilier,
de surcroît d'importance relativement modeste, ainsi que la perception
des revenus qui en découlent, ne nécessitent objectivement pas la
présence effective de la recourante sur le sol dominicain. Ainsi, on ne
saurait reprocher à l'ODM de ne pas partager l'avis de celle-ci
lorsqu'elle affirme, dans ses écritures, qu'il existe des liens
suffisamment étroits entre elle et son pays pour que les autorités
soient assurées d'une sortie de Suisse à l'échéance du délai de
validité du visa.
10.3 La présence du fils de la recourante, la scolarité de ce dernier
suivie en République dominicaine et la volonté exprimée de
coordonner le voyage en Suisse avec les vacances scolaires à Saint-
Domingue sont des éléments certes favorables à la recourante, mais
qui ne peuvent compenser le manque de liens professionnels,
personnels et sociaux dont il est fait plus haut mention et qui empêche
tant les autorités administratives helvétiques que le Tribunal de céans
de juger que la recourante retournera, de manière hautement
vraisemblable, dans son pays à l'échéance du visa. En effet, il sied de
prendre en considération le fait qu'en cas de séjour prolongé en
Suisse, B._______ y serait scolarisé, certes dans une langue autre
que sa langue maternelle, mais dans des conditions au moins
équivalentes à celles proposées dans son pays.
11.
Cela étant, le désir exprimé par A._______, au demeurant
parfaitement compréhensible, de venir en Suisse rendre visite à sa
soeur ainsi qu'à la famille de celle-ci ne constitue pas à lui seul un
motif justifiant l'octroi d'un visa, à propos duquel elle ne saurait au
demeurant se prévaloir d'aucun droit. Certes, il peut, du moins à
première vue, sembler sévère de refuser à une personne l'autorisation
d'entrer dans un pays où réside un membre de sa famille. Il convient
toutefois de souligner que cette situation ne diffère pas de celle de
nombreux étrangers dont la parenté demeure également en Suisse.
En effet, au vu du nombre important de demandes de visa (n'émanant
par ailleurs pas uniquement de ressortissants dominicains) qui leur
sont adressées, les autorités helvétiques doivent prendre en
considération le risque résultant du fait que la personne bénéficiant
d'un visa d'entrée ne quitte pas la Suisse au terme de son séjour.
Dans ce contexte, lesdites autorités ont été amenées à adopter une
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politique d'admission très restrictive et à procéder en conséquence à
une sévère limitation du nombre d'acceptations des requêtes visant à
l'octroi d'une autorisation d'entrée en Suisse. Pareilles considérations
ne sont ainsi pas sans avoir une incidence importante sur
l'appréciation du cas particulier.
12.
Il sied encore de relever que le refus d'une autorisation d'entrée ne
remet nullement en cause la bonne foi ou l'honnêteté des personnes
qui, résidant régulièrement en Suisse, ont invité un tiers domicilié à
l'étranger pour un séjour touristique et se sont engagées à garantir les
frais y relatifs et le départ de leur invité. Les assurances données en la
matière, comme celles formulées notamment sur le plan financier, sont
effectivement prises en compte pour se prononcer sur la question de
savoir si un visa peut être accordé au ressortissant étranger qui le
sollicite. Cependant, elles ne peuvent être tenues pour décisives, dans
la mesure où elles n'engagent pas la requérante elle-même – celle-ci
conservant seule la maîtrise de son comportement – et ne permettent
nullement d'exclure l'éventualité que l'intéressée, une fois en Suisse,
ne tente d'y poursuivre durablement son existence. De même,
l'intention que peut manifester une personne de retourner dans son
pays à l'issue de son séjour, voire son engagement formel à le faire,
n'ont aucune force obligatoire sur le plan juridique (cf. arrêt du TAF
C-5046/2008 du 5 mars 2009 consid. 10) et ne suffisent pas non plus
à garantir que son départ interviendra dans les délais prévus.
13.
Au vu de l'ensemble des circonstances, le Tribunal de céans estime
que c'est à raison que l'ODM a considéré que le retour de A._______
et de son fils B._______ en République dominicaine à l'échéance du
visa requis n'était pas suffisamment assuré et, partant, a refusé la
délivrance d'une autorisation d'entrée en Suisse en leur faveur.
14.
14.1 Compte tenu des considérants exposés ci-dessus, il appert que,
par sa décision du 10 juin 2008, l'ODM n'a ni violé le droit fédéral, ni
constaté des faits pertinents de manière inexacte ou incomplète; en
outre, cette décision n'est pas inopportune (art. 49 PA).
En conséquence, le recours est rejeté.
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14.2 Vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure
à la charge de la recourante, conformément à l'art. 63 al. 1 PA en
relation avec l'art. 1, l'art. 2 et l'art. 3 du règlement du 21 février 2008
concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal
administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2).
(dispositif page suivante)

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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 700.-, sont mis à la charge
des recourants. Ce montant est compensé par l'avance de frais déjà
versée de Fr. 700.-.
3.
Le présent arrêt est adressé :
- aux recourants, par l'entremise de leur mandataire (Recommandé)
- à l'autorité inférieure (n° de réf. 1636595.3 / 5067253.7)
- en copie, au Service cantonal de la population du Canton de Vaud
(Divisions Etrangers), pour information et avec dossier cantonal en
retour.
Le président du collège : Le greffier :
Jean-Daniel Dubey Jean-Luc Bettin
Expédition :
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