C-4433/2007 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - refus d'exception aux mesures de limitation
Karar Dilini Çevir:
C-4433/2007 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - refus d'exception aux mesures de limitation
Cour III
C-4433/2007/
{T 0/2}
A r r ê t d u 1 9 j u i n 2 0 0 9
Jean-Daniel Dubey (président du collège), Blaise Vuille,
Marianne Teuscher, juges,
Aurélia Chaboudez, greffière.
A._______, agissant pour elle-même et son fils
B._______,
(...)
recourante,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Refus d'exception aux mesures de limitation (art. 13 let. f
OLE).
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
C-4433/2007
Faits :
A.
A.a De nationalité marocaine, A._______, née le 15 mars 1984, a
déposé une demande d'autorisation de séjour et de travail le 22 juin
2006 auprès des autorités valaisannes, dans laquelle elle a indiqué
être entrée en Suisse le 1er juin 2006 et qui a été rejetée le 3 août
2006. Auditionnée par le Service de l'état civil et des étrangers du
canton du Valais (actuellement le Service de la population et des
migrants, ci-après : SPM) le 28 août 2006, elle a déclaré séjourner en
Suisse depuis le 1er avril 2006, y avoir travaillé en qualité de fille au
pair, être séparée depuis avril 2005 de son mari qui purgeait une peine
de trois ans de prison au Luxembourg pour trafic de drogue et a
précisé qu'elle était enceinte de sept mois, ce que sa famille au Maroc
ignorait.
A.b Dans un rapport médical du 3 octobre 2006 adressé au SPM, la
doctoresse C._______, spécialiste FMH en psychiatrie et
psychothérapie, a exposé que l'intéressée lui avait été adressée en
raison de son état inquiet et angoissé ainsi que de sa résignation
soudaine à donner son enfant en adoption. Il ressort de l'anamnèse
que l'intéressée aurait quitté le Maroc en janvier 2004 pour le
Luxembourg où elle aurait épousé un compatriote le 22 mars 2004,
qu'elle serait venue en Suisse en mars 2006 et y aurait travaillé dès
son arrivée, que le père de son enfant serait un ressortissant français,
marié, qui ne serait pas au courant de la grossesse, tout comme sa
famille au Maroc à l'exception de sa soeur, et qu'elle avait mis au
monde son fils, B._______, le 22 septembre 2006. L'intéressée était
décrite comme une personne très angoissée, triste, ayant des idées
suicidaires. La patiente avait expliqué qu'en raison de la naissance de
son fils, elle n'osait imaginer rentrer ni au Luxembourg, si ce n'est pour
divorcer, par crainte des réactions de son mari, qui l'avait par ailleurs
trompée, battue et violentée, ni au Maroc où elle redoutait de se faire
lyncher par sa famille, qui l'avait également menacée au téléphone
pour qu'elle travaille et continue à la soutenir financièrement, étant
donné que ses frères, drogués, étaient à la maison, que sa mère et sa
soeur n'avaient pas d'emploi et que son père était décédé peu avant
l'accouchement. Suite à une aggravation de son état après la
naissance de son fils, l'intéressée a été hospitalisée du 27 septembre
au 28 novembre 2006.
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A.c Dans un rapport médical établi le 17 novembre 2006, la
doctoresse D._______ et l'assistante sociale E._______, du Service
hospitalier de psychiatrie adulte de l'hôpital de Malévoz, ont précisé
que la principale raison de l'hospitalisation de l'intéressée était sa
situation de détresse psychologique et sociale, qu'elle avait une bonne
maîtrise orale du français, de l'expérience professionnelle et qu'elle
avait affirmé qu'elle donnerait son fils en adoption si elle devait quitter
la Suisse car celui-ci n'aurait aucun avenir au Maroc en tant que fils
naturel.
A.d L'intéressée a travaillé comme sommelière dans un hôtel du
6 décembre 2006 au 15 janvier 2007, emploi qu'elle a repris à partir
du 1er février 2007 après un changement de tenancier. Les demandes
d'autorisation de séjour et de travail y relatives qu'elle a déposées ont
été préavisées favorablement par les autorités communales.
A.e Il ressort du dossier qu'en mars 2007, l'intéressée n'était plus
suivie médicalement et ne touchait aucune aide sociale.
A.f Le 13 mars 2007, le SPM s'est déclaré disposé à accorder une
autorisation de séjour à l'intéressée dans le cadre de l'art. 13 let. f de
l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE
de 1986, RO 1986 1791), sous réserve de l'approbation de l'ODM.
B.
B.a Le 27 mars 2007, l'ODM a informé l'intéressée qu'il envisageait de
refuser d'approuver l'octroi d'une exception aux mesures de limitation
en sa faveur et lui a donné la possibilité de se déterminer.
B.b L'intéressée, agissant par l'intermédiaire de son mandataire, a
transmis à l'ODM, le 17 avril 2007, une copie de son acte de mariage
établi au Luxembourg le 22 mars 2004, et a invoqué qu'elle n'avait
jamais pu obtenir de titre de séjour dans ce pays du fait que son mari
n'en avait pas non plus et qu'elle ne pouvait par conséquent pas y
retourner. Le 14 mai 2007, elle a versé en cause un rapport médical
du 3 mai 2007, dans lequel la doctoresse D._______ et le médecin-
assistant F._______ ont précisé qu'elle avait été hospitalisée le
27 septembre 2006 en raison d'un risque suicidaire et qu'elle se
trouvait alors dans une détresse psychosociale ; ils n'excluaient pas
que celle-ci puisse resurgir si l'intéressée venait à être renvoyée au
Maroc.
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C.
Par décision du 29 mai 2007, l'ODM a refusé d'accorder une exception
aux mesures de limitation à l'intéressée. Il a retenu qu'en enfreignant
les prescriptions de police des étrangers, elle ne pouvait se prévaloir
ni d'un comportement irréprochable, ni d'un séjour régulier en Suisse,
ni des inconvénients d'une situation dont elle était en grande partie
responsable. Il a considéré que son séjour en Suisse était
extrêmement bref, surtout comparé aux 26 mois pendant lesquels elle
avait résidé au Luxembourg et aux nombreuses années qu'elle avait
vécues au Maroc, où elle avait notamment passé toute son enfance
ainsi que son adolescence et avait forcément conservé des attaches
étroites, et que sa situation personnelle, sociale et familiale ne se
distinguait guère de celle de bon nombre de ses concitoyennes.
L'ODM a refusé de tenir compte des craintes émises par l'intéressée
d'être exposée, de même que son enfant, à un danger de mort en cas
de retour au Maroc, rappelant, d'une part, que l'exception aux mesures
de limitation n'avait pas pour but de soustraire un étranger aux
conditions de vie de son pays d'origine et relevant, d'autre part, que ni
le risque de subir des mauvais traitements, ni l'absence de soutien de
la part de ses proches n'avaient été établis, et a rappelé à cet égard
que l'intéressée avait informé sa soeur de sa situation. L'office précité
a par ailleurs estimé que l'intéressée pourrait couper tout contact avec
sa famille et s'installer dans une autre région du Maroc si nécessaire,
qu'elle avait la possibilité de faire appel aux services sociaux et que
les problèmes médicaux datant de septembre 2006 ne suffisaient pas
à justifier l'octroi d'une autorisation de séjour en sa faveur. Quant au
fils de l'intéressée, l'ODM a considéré qu'au vu de son âge, il pouvait
sans autre être exigé de lui qu'il accompagne sa mère au Maroc.
L'autorité inférieure a précisé que l'intégration professionnelle de
l'intéressée n'avait rien d'exceptionnel et qu'elle n'avait pas démontré
avoir acquis des connaissances qu'elle ne pourrait mettre en oeuvre
dans son pays d'origine. L'ODM s'est dispensé, pour raison de
compétence, d'examiner le grief de l'impossibilité d'un retour au
Luxembourg.
D.
Agissant pour elle-même et son fils, l'intéressée a recouru contre cette
décision auprès du Tribunal administratif fédéral (ci-après : le Tribunal)
par acte du 28 juin 2007, concluant à l'octroi d'une exception aux
mesures de limitation, subsidiairement au renvoi du dossier à l'ODM
pour examen sous l'angle de l'admission provisoire. Elle a invoqué que
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son comportement avait toujours été irréprochable hormis l'illégalité de
son séjour et de son travail, qui avaient toutefois été tolérés par les
autorités cantonales. Elle a soutenu qu'en cas de retour au Maroc, elle
n'aurait pratiquement aucune possibilité de logement ni d'intégration
sociale et professionnelle, qu'elle serait exposée aux violences de sa
famille pour s'être mariée à l'étranger sans leur accord et avoir eu un
enfant issu d'une relation extraconjugale, et a produit à cet égard un
compte rendu traduit d'une réunion familiale du 8 juin 2007 lors de
laquelle il aurait été décidé qu'en cas de retour, elle et son enfant
seraient tués. Elle a précisé qu'elle ne pourrait pas échapper
indéfiniment à sa famille en s'installant ailleurs au Maroc et que les
sanctions familiales étaient rarement punies par la loi. Elle en a conclu
que sa situation, même si elle était comparable à celle d'autres
femmes reniées et agressées, se différenciait de celle de la moyenne
de ses compatriotes, que son renvoi violerait les obligations
internationales de la Suisse, et a allégué que l'exécution de son renvoi
n'était pas licite ni raisonnablement exigible. Elle a mentionné que,
selon les médecins, il n'était pas exclu que sa détresse psycho-sociale
réapparaisse en cas de renvoi au Maroc.
E.
Par décision incidente du 6 juillet 2007, le Tribunal a constaté que la
question de l'exécution du renvoi était extrinsèque à l'objet du litige et
a invité la recourante à fournir des informations sur les circonstances
de son entrée en Suisse et sur la paternité de son enfant.
F.
L'intéressée a répondu, par courrier du 14 août 2007, qu'elle avait
quitté le Luxembourg sans but précis, qu'elle était arrivée à St-
Gingolph en France où elle avait rencontré deux femmes qui l'avaient
mise en contact avec un passeur et qu'une fois en Suisse, elle avait
logé pendant une semaine chez une personne avant de trouver un
emploi grâce aux annonces dans la presse. Concernant le père de son
enfant, dont elle ne connaissait que le prénom, elle a expliqué qu'elle
l'avait connu par l'intermédiaire de son mari, qu'il travaillait dans un
restaurant au Luxembourg, qu'il était divorcé et père d'un enfant. Elle a
allégué qu'il avait toujours nié être le père de l'enfant et qu'elle n'avait
pas eu les moyens de le contacter à la naissance de celui-ci.
G.
L'ODM s'est déterminé sur le recours, dont il a proposé le rejet, en
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date du 3 septembre 2007. Il a estimé que les arguments développés
dans ce mémoire n'étaient pas de nature à lui permettre de
reconsidérer sa position.
H.
Un rapport du SPM du 11 septembre 2007 mentionnait que la
recourante était alors sans travail suite à la fermeture de l'hôtel qui
l'employait.
I.
Dans sa réplique du 8 octobre 2007, la recourante a invoqué que sa
situation, qui était particulière par rapport à celle de la moyenne des
étrangers du fait de son mariage en Europe contre l'avis de ses
parents et de sa maternité hors mariage, générait une situation de
détresse personnelle grave.
J.
Par lettre du 7 janvier 2008, le Tribunal a été informé que la recourante
n'était plus représentée par un avocat.
K.
K.a Le 25 octobre 2008, l'intéressée a été entendue par les forces de
police en qualité de prévenue d'infractions à la loi sur les stupéfiants.
A cette occasion, elle a notamment déclaré qu'elle était en Suisse
depuis avril 2005, qu'elle avait un emploi de serveuse à mi-temps dans
un café depuis novembre 2007, ayant auparavant travaillé un mois
dans un autre établissement, qu'elle était connue de l'office des
poursuites pour un montant d'environ Fr. 8000.- et qu'elle était
incapable de rembourser ses dettes. Elle a reconnu qu'elle avait fumé
du cannabis environ une fois par semaine depuis 2005 jusqu'en été
2008, qu'elle avait consommé de la cocaïne quasi tous les jours en
2004 au Luxembourg, qu'une fois en Suisse, elle avait cessé d'en
prendre avant de recommencer en mars 2008 et qu'elle en avait pris à
une trentaine de reprises depuis lors. Elle a également précisé qu'elle
ne connaissait pas l'identité du père biologique de son enfant.
K.b Lors d'une nouvelle audition par les forces de police, le 2 mars
2009, elle a exposé qu'elle se trouvait en Suisse depuis presque trois
ans, qu'elle y avait eu plusieurs emplois, qu'elle avait arrêté de
travailler en janvier 2009 avant d'être réengagée comme serveuse fin
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février 2009. Elle a souligné que malgré ses démarches, elle n'avait
pas de permis de travail.
L.
Invitée à faire part des derniers éléments intervenus dans sa situation,
par ordonnance du 13 mars 2009, la recourante a fait savoir, par
courriers des 17 et 30 avril 2009, qu'elle vivait avec un ressortissant
étranger au bénéfice d'un permis d'établissement, qu'elle bénéficiait
d'un contrat de travail, et que son ex-mari, qui était sorti de prison et
rentré au Maroc, l'avait menacée de mort si elle y retournait.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal,
en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au
sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la
procédure administrative (PA, RS 172.021) prises par les autorités
mentionnées à l'art. 33 LTAF.
En particulier, les décisions en matière de refus d'exception aux
mesures de limitation prononcées par l'ODM (cf. art. 33 let. d LTAF)
sont susceptibles de recours au Tribunal, qui statue définitivement
(art. 1 al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 5 de la loi du
17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110] applicable
mutatis mutandis aux exceptions aux nombres maximums [cf. arrêt du
Tribunal fédéral 2C_885/2008 du 5 janvier 2009]).
1.2 L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la loi fédérale du
16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr, RS 142.20) a entraîné
l'abrogation de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et
l'établissement des étrangers (LSEE de 1931, RS 1 113),
conformément à l'art. 125 LEtr, en relation avec le chiffre I de son
annexe 2. De même, l'entrée en vigueur au 1er janvier 2008 de l'art. 91
de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et
à l'exercice d'une activité lucrative (OASA, RS 142.201) a eu pour
conséquence l'abrogation de certaines ordonnances d'exécution de la
LSEE, telle l'OLE.
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Dès lors que la demande qui est l'objet de la présente procédure de
recours a été déposée avant l'entrée en vigueur de la LEtr, l'ancien
droit matériel est applicable à la présente cause, conformément à
l'art. 126 al. 1 LEtr.
1.3 En revanche, selon l'art. 126 al. 2 LEtr, la procédure relative aux
demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la LEtr est régie par
le nouveau droit.
A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le
Tribunal est régie par la PA (art. 37 LTAF).
1.4 L'intéressée a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Le
recours, présenté dans la forme et le délai prescrits par la loi, est
recevable (cf. art. 50 et art. 52 PA).
2.
En vertu de la réglementation au sujet de la répartition des
compétences en matière de police des étrangers entre la
Confédération et les cantons, si ces derniers doivent se prononcer au
préalable sur la délivrance des autorisations de séjour hors contingent,
la compétence décisionnelle en matière de dérogations aux conditions
d'admission au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEtr, et jusqu'au
31 décembre 2007 en matière d'octroi d'exceptions aux mesures de
limitation au sens de l'art. 13 let. f OLE, appartient toutefois à la
Confédération, plus particulièrement à l'ODM (cf. art. 99 LEtr en
relation avec l'art. 85 OASA, voir également à cet égard le chiffre 1.3.2
des Directives et Commentaires de l'ODM, en ligne sur le site de
l'ODM > Thèmes > Bases légales > Directives et commentaires >
Domaine des étrangers > Procédure et compétence, version
01.01.2008, visité le 7 mai 2009; ATF 119 Ib 33 consid. 3a p. 39,
traduit en français dans Journal des Tribunaux [JdT] 1995 I 226
consid. 3a p. 230, valable mutatis mutandis pour le nouveau droit).
3.
Il s'impose de souligner en préambule que le Tribunal ne peut
examiner que les rapports de droit sur lesquels l'autorité administrative
compétente s'est prononcée sous la forme d'une décision, laquelle
détermine l'objet de la contestation (cf. ATF 133 II 35 consid. 2 p. 38,
ATF 131 II 200 consid. 3.2 p. 203 et ATF 123 II 125 consid. 2 p. 127;
ANDRÉ GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel, 1984, tome II,
p. 933; FRITZ GYGI, Verwaltungsrecht, Berne, 1986, p. 123ss).
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En conséquence, comme déjà indiqué dans la décision incidente du
6 juillet 2007, l'objet de la procédure de recours est limité au seul
examen du bien-fondé de la décision de l'ODM du 29 mai 2007 en tant
que cette autorité a refusé de mettre la recourante, de même que son
fils, au bénéfice d'une exception aux mesures de limitation au sens de
l'art. 13 let. f OLE. Les conclusions subsidiaires du recours, tendant au
renvoi du dossier à l'ODM en vue de l'octroi d'une admission
provisoire, au motif que l'exécution du renvoi des intéressés ne serait
pas licite ni raisonnablement exigible au sens de l'art. 14a al. 3 et 4
LSEE, sont irrecevables, dès lors que cette question est extrinsèque à
l'objet du présent litige.
4.
4.1 L'exception aux nombres maximums prévue par l'art. 13 let. f OLE
a pour but de faciliter la présence en Suisse d'étrangers qui, en
principe, seraient soumis au contingentement des autorisations de
séjour, mais pour lesquels l'application du système des nombres
maximums apparaît, par suite de circonstances particulières, comme
trop rigoureuse.
4.2 Il découle de la formulation de l'art. 13 let. f OLE que cette
disposition dérogatoire présente un caractère exceptionnel et que les
conditions pour une reconnaissance d'un cas de rigueur doivent être
appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l'étranger
concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela
signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles
applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause
de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé
aux restrictions des nombres maximums comporte pour lui de graves
conséquences. Lors de l'appréciation du cas d'extrême gravité, il y a
lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas
particulier. La reconnaissance d'un tel cas n'implique pas forcément
que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour
échapper à une situation de détresse. D'un autre côté, le fait que
l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période,
qu'il s'y soit bien intégré socialement et professionnellement et que
son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui
seul, à constituer un cas d'extrême gravité ; il faut encore que sa
relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il aille
vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet
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égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que le
requérant a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement
pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une
exemption des mesures de limitation du nombre des étrangers (cf.
ATAF 2007/45 consid. 4.2 p. 589/590 et réf. citées).
4.3 Un séjour effectué en Suisse sans autorisation idoine, illégal ou
précaire, ne saurait être considéré comme un élément constitutif d'un
cas personnel d'extrême gravité au sens de l'art. 13 let. f OLE. Sinon,
l'obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte
récompensée. Dès lors, il appartient à l'autorité compétente
d'examiner si l'étranger se trouve pour d'autres raisons dans un état
de détresse justifiant de l'excepter des mesures de limitation du
nombre des étrangers. Pour cela, il y a lieu de se fonder notamment
sur les relations familiales de l'intéressé en Suisse et dans sa patrie,
sur son état de santé, sur sa situation professionnelle, sur son
intégration sociale (cf. ATAF 2007/45 consid. 6.3 p. 593 et
ATAF 2007/16 consid. 5.4 p. 196s. et jurisprudence citée).
5.
5.1 En l'espèce, la recourante serait arrivée en Suisse, selon les
versions, en avril 2005, mars 2006, avril 2006 ou juin 2006, soit il y a
quatre ans au maximum. Quoi qu'il en soit, elle a d'abord résidé dans
le canton du Valais en toute illégalité puis au bénéfice d'une simple
tolérance cantonale, après le dépôt de sa demande de régularisation.
Elle ne saurait ainsi tirer parti de la durée de son séjour en Suisse
pour bénéficier d'une exception aux mesures de limitation sans que
n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles à même de
justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur.
5.2 A cet égard, elle ne peut se prévaloir d'un comportement
irréprochable en Suisse dans la mesure où, en plus du fait qu'elle y a
séjourné et travaillé illégalement, elle a reconnu avoir consommé
régulièrement des produits stupéfiants, en particulier de la cocaïne à
une trentaine de reprises entre mars et octobre 2008, et avoir fait
l'objet de poursuites pour un montant d'environ Fr. 8000.- (cf. sa
déclaration à la police cantonale de sûreté du 25 octobre 2008).
5.3 Il appert que la recourante a entrepris une activité lucrative en
Suisse dès son arrivée et qu'elle a presque toujours travaillé, sauf
pendant son séjour à l'hôpital notamment. De par ses emplois de fille
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au pair et de sommelière, elle n'a toutefois pas acquis en Suisse des
connaissances et qualifications professionnelles telles qu'elle aurait
peu de chance de les faire valoir dans son pays d'origine. En outre, s'il
n'est pas contesté que l'intéressée a développé, au cours des
quelques années passées en Suisse, un certain réseau social dans ce
pays, il ne ressort pas du dossier qu'elle se soit créé des attaches à ce
point profondes et durables avec la Suisse qu'elle ne puisse plus
raisonnablement envisager un retour au Maroc. Par ailleurs, son
intégration socioprofessionnelle, comparée à celle de la moyenne des
étrangers présents en Suisse depuis le même nombre d'années, ne
revêt aucun caractère exceptionnel, ses efforts d'intégration étant
sujets à caution en raison de ses dettes et de sa consommation de
cannabis et de cocaïne.
5.4 Sur un autre plan, il convient de constater que la recourante est
née au Maroc où elle a passé toute son enfance et sa jeunesse,
années qui apparaissent comme essentielles pour la formation de la
personnalité et, partant, pour l'intégration sociale et culturelle (cf.
ATF 123 II 125 consid. 4 p. 128ss; arrêt du Tribunal fédéral
2A.718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3), de sorte qu'on ne saurait
considérer que son séjour sur le territoire suisse, de même qu'en
Europe en général, ait été long au point de la rendre totalement
étrangère à sa patrie.
5.5 Quant à son fils B._______, qui aura trois ans en septembre, il
est, en raison de son jeune âge, fortement lié à sa mère, qui
l'imprègne de son mode de vie et de sa culture. Son intégration au
milieu socioculturel suisse n'est par conséquent pas si profonde qu'il
ne pourrait s'adapter à sa patrie (cf. ATAF 2007/16 consid. 5.3 p. 196).
5.6 A n'en pas douter, le retour de l'intéressée et de son fils au Maroc
ne sera pas exempt de difficultés, en particulier en raison de sa
situation de mère célibataire. Le Tribunal tient cependant à rappeler,
comme mentionné au considérant 3, que l'objet du présent litige ne
concerne pas la problématique du renvoi, mais celle d'une exception
aux mesures de limitation pour cas de rigueur au sens de l'art. 13 let. f
OLE. La question est donc de savoir si, au cours des années passées
en Suisse, l'intéressée et son fils se sont intégrés de telle manière
qu'un départ du pays serait considéré pour eux comme un véritable
déracinement, et non d'examiner si un renvoi serait licite, possible et
raisonnablement exigible.
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En d'autres termes, une exception aux mesures de limitation n'a pas
pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie d'un autre
pays, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans
une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent
de se réadapter à leur existence passée. Comme l'a relevé le Tribunal
fédéral dans sa jurisprudence (cf. notamment ATF 123 II 125
consid. 5b/dd p. 133), on ne saurait tenir compte des circonstances
générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l'ensemble de
la population restée sur place, auxquelles la personne concernée sera
également exposée à son retour, sauf si celle-ci allègue d'importantes
difficultés concrètes propres à son cas particulier, telle une maladie
grave ne pouvant être soignée qu'en Suisse (cf. ATAF 2007/44
consid. 5.3 p. 583 et jurisprudence citée).
La reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité ne tend pas
davantage à protéger l'étranger contre les conséquences des abus
des autorités étatiques ni contre les actes de particuliers, des
considérations de cet ordre relèvent en effet de la procédure d'asile,
respectivement de l'examen de la licéité et de l'exigibilité de
l'exécution d'un renvoi entré en force (cf. ATAF 2007/44 ibid.). Dans la
procédure d'exemption des mesures de limitation, ce sont des raisons
exclusivement humanitaires qui sont déterminantes. Cela n'exclut
cependant pas de prendre en considération les difficultés que le
recourant rencontrerait dans son pays du point de vue personnel,
familial et économique (cf. ATF 123 II 125 consid. 3 p. 128).
5.7 En l'occurrence, la recourante a invoqué qu'en raison de son
statut de mère célibataire, elle ne pourrait pas compter sur le soutien
de sa famille et n'aurait pratiquement aucune possibilité de logement
ni d'intégration sociale et professionnelle.
Selon la jurisprudence, le fait de renvoyer une femme seule dans son
pays d'origine où elle n'a pas de famille n'est généralement pas propre
à constituer un cas de rigueur au sens de l'art. 13 let. f OLE, à moins
que ne s'y ajoutent d'autres circonstances qui rendent le retour
extrêmement difficile. Un cas de rigueur peut notamment être réalisé
lorsque, aux difficultés de réintégration dues à l'absence de famille
dans le pays d'origine, s'ajoute le fait que l'intéressée est affectée
d'importants problèmes de santé qui ne pourraient pas être soignés
dans sa patrie, le fait qu'elle serait contrainte de regagner un pays (sa
patrie) qu'elle avait quitté dans des circonstances traumatisantes, ou
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encore le fait qu'elle laisserait derrière elle une partie importante de sa
proche parenté (parents, frères et soeurs) appelée à demeurer
durablement en Suisse, avec qui elle a partagé pendant longtemps les
mêmes vicissitudes de l'existence (cf. arrêt du Tribunal administratif
fédéral C-311/2006 du 17 octobre 2008 consid. 4.4 et la jurisprudence
citée). Or, de telles circonstances n'existent pas en l'espèce. En ce qui
concerne sa santé psychique, il ne ressort pas du dossier que son état
se soit aggravé depuis le rapport du 3 mai 2007, qui signale au
demeurant que les difficultés psychiques de la recourante ont été
aplanies. En outre, s'agissant d'un soutien familial, la situation de la
recourante en cas de retour au Maroc ne sera certes pas aisée mais
elle ne différera pas de celle qu'elle vit actuellement en Suisse, où
aucun de ses proches ne réside. Par ailleurs, il apparaît qu'elle pourra
recevoir de l'aide de sa soeur, à qui elle a pu se confier (cf. rapport
médical du 3 octobre 2006) et qui aurait « pris un risque important en
lui communiquant le compte rendu de [la] réunion [familiale] » (cf.
mémoire de recours p. 5). Sur le plan professionnel et économique, un
renvoi de Suisse ne présenterait pas de rigueur particulière pour
l'intéressée au regard de la précarité de sa situation financière
actuelle et des revenus que lui procure son emploi à mi-temps comme
serveuse. Par ailleurs, s'il est vrai que la situation des mères
célibataires au Maroc est difficile, il n'en demeure pas moins qu'elle
pourra non seulement se prévaloir de son expérience professionnelle
en Suisse mais également de ses années de travail dans une usine au
Maroc (cf. audition du 25 octobre 2008 précitée). Quant à ses
allégations, selon lesquelles sa vie ainsi que celle de son enfant
seraient menacées en cas de retour au Maroc, elles n'ont pas à être
examinées dans le cadre de la présente procédure. Il appartiendra, en
effet, aux autorités qui seront chargées de se prononcer sur le renvoi
de Suisse des intéressés, le cas échéant, aux autorités d'asile,
d'examiner cette question.
6.
En conséquence, l'examen de l'ensemble des éléments de la présente
cause amène le Tribunal à la conclusion que la recourante et son fils
ne se trouvent pas dans une situation d'extrême gravité au sens de
l'art. 13 let. f OLE.
7.
Par sa décision du 29 mai 2007, l'autorité de première instance n'a ni
violé le droit fédéral, ni constaté des faits pertinents de manière
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inexacte ou incomplète ; en outre, cette décision n'est pas inopportune
(art. 49 PA).
Le recours doit par conséquent être rejeté.
8.
Vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure, d'un
montant de Fr. 800.-, à la charge de la recourante, conformément à
l'art. 63 al. 1 PA en relation avec les art. 1ss du règlement du 21 février
2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal
administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2).
(dispositif page suivante)
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 800.-, sont mis à la
charge de la recourante. Ce montant est compensé par l'avance de
frais versée le 14 août 2007.
3.
Le présent arrêt est adressé :
- à la recourante (Recommandé)
- à l'autorité inférieure (avec dossier n° 2281692)
- au Service de la population et des migrants du canton du Valais (en
copie ; avec dossier cantonal en retour)
Le président du collège : La greffière :
Jean-Daniel Dubey Aurélia Chaboudez
Expédition :
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