C-3815/2009 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - Refus d'exception aux mesures de limitation (art. ...
Karar Dilini Çevir:
C-3815/2009 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - Refus d'exception aux mesures de limitation (art. ...
Cour III
C-3815/2009, C-3816/2009
C-3817/2009 & C-3818/2009
{T 0/2}
A r r ê t d u 2 5 j a n v i e r 2 0 1 0
Jean-Daniel Dubey (président du collège),
Marianne Teuscher, Bernard Vaudan, juges,
Susana Carvalho, greffière.
1. AH._______,
2. BH._______,
3. IH._______,
4. DH._______,
5. EH._______,
tous représentés par Maître Laurent Panchaud,
44, avenue Krieg, boîte postale 45, 1211 Genève 17,
recourants,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Refus d'exception aux mesures de limitation (art. 13 let. f
OLE).
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
C-3815/2009, C-3816/2009
C-3817/2009 & C-3818/2009
Faits :
A.
AH._______ et BH._______, originaires d'Arménie mais possédant
également la nationalité ukrainienne, nés respectivement les 1er juin
1963 et 17 novembre 1964, sont arrivés en Suisse le 19 septembre
1998 accompagnés de leurs enfants IH._______ (née le 13 mars
1982), DH._______ (né le 18 juin 1983) et EH._______ (née le 13
août 1984). Ils ont déposé une demande d'asile le 21 septembre 1998
sous de fausses identités, expliquant qu'AH._______ était recherché
par les autorités arméniennes, qui voulaient l'éliminer suite à ses
activités au sein d'une unité de police spéciale dénommée Z._______.
En cours de procédure, il est apparu que les intéressés avaient tenté
en vain d'obtenir l'asile en Allemagne en mai 1994, et que le père
s'était rendu seul dans ce pays en 1996 et en 1997 dans le même but,
sans plus de succès.
Entendus le 5 février 1999 par l'Office genevois de la population (ci-
après : OCP), les requérants ont notamment révélé leur véritable
identité et ont précisé que de 1996 à 1998, la famille avait vécu à Kiev.
Par décision du 31 mars 1999, l'Office fédéral des réfugiés
(actuellement et ci-après : ODM) a rejeté la demande d'asile de la
famille H._______ et a ordonné son renvoi de Suisse ainsi que
l'exécution de cette mesure. Ce prononcé a été confirmé sur recours
par la Commission suisse de recours en matière d'asile (ci-après : la
CRA) le 12 août 1999, puis, en procédure extraordinaire de révision,
les 6 décembre 1999 et 14 février 2000. En outre, le 3 juillet 2000,
l'ODM a refusé de reconsidérer sa décision.
La famille H._______ a été refoulée vers l'Ukraine le 29 septembre
2000.
B.
Le 11 mai 2005, les intéressés ont déposé auprès de l'OCP, par le
biais de leur conseil, une demande d'autorisation de séjour pour cas
personnel d'extrême gravité. Ils ont allégué que ne pouvant se faire à
la vie en Ukraine, ils avaient quitté ce pays pour revenir
clandestinement à Genève en septembre 2001. Ils ont soutenu qu'ils
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ne pouvaient repartir en Arménie sans mettre en danger la vie
d'AH._______, et qu'un retour en Ukraine n'était pas envisageable
pour BH._______, laquelle, d'origine ukrainienne, ne pouvait réintégrer
la vie familiale ou sociale de ce pays après avoir épousé un arménien.
Ils se sont prévalu de leur intégration, des emplois exercés par les
époux précités afin d'assurer l'autonomie financière de la famille et de
la maîtrise du français acquise par les enfants, qui s'étaient créé un
réseau social dense et avaient "vécu leur pré-adolescence, adolescence
et le début de l'âge adulte à Genève". Ils ont joint divers documents à leur
demande.
Par la suite, les intéressés ont produit de nombreuses pièces relatives
aux emplois occupés en Suisse, les curriculum vitae du père et des
trois enfants, des documents relatifs au parcours scolaire de ces
derniers à Genève, des lettres de soutien ainsi que des copies de
leurs passeports ukrainiens – obtenus pour Monsieur en 1997 et pour
le reste de sa famille en 2002 – sur lesquels leurs noms étaient
KY._______, LY._______, MY._______, NY._______ et OY._______.
C. Les intéressés ont tous été entendus par l'OCP le 30 janvier 2007
(à noter toutefois que la première page du procès-verbal d'audition de
EH._______ ne figure pas au dossier).
En substance, il est ressorti qu'à leur arrivée en Ukraine en septembre
2000, AH._______ avait tout d'abord subvenu aux besoins de la
famille en travaillant comme "représentant pour la vente au détail de
produits alimentaires" durant six mois, puis s'était lancé, avec son fils,
dans un commerce de confiserie qui avait duré quatre mois, faute de
rentabilité. Les intéressés ont ajouté qu'au cours de cette période, les
enfants n'avaient pas fréquenté d'établissement scolaire, que Madame
n'avait pas occupé d'emploi, et qu'au vu de leurs origines étrangères,
ils avaient non seulement fait l'objet de nombreux contrôles de la part
de la police ukrainienne mais s'étaient, de plus, vu extorquer de
l'argent par les forces de l'ordre et la mafia locale. Ils ont indiqué
qu'AH._______ avait quitté l'Ukraine pour la Suisse, où il était arrivé le
21 septembre 2001, par crainte que des renseignements ne fussent
pris sur son compte en Arménie et qu'il n'y fût renvoyé, que sa femme
et leur fille EH._______ l'avaient rejoint à Genève le 14 novembre
2002 et qu'IH._______ et DH._______ – lequel avait travaillé comme
gardien d'immeuble après le départ de son père – avaient, quant à
eux, regagné la Suisse le 5 septembre 2003. Ils ont déclaré qu'ils ne
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voulaient pas retourner en Arménie compte tenu des dangers qu'y
encourrait AH._______, et qu'ils n'envisageaient pas non plus de
repartir en Ukraine, où la vie avait été très dure et où le prénommé
ferait certainement l'objet d'interrogatoires aboutissant à un renvoi en
Arménie ; ils ont souligné que les enfants H._______ bénéficieraient,
dans tous les cas, de meilleures perspectives d'avenir en Suisse. Ils
ont précisé que les époux H._______ étaient sans emploi pour le
moment (bien qu'ils eussent travaillé auparavant, lui comme cuisinier
et elle dans un bar), que depuis son retour à Genève, IH._______
avait oeuvré en tant que serveuse, garde d'enfants et vendeuse et
suivait désormais une formation de sertisseuse, que DH._______
s'était également lancé dans la filière du sertissage après avoir dans
un premier temps été actif en tant que déménageur, et qu'après deux
ans d'études, EH._______ avait obtenu un diplôme de coiffeuse,
métier qu'elle exerçait depuis lors. Ils ont exposé que les parents ainsi
que les quatre frères et soeurs d'AH._______ vivaient en Arménie
dans la précarité, que celui-ci leur téléphonait occasionnellement et
qu'il possédait encore un cousin à Kiev ; en outre, ils ont expliqué que
la mère (retraitée), le demi-frère (artisan selon IH._______,
manoeuvre aux dires de DH._______) et la demi-soeur (cultivatrice)
de BH._______ – laquelle n'avait pas de famille en Ukraine –
habitaient à X._______ en Arménie et que des contacts fréquents
étaient maintenus avec eux, notamment par les enfants H._______.
Les requérants ont relevé qu'ils n'avaient aucune parenté en territoire
helvétique et qu'ils étaient en bonne santé. Enfin, AH._______ a
souligné que ses enfants avaient "toujours bien étudié" en Suisse et
qu'ils s'y sentaient en sécurité, sentiment qu'il partageait.
D.
Entendus le 26 septembre 2007, les enfants H._______ ont déclaré
que leur famille partageait toujours le même toit, qu'IH._______
continuait son apprentissage de sertisseuse, que DH._______ avait
été embauché – preuve à l'appui – en tant que sertisseur, et que
EH._______ n'avait momentanément pas d'emploi.
E.
Par courrier du 25 octobre 2007, l'OCP a informé les requérants qu'il
préavisait favorablement leur requête, sous réserve de l'approbation
de l'ODM.
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F.
A la requête dudit office, AH._______ a été à nouveau auditionné par
l'OCP le 13 août 2008. Il a déclaré que sa famille vivait toujours réunie
sous le même toit, que lui-même, sa fille aînée et son fils travaillaient
comme sertisseurs, que sa fille cadette était employée comme
coiffeuse et que sa femme n'exerçait aucune activité lucrative.
G.
Le 2 février 2009, l'ODM a informé les requérants qu'il envisageait de
ne pas les exempter des mesures de limitation au sens de l'art. 13 let.
f de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers
(OLE, RO 1986 1791) et leur a donné la possibilité de se déterminer.
Dans leurs observations du 23 février 2009, les intéressés se sont
prévalus de la durée de leur séjour en Suisse. Ils ont relevé qu'ils
n'avaient jamais eu recours à l'aide sociale et qu'hormis BH._______,
tous exerçaient une activité lucrative. Ils ont excipé de leur intégration
à Genève et de leur maîtrise du français. Ils ont expliqué que malgré
leur nationalité ukrainienne, ils ne pourraient retourner dans ce pays
suite à l'insuccès de leur premier séjour. Ils ont demandé à être
entendus personnellement et ont versé en cause de nombreuses
pièces ainsi que des lettres de soutien.
Complétant leurs déterminations sous la plume d'un nouveau
mandataire le 3 avril 2009, ils ont fait valoir qu'ils ne pourraient se
réadapter en cas de retour en Arménie ou en Ukraine, dès lors qu'ils
n'avaient plus de liens avec le premier de ces pays et qu'ils n'avaient
jamais réussi à se créer de réelles attaches avec le second, dont, du
reste, ils ne maîtrisaient pas la langue. Ils ont allégué que les enfants
H._______ avaient noué des liens socioculturels particulièrement
étroits avec la Suisse puisqu'ils y avaient vécu l'essentiel de leur
adolescence ainsi que leur entrée dans l'âge adulte. Ils ont invoqué
qu'AH._______, IH._______ et DH._______ s'étaient spécialisés dans
le sertissage de luxe, compétences qu'ils ne pourraient mettre en
pratique qu'en Suisse, et que DH._______ était particulièrement
apprécié de son employeur. A l'appui de leurs allégués, ils ont
notamment produit des documents relatifs à leur parcours
professionnel.
H.
Par quatre décisions distinctes datées du 11 mai 2009, l'ODM a refusé
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d'excepter les époux H._______ et leurs trois enfants des mesures de
limitation. S'agissant du couple précité, ledit office a tout d'abord
considéré que les intéressés, qui avaient délibérément enfreint les
prescriptions de police des étrangers, ne pouvaient se prévaloir ni d'un
comportement irréprochable, ni d'un séjour régulier en Suisse et ne
pouvaient, dès lors, invoquer les inconvénients résultant d'une
situation dont ils étaient en grande partie responsables pour
revendiquer l'octroi d'un titre de séjour durable dans ce pays. Il a
estimé que les circonstances du retour des intéressés en territoire
helvétique n'étaient pas clairement établies et que la durée de leur
séjour – qui ne revêtait pas un caractère déterminant – devait être
relativisée par rapport aux nombreuses années passées dans leur
pays d'origine, cela d'autant qu'AH._______ ne pouvait se prévaloir
d'un intégration socioprofessionnelle particulièrement marquée. L'ODM
a relevé que les époux susmentionnés n'avaient pas de liens
particulièrement étroits avec la Suisse tandis qu'ils conservaient des
attaches avec l'Arménie. Concernant les enfants H._______, l'ODM a
retenu que ceux-ci ne pouvaient se prévaloir d'un séjour régulier en
Suisse, que les circonstances de leur retour dans ce pays n'étaient
pas clairement établies et que la durée de leur séjour en territoire
helvétique n'était pas décisive, dès lors que les années déterminantes
de leur existence avaient été passées en Arménie et en Ukraine. Il a
considéré que les intéressés n'avaient pas d'attaches particulièrement
étroites avec la Suisse et n'y avaient pas atteint un niveau de
formation tel qu'un départ de ce pays ne pût être exigé. Il a estimé
que, les trois enfants étant majeurs, leur départ du pays n'engendrerait
pas d'obstacles insurmontables.
I.
Le 8 mai 2009, DH._______ s'est inscrit auprès de l'Office genevois
de l'emploi (ci-après : OCE) pour un droit à l'indemnité de chômage.
J.
Par actes du 12 juin 2009, la famille H._______ – agissant par un
nouveau mandataire – a recouru à l'encontre des décisions de l'ODM
précitées, concluant à leur annulation et à l'octroi d'autorisations de
séjour, subsidiairement à l'approbation à l'octroi d'autorisations de
séjour. Ils ont insisté sur l'argumentation développée dans leurs
précédentes écritures. Ils ont rappelé qu'AH._______ avait rapidement
trouvé du travail dans le domaine de la restauration à son arrivée en
Suisse et que depuis le 1er juillet 2008, il exerçait le métier de
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sertisseur. Ils ont ajouté que BH._______, actuellement mère au foyer,
avait successivement été employée comme femme de chambre de
2000 à 2001 (sic), vendeuse en pharmacie et employée dans un bar
en 2005. Ils ont indiqué qu'IH._______ avait récemment perdu son
travail de sertisseuse pour des raisons conjoncturelles, à l'instar de
son frère DH._______, et que EH._______ était toujours employée
comme coiffeuse. Ils ont précisé qu'aucun membre de la famille n'avait
fait l'objet de condamnations ou de poursuites. Ils ont argué que la
durée du séjour en Suisse de requérants d'asile était susceptible
d'atténuer les exigences liées à la reconnaissance d'une situation de
détresse, et ont prétendu réaliser les critères formulés dans la
"directive de l'ODM du 1er janvier 2007 concernant l'évaluation d'un cas de
rigueur". Ils ont allégué que les époux H._______ s'étaient reconstruits
en Suisse et qu'un départ de ce pays constituerait un déchirement
pour les enfants du couple, qui ne s'étaient jamais intégrés lors de
leurs précédents séjours en Arménie ou en Ukraine. Ils ont soutenu
qu'en statuant par quatre prononcés séparés, l'ODM n'avait pas
apprécié leur situation familiale de manière globale et avait émis un
jugement erroné. Ils ont fait valoir que les décisions entreprises étaient
inopportunes. Ils ont versé en cause de nombreuses pièces
(majoritairement produites à des stades antérieurs de la procédure),
dont une lettre du 11 juin 2009 émanant de l'ex-employeur de
DH._______ et expliquant que les rapports de travail avaient pris fin
pour des motifs économiques, mais que le prénommé continuerait à
recevoir des mandats occasionnels et qu'un engagement futur n'était
pas exclu en cas de reprise du marché.
K.
Appelé à se prononcer sur les recours, l'ODM en a proposé le rejet,
par quatre préavis du 2 septembre 2009, pour les motifs invoqués
dans les prononcés querellés.
L.
Par répliques du 6 octobre 2009, les recourants ont maintenu leurs
précédents motifs et conclusions.
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Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le Tribunal
administratif fédéral (ci-après : le TAF ou le Tribunal), en vertu de l'art.
31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5
de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative
(PA, RS 172.021) prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF.
En particulier, les décisions en matière d'exception aux mesures de
limitation rendues par l'ODM – lequel constitue une unité de
l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF – sont
susceptibles de recours au TAF, qui statue définitivement (cf. art. 1 al.
2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 5 de la loi du 17 juin 2005 sur
le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110] applicable mutatis mutandis aux
exceptions aux nombres maximums).
1.2 L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la loi fédérale du 16
décembre 2005 sur les étrangers (LEtr, RS 142.20) a entraîné
l'abrogation de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et
l'établissement des étrangers (LSEE, RS 1 113), conformément à l'art.
125 LEtr, en relation avec le chiffre I de son annexe 2, ainsi que celle
de certaines ordonnances d'exécution, telle notamment l'OLE (cf. art.
91 ch. 5 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au
séjour et à l'exercice d'une activité lucrative [OASA, RS 142.201]). Dès
lors que la demande qui est l'objet de la présente procédure de
recours a été déposée avant l'entrée en vigueur de la LEtr, l'ancien
droit matériel est applicable à la présente cause, conformément à
l'art. 126 al. 1 LEtr.
1.3 En revanche, la procédure est régie par le nouveau droit,
conformément à l'art. 126 al. 2 LEtr.
A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le
TAF est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF).
1.4 Les intéressés ont qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA).
Présenté dans la forme et les délais prescrits par la loi, les recours
sont recevables (cf. art. 50 et 52 PA).
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1.5 L'ODM a rendu quatre décisions distinctes à l'endroit des
recourants, l'une concernant les époux H._______ et les trois autres
se rapportant à chacun de leurs enfants. Quoi qu'en disent les
intéressés (cf. mémoires de recours p. 11s.), ce procédé est, en soi,
admissible, attendu qu'IH._______, DH._______ et EH._______ sont
majeurs et, dès lors, normalement prêts à vivre de manière autonome
sans que leur sort ne soit nécessairement lié à celui de leurs parents
(cf. arrêt non publié du Tribunal fédéral 2A.233/1998 du 11 février 1999
consid. 3b).
Il demeure que les membres de la famille H._______, qui n'ont pas
d'intérêts contradictoires commandant un prononcé séparé, ont
interjeté recours au TAF par quatre mémoires au contenu identique. Vu
l'étroite connexité des affaires, qui portent sur un même contexte de
faits au sein d'une famille faisant ménage commun et soulèvent des
questions juridiques similaires, il se justifie, pour des raisons
d'économie de procédure, de joindre les quatre causes et de statuer
en un seul et même arrêt (cf. art. 4 PA en relation avec l'art. 24 de la
loi fédérale de procédure civile du 4 décembre 1947 [PCF, RS 273] ;
cf. ATF 131 V 59 consid. 1 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 1P.779/2006 /
1P.795/2006 du 6 février 2007 consid. 2 ; cf. FRITZ GYGI,
Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd., Berne 1983, p. 63).
2.
Les recourants peuvent invoquer devant le Tribunal la violation du droit
fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la
constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que
l'inopportunité de la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité
cantonale a statué comme autorité de recours (cf. art. 49 PA). A teneur
de l'art. 62 al. 4 PA, l'autorité de recours n'est pas liée par les motifs
invoqués à l'appui du recours. Aussi peut-elle admettre ou rejeter le
pourvoi pour d'autres motifs que ceux invoqués. Dans son arrêt, elle
prend en considération l'état de fait et de droit (sous réserve du ch. 1.2
ci-dessus) régnant au moment où elle statue (cf. consid. 1.2 de l'arrêt
du Tribunal fédéral 2A.451/2002 du 28 mars 2003, partiellement publié
in ATF 129 II 215).
3.
Il importe de rappeler à titre liminaire que le TAF ne peut examiner que
les rapports de droit sur lesquels l'autorité administrative compétente
s'est prononcée sous la forme d'une décision, laquelle détermine
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l'objet de la contestation (cf. ATF 131 II 200 consid. 3 ; 130 V 138
consid. 2.1 et Jurisprudence des autorités administratives de la
Confédération [JAAC] 69.6 ; cf. ANDRÉ GRISEL, Traité de droit
administratif, Neuchâtel, 1984, tome II, p.933 ; FRITZ GYGI,
Verwaltungsrecht, Berne 1986, p. 123ss). Par conséquent, l'objet du
litige est en l'espèce limité au seul bien-fondé ou non du refus
d'exception aux mesures de limitation prononcé par l'ODM à l'encontre
des recourants le 11 mai 2009. Partant, les conclusions de ces
derniers tendant à l'octroi – subsidiairement à l'approbation à l'octroi –
d'autorisations de séjour sont irrecevables.
4.
4.1 Selon l'art. 13 let. f OLE, ne sont pas comptés dans les nombres
maximums les étrangers qui obtiennent une autorisation de séjour
dans un cas personnel d'extrême gravité ou en raison de
considérations de politique générale.
4.2 En cette matière, ni l'ODM, ni a fortiori le TAF, ne sont liés par
l'appréciation émise par l'OCP dans son préavis du 25 octobre 2007.
En effet, en vertu de la réglementation au sujet de la répartition des
compétences en matière de police des étrangers entre la
Confédération et les cantons, si ces derniers doivent se prononcer au
préalable sur la délivrance des autorisations de séjour hors contingent,
la compétence décisionnelle en matière de dérogations aux conditions
d'admission au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEtr, et jusqu'au 31
décembre 2007 en matière d'exceptions aux mesures de limitation au
sens de l'art. 13 let. f OLE, appartient toutefois à la Confédération,
plus particulièrement à l'ODM (cf. art. 40 al. 1 et 99 LEtr en relation
avec l'art. 85 OASA, voir également à cet égard le chiffre 1.3.2 des
Directives et Commentaires de l'ODM, en ligne sur le site de l'ODM >
Thèmes > Bases légales > Directives et commentaires > Domaine des
étrangers > Procédure et compétence ; ATF 119 Ib 33 consid. 3a
p. 39, traduit en français dans Journal des Tribunaux [JdT] 1995 I 226
consid. 3a p. 230 ; PETER KOTTUSCH, Das Ermessen der kantonalen
Fremdenpolizei und seine Schranken, Schweizerisches Zentralblatt für
Staats- und Verwaltungsrecht [ZBl] 91/1990 p. 155, valable mutatis
mutandis pour le nouveau droit) et au TAF, en vertu de l'effet dévolutif
du recours (cf. art. 54 PA).
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5.
5.1 L'art. 13 let. f OLE, qui prévoit une exception aux mesures de
limitation du nombre des étrangers, a pour but de faciliter la présence
en Suisse d'étrangers qui, en principe, seraient soumis au
contingentement des autorisations de séjour, mais pour lesquels
l'assujettissement aux nombres maximums fixés par le Conseil fédéral
apparaît trop rigoureux par rapport aux circonstances particulières de
leur cas.
5.2 Il découle de la formulation de l'art. 13 let. f OLE que cette
disposition dérogatoire présente un caractère exceptionnel et que les
conditions pour une reconnaissance d'un cas de rigueur doivent être
appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l'étranger
concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela
signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles
applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause
de manière accrue, c'est-à-dire que le refus de soustraire l'intéressé
aux restrictions des nombres maximums comporte pour lui de graves
conséquences. Lors de l'appréciation du cas d'extrême gravité, il y a
lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas
particulier. La reconnaissance d'un tel cas n'implique pas forcément
que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour
échapper à une situation de détresse. D'un autre côté, le fait que
l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période,
qu'il s'y soit bien intégré socialement et professionnellement et que
son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui
seul, à constituer un cas d'extrême gravité ; il faut encore que sa
relation avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger qu'il aille
vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine. A cet
égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage que le
requérant a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement
pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une
exemption des mesures de limitation du nombre des étrangers (cf.
ATAF 2007/45 consid. 4.2 p. 589/590 ainsi que jurisprudence et
doctrine citées).
5.3 Dans sa jurisprudence constante, le Tribunal fédéral a considéré
qu'un séjour régulier en Suisse d'une durée de sept à huit ans et une
intégration normale ne suffisaient pas, à eux seuls, pour qu'un
ressortissant étranger - qui s'est toujours bien comporté - puisse
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obtenir une exemption des nombres maximums fixés par le Conseil
fédéral (cf. ATF 124 II 110, consid. 3 ; ALAIN WURZBURGER, La
jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des
étrangers, Revue de droit administratif et fiscal [RDAF] I 1997 p. 295 et
références citées).
5.4 Un séjour effectué en Suisse sans autorisation idoine, illégal ou
précaire, ne saurait être considéré comme un élément constitutif d'un
cas personnel d'extrême gravité au sens de l'art. 13 let. f OLE. Sinon,
l'obstination à violer la législation en vigueur serait en quelque sorte
récompensée. Dès lors, il appartient à l'autorité compétente
d'examiner si l'étranger se trouve pour d'autres raisons dans un état
de détresse justifiant de l'excepter des mesures de limitation du
nombre des étrangers. Pour cela, il y a lieu de se fonder notamment
sur les relations familiales de l'intéressé en Suisse et dans sa patrie,
sur son état de santé, sur sa situation professionnelle, sur son
intégration sociale (cf. ATAF 2007/45 consid. 6.3 p. 593 et
ATAF 2007/16 consid. 5.4 p. 196s. et jurisprudence citée).
5.5 Lorsqu'une famille demande à être exemptée des mesures de
limitation du nombre des étrangers au sens de l'art. 13 let. f OLE, la
situation de chacun de ses membres ne doit en principe pas être
considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global,
car le sort de la famille forme en général un tout. Ainsi, si le problème
des enfants représente un aspect, certes important, de la situation de
la famille, il ne constitue pas le seul critère à prendre en considération.
Il convient bien plus de porter une appréciation d'ensemble, tenant
compte de la situation de tous les membres de la famille (notamment
de la durée du séjour, de l'intégration professionnelle des parents et
scolaire des enfants ; cf. ATAF 2007/16 consid. 5.4 p. 196s. et
jurisprudence citée).
D'une manière générale, l'enfant qui a passé les premières années de
sa vie en Suisse et y a commencé sa scolarité, reste encore attaché
dans une large mesure à son pays d'origine par le biais de ses
parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas
si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un
déracinement complet (ATAF 2007/16 consid. 5.3 p. 196). Avec la
scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Il convient dans
cette perspective de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son
arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des
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efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la
scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans
le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle
commencées en Suisse. Un retour au pays d'origine peut en particulier
représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi
l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons
résultats. L'adolescence est en effet une période essentielle du
développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant une
intégration accrue dans un milieu déterminé (cf. arrêt du Tribunal
administratif fédéral C-3346/2007 du 17 août 2009 consid. 4.5 et
jurisprudence citée). Cette pratique différenciée réalise la prise en
compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par
l'art. 3 al. 1 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de
l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE, RS 0.107), entrée en vigueur
pour la Suisse le 26 mars 1997 (cf. arrêt du Tribunal fédéral
2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3).
6.
Les recourants se sont référés, dans leurs mémoires de recours, aux
critères énumérés dans la circulaire du 21 décembre 2001, révisée le
8 octobre 2004 et pour la dernière fois le 21 décembre 2006, relative à
la pratique de l'ODM concernant la réglementation du séjour des
étrangers dans les cas personnels d'extrême gravité (cf. mémoires de
recours p. 9s.).
Selon la doctrine et la jurisprudence, les directives et circulaires de
l'administration, si elles visent à assurer l'application uniforme de
certaines dispositions légales, n'ont pas force de loi et ne lient ni les
administrés, ni les tribunaux. Elles ne peuvent sortir du cadre fixé par
la norme supérieure dont elles ne sont qu'une concrétisation. En
d'autres termes, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui
découle de la législation ou de la jurisprudence. Elles ne dispensent
pas non plus l'administration de se prononcer à la lumière des
circonstances du cas d'espèce (ATAF 2007/16 consid. 6.2 p. 197 et réf.
citées).
La circulaire révisée du 21 décembre 2001, adressée en priorité aux
autorités cantonales de police des étrangers, énonce les conditions
générales qu'il convient d'examiner dans l'application de l'art. 13 let. f
OLE pour les personnes dont le séjour en Suisse n'est pas régulier, en
rappelant la pratique en vigueur et en citant l'essentiel de la
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jurisprudence développée jusqu'alors par le Tribunal fédéral dans le
cadre des recours dont il avait à connaître, compétence aujourd'hui
déchue (cf. ATAF 2007/16 consid. 6.3 et arrêt cité). En particulier, elle
ne pose aucun principe selon lequel un séjour de quatre ans au moins
et une bonne intégration en Suisse entraîneraient obligatoirement
l'application de l'art. 13 let. f OLE (cf. arrêt du Tribunal administratif
fédéral C-376/2006 du 9 février 2009 consid. 7.2).
Aussi les intéressés ne peuvent-ils tirer aucun avantage de cette
circulaire.
7.
In casu, l'examen du dossier révèle que la famille H._______ a, dans
un premier temps, vécu en Suisse du 19 septembre 1998 jusqu'au 29
septembre 2000, date de leur renvoi suite au rejet définitif de leur
demande d'asile. L'on ne saurait accorder un poids déterminant à ce
premier séjour, même s'il s'est pour l'essentiel déroulé conformément
à la loi, dès lors qu'il a été suivi d'un départ pour l'Ukraine qui a causé
une véritable rupture (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.615/2005 du 14
mars 2006 consid. 4) et que ce renvoi n'est autre que la conséquence
légale du rejet de la demande d'asile prononcé le 31 mars 1999 et
confirmé sur recours le 12 août 1999 (cf. arrêt du Tribunal administratif
fédéral C-227/2006 du 19 juin 2009 consid. 7).
Dans un second temps, AH._______ est revenu en Suisse le 21
septembre 2001. Sa femme et leur fille EH._______ l'ont rejoint le 14
novembre 2002. IH._______ et DH._______, eux, sont arrivés en
territoire helvétique le 5 septembre 2003. A compter de leurs retours
respectifs en Suisse, les prénommés ont vécu illégalement dans ce
pays jusqu'au dépôt de leur demande de régularisation du 11 mai
2005. Depuis lors, ils bénéficient d'une simple tolérance cantonale,
laquelle ne revêt qu'un caractère provisoire et aléatoire. Ces
circonstances ne sauraient être considérées comme constitutives d'un
cas personnel d'extrême gravité (cf. ATAF 2007/16 consid. 7 p. 198).
En tout état de cause, le simple fait pour un étranger de séjourner en
Suisse durant plusieurs années, y compris à titre légal, ne permet pas
d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent
d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles à même de justifier
l'existence d'un cas de rigueur (cf. ATAF 2007/16 consid. 7 p. 198). A
cet égard, c'est en vain que les intéressés se prévalent, dans leurs
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mémoires de recours (p. 9), d'un arrêt du Tribunal fédéral (ATF 124 II
110 consid. 3) selon lequel les critères relatifs à la reconnaissance
d'un cas de rigueur devraient être abaissés en présence de requérants
d'asile présents sur sol helvétique depuis dix ans, ayant manifesté une
conduite irréprochable, financièrement autonomes et intégrés tant au
niveau social que professionnel ; en effet, l'arrêt en question précise
expressément que dite jurisprudence ne vise que les requérants dont
la demande d'asile n'a pas été encore définitivement tranchée. Or, tel
n'est pas le cas de la famille H._______, cela depuis la décision de la
CRA du 12 août 1999.
Dans ces circonstances, les recourants ne sauraient tirer parti de la
seule durée de leur séjour en Suisse pour bénéficier d'une exception
aux mesures de limitation. Pour rappel, les intéressés se trouvent en
effet dans une situation comparable à celle de nombreux étrangers qui
sont appelés à quitter la Suisse au terme d'un séjour autorisé ou non
et qui, ne bénéficiant d'aucun traitement particulier, demeurent soumis
aux mesures de limitation.
8.
Cela étant, il convient d'examiner les critères d'évaluation qui, autres
que la seule durée du séjour en Suisse, pourraient in casu être
constitutifs d'un cas personnel d'extrême gravité.
8.1 Tel que précisé ci-avant, le fait que l'étranger ait séjourné en
Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré
socialement et professionnellement et que son comportement n'ait pas
fait l'objet de plaintes ne suffit pas à constituer un cas d'extrême
gravité (cf. consid. 5.2 ci-dessus). En effet, encore faut-il que le refus
de soustraire l'étranger aux restrictions des nombres maximums
comporte pour lui de graves conséquences. Autrement dit, il est
nécessaire que ses conditions de vie et d'existence, comparées à
celles applicables à la moyenne des étrangers, soient mises en cause
de manière accrue.
8.2 En premier lieu, le TAF relève que le comportement des intéressés
en Suisse n'est pas exempt de tout reproche. En effet, depuis leur
retour clandestin dans ce pays – respectivement en septembre 2001,
novembre 2002 et septembre 2003 – jusqu'au dépôt de leur demande
d'autorisation de séjour en mai 2005, les recourants ont séjourné et
travaillé en Suisse de manière totalement illégale. Cela étant, s'il ne
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faut pas exagérer l'importance des infractions aux prescriptions de
police des étrangers inhérentes à la condition de travailleur clandestin
(à savoir l'entrée, le séjour et le travail en Suisse sans autorisation), il
n'est néanmoins pas contradictoire de tenir compte de telles
infractions lors de l'examen d'un cas personnel d'extrême gravité (cf.
ATAF 2007/16 consid. 8.3 p. 200 et jurisprudence citée).
8.3 S'agissant de l'intégration socioprofessionnelle de la famille
H._______, force est de constater qu'elle ne revêt aucun caractère
exceptionnel – cela quand bien même les intéressés n'ont jamais fait
l'objet de condamnations ni de poursuites. En effet, bien que le TAF ne
remette nullement en cause les efforts d'intégration accomplis par les
recourants, ni les bons contacts qu'ils ont pu établir avec la population,
il ne saurait pour autant considérer que ceux-là se soient créé avec la
Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu'ils ne
puissent plus raisonnablement envisager de le quitter. Il est vrai que
les requérants ont produit de nombreuses lettres de soutien au fil de la
procédure ; toutefois, si celles-ci attestent que les intéressés ont
réussi à gagner la sympathie de leur entourage, elles ne permettent
en revanche pas de constater l'existence d'une intégration hors du
commun au tissu social helvétique. En outre, les relations de travail,
d'amitié ou de voisinage nouées durant leur séjour sur le territoire
helvétique ne sauraient non plus justifier une exception aux mesures
de limitation du nombre des étrangers.
8.4 Cela dit, il convient, dans un premier temps, d'analyser la situation
des époux H._______.
8.4.1 Sur le plan professionnel, il faut relever qu'au vu de la nature
des emplois qu'ils ont exercés en Suisse (dans le secteur de la
restauration puis du sertissage pour Monsieur, en tant que femme de
chambre, vendeuse en pharmacie puis employée dans un bar pour
Madame), AH._______ – qui, en Arménie, a étudié dans une école
hôtelière, une école professionnelle de filigrane sur bois ainsi qu'une
école militaire (en électromécanique, aviation militaire ; cf. curriculum
vitae non daté figurant au dossier cantonal) – et son épouse n'ont pas
acquis en Suisse des connaissances ou qualifications telles qu'ils ne
pourraient plus les mettre en pratique dans leur pays d'origine, ou qu'il
faille considérer qu'ils ont fait preuve d'une évolution professionnelle
remarquable en Suisse, justifiant à elle seule l'admission d'un cas de
rigueur au sens de l'art. 13 let. f OLE (cf. ATAF 2007/16 consid. 8.3 p.
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200 et jurisprudence citée). Il faut, au surplus, noter que BH._______
n'a vraisemblablement plus exercé d'activité lucrative en Suisse depuis
son emploi dans un bar débuté en 2005 – poste qu'elle avait déjà
quitté en janvier 2007 (cf. procès-verbal d'audition de la prénommée
du 30 janvier 2007 p. 2 et mémoires de recours du 12 juin 2009 p. 5).
Au demeurant, il sied de relever que contrairement aux allégués des
recourants (cf. observations du 3 avril 2009 p. 4), il n'est nullement
avéré que le métier de sertisseur ne puisse être exercé qu'en territoire
helvétique ; en effet, s'il faut admettre que cette filière est
particulièrement répandue en Suisse, rien au dossier ne prouve qu'elle
soit inexistante à l'étranger, et plus particulièrement en Arménie, voire
en Ukraine.
8.4.2 Sous un autre angle, il convient de souligner que les époux
H._______ sont arrivés en Suisse pour la première fois alors qu'ils
étaient âgés de respectivement trente-cinq et trente-quatre ans. Ainsi,
s'ils ont fui l'Arménie en 1994 et n'y sont plus retournés depuis 1996
(cf. let. A supra), il demeure que c'est dans ce pays qu'ils ont passé
toute leur jeunesse, leur adolescence et une partie importante de leur
vie d'adulte, années qui apparaissent comme essentielles pour la
formation de la personnalité et, partant pour l'intégration sociale et
culturelle (cf. ATF 123 II 125 consid. 5b/aa). Même si l'on peut
admettre, que les intéressés ont perdu une partie de leurs racines
dans ce pays du fait de leurs séjours en Allemagne, en Suisse et en
Ukraine, le TAF ne saurait toutefois considérer que dits séjours aient
été suffisamment longs pour rendre les recourants totalement
étrangers à leur pays d'origine, cela d'autant moins qu'une partie
importante de leur parenté s'y trouve, qu'ils maintiennent des contacts
avec elle (cf. procès-verbaux du 30 janvier 2007 d'AH._______ p. 3 et
de BH._______ p. 2) et qu'ils pourront donc, cas échéant, compter sur
un soutien non négligeable de la part de leurs proches présents sur
place.
8.4.3 Par ailleurs, il faut relever que les intéressés possèdent
également la nationalité ukrainienne, bien que les circonstances dans
lesquelles ils l'ont obtenue demeurent, en l'état du dossier,
relativement peu claires. Il n'en reste pas moins que les époux ont
vécu en Ukraine de 1996 à 1998, puis de septembre 2000 à
respectivement septembre 2001 et novembre 2002. Par ailleurs, il
apparaît qu'un cousin ainsi qu'un ancien compagnon d'armes
d'AH._______ vivent dans ce pays (cf. procès-verbal d'audition de
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l'intéressé du 30 janvier 2007 p. 3), et qu'à l'arrivée des recourants à
Kiev en automne 2000, ils ont réussi à y trouver un logement grâce à
l'aide d'une famille de leur connaissance (cf. procès-verbal d'audition
de BH._______ du 30 janvier 2007, p. 1). Dès lors, force est
d'admettre que les intéressés disposent d'attaches en Ukraine et qu'ils
pourraient, cas échéant, s'y réinstaller plutôt qu'en Arménie,
nonobstant les difficultés d'adaptation auxquelles il leur faudrait faire
face. Au reste, il semble douteux qu'ils aient pu vivre durant au total
près de quatre ans en Ukraine sans acquérir la moindre notion de la
langue officielle de ce pays, ainsi qu'ils l'affirment (cf. déterminations
du 3 avril 2009 p. 3). En tout état de cause, il appert qu'ils maîtrisent le
russe (cf. procès-verbaux d'audition des époux au centre
d'enregistrement de Genève du 8 octobre 1998 p. 2 et curriculum vitae
du recourant figurant au dossier cantonal), langue très répandue
principalement à l'est et au sud de l'Ukraine (cf. site internet du
Département fédéral des affaires étrangères >
Représentations > Europe > Ukraine > L'Ukraine en bref, mis à jour le
9 septembre 2009 et visité le 12 janvier 2010 ; cf. site
> Pays - zone géo > Ukraine > Présentation de
l'Ukraine, mis à jour le 2 juillet 2009 et consulté le 12 janvier 2010).
Au demeurant, le Tribunal relève qu'en l'état, il n'est pas établi que
BH._______, qui serait ukrainienne d'origine, ne pourrait s'intégrer
dans ce pays suite à son mariage avec un homme d'origine
arménienne (cf. écritures des intéressés du 11 mai 2005 p. 1). Faute
de preuve, cet élément ne saurait être retenu comme pertinent par le
Tribunal.
8.5 Il convient, à ce stade, d'analyser le présent pourvoi eu égard à la
situation des enfants H._______.
8.5.1 En premier lieu, le Tribunal constate qu'à leur arrivée en Suisse
en septembre 1998, IH._______, DH._______ et EH._______ étaient
déjà entrés dans l'adolescence, dès lors qu'ils étaient âgés de seize,
quinze et quatorze ans. S'il est indéniable que les prénommés ont par
la suite été scolarisés à Genève durant deux ans et y ont donc vécu
une partie de leur adolescence, il n'en reste pas moins qu'ils ont été
refoulés vers l'Ukraine le 29 septembre 2000 à l'âge de dix-huit, dix-
sept et seize ans, et qu'ils ne sont revenus en Suisse qu'à l'âge adulte,
alors qu'IH._______ avait atteint vingt-et-un ans, DH._______ vingt
ans et EH._______ dix-huit ans.
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Aussi, c'est à tort que les prénommés ont prétendu avoir vécu
l'essentiel de leur adolescence en Suisse (cf. mémoires de recours du
12 juin 2009 p. 4 et 11). En réalité, seuls deux ans de cette phase
cruciale pour leur intégration (cf. ATF 123 II 125 consid. 5b/aa) se sont
déroulés dans ce pays, le surplus ayant été passé en Arménie et –
surtout – en Ukraine. De surcroît, ainsi qu'il a été constaté ci-avant, le
premier séjour en Suisse des intéressés ne pèse pas aussi lourd dans
l'examen du cas personnel d'extrême gravité que si ces derniers
n'avaient jamais quitté le pays en vue de leur refoulement vers
l'Ukraine, où ils ont tout de même vécu durant respectivement deux et
trois ans (cf. consid. 7 supra).
8.5.2 Sous un autre angle, il apparaît que les intéressés sont
imprégnés des us et coutumes d'Arménie, dans la mesure où leurs
parents en sont originaires et où ils y ont eux-mêmes vécu jusqu'en
1996 – hormis un séjour en Allemagne du 25 mai 1994 au 22 mai
1995 dans le cadre d'une procédure d'asile (cf. lettre du
Bundesgrenzschutzamt de Weil am Rhein du 15 décembre 1998
figurant au dossier cantonal). De plus, ils conservent à ce jour des
contacts fréquents avec les membres de leur famille présents sur
place (cf. procès-verbaux d'audition du 30 janvier 2007 de
EH._______, p. 2, d'IH._______, p. 2 et de DH._______, p. 2). Par
ailleurs, il est révélateur qu'IH._______ et DH._______ considèrent
l'arménien comme leur langue maternelle quand bien même le dernier
nommé lirait mieux le français (cf. curriculum vitae figurant au dossier
cantonal et procès-verbal d'audition du 30 janvier 2007 de
DH._______ p. 2), et que EH._______ ait indiqué avoir une maîtrise
orale et écrite dudit idiome (cf. curriculum vitae de la jeune femme
figurant au dossier cantonal). Dès lors, il faut admettre que les
prénommés disposent encore d'attaches socioculturelles fortes avec
l'Arménie et qu'ils seraient donc à même de se réadapter à la vie dans
leur patrie.
8.5.3 Les intéressés ont également la nationalité ukrainienne, tout
comme leurs parents. Ils ont vécu dans ce pays de 1996 à 1998, puis
de septembre 2000 à novembre 2002, respectivement septembre
2003. Certes, ils n'y ont pas été scolarisés. Il n'en demeure pas moins
que c'est dans ce pays que les enfants H._______ ont passé une
partie des années de leur adolescence – période essentielle pour
l'intégration dans un milieu donné (cf. ATF 123 II 125 consid. 5b/aa) –
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et que DH._______ est entré sur le marché de l'emploi, tout d'abord
en aidant son père dans le commerce familial, puis comme gardien
d'immeuble. Par la force des choses, les intéressés se sont donc
constitué certaines attaches en Ukraine et ne sont pas étrangers aux
moeurs de ce pays. Il s'ensuit qu'ils pourraient se réadapter à la vie en
Ukraine, certes après une période d'adaptation, cela d'autant plus
qu'ils y possèdent un oncle paternel susceptible de leur apporter
quelque appui. Par ailleurs, il n'est pas vraisemblable que les enfants
H._______ aient pu habiter durant un total d'environ quatre ans en
Ukraine sans acquérir la moindre notion de la langue nationale de ce
pays ; à teneur des curriculum vitae qu'ils ont produit, il appert en
outre qu'ils parlent tous trois le russe (cf. à ce propos consid. 8.4.3
supra).
8.5.4 Par ailleurs, IH._______, DH._______ et EH._______ sont
revenus en Suisse après avoir atteint leur majorité, les deux premiers
en septembre 2003 et la troisième en novembre 2002. Depuis lors,
IH._______ a occupé divers emplois notamment en tant que serveuse,
garde d'enfants et vendeuse, avant de devenir sertisseuse – métier
qu'elle a exercé à l'entière satisfaction de ses employeurs jusqu'au
printemps 2009, moment auquel elle a été licenciée pour raisons
économiques (cf. mémoires du 12 juin 2009 p. 5). S'agissant de
DH._______, il a dans un premier temps oeuvré comme déménageur
et comme ouvrier agricole, puis s'est lui aussi lancé dans le sertissage
avec un certain succès (cf. attestations de travail des 23 février et 1er
avril 2009 produites le 3 avril 2009). A l'instar de sa soeur, il a perdu
son emploi au printemps 2009 pour des motifs conjoncturels (cf. ibid,
p. 5s.) et s'est inscrit au chômage en mai 2009. EH._______, quant à
elle, a obtenu un diplôme de coiffeuse en janvier 2005, métier qu'elle
exerce à ce jour. Au vu de ces éléments, force est d'admettre que
malgré leurs efforts méritoires, les enfants H._______ ne peuvent se
prévaloir d'un processus d'intégration professionnelle particulièrement
marqué (cf. ATAF 2007/16 consid. 8.3 p. 200 et jurisprudence citée).
Compte tenu des compétences acquises en Suisse et de la capacité
d'adaptation dont ils ont fait preuve au cours de leur existence, tout
porte à croire qu'ils pourront mettre à profit l'expérience obtenue en
territoire helvétique en cas de retour en Arménie ou en Ukraine. En ce
qui concerne plus particulièrement les compétences développées
dans le domaine du sertissage, il est renvoyé aux considérations
émises sous chiffre 8.4.1 supra.
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8.5.5 Aussi, s'il n'est pas contesté que les intéressés ont noué des
liens avec la Suisse, ceux-ci ne sauraient, à eux seuls, suffire à les
exempter des mesures de limitation.
9.
Les recourants font valoir qu'AH._______ risquerait sa vie en cas de
retour en Arménie, dès lors qu'il y serait toujours recherché suite à son
passé au sein de Z._______. En outre, ils soutiennent avoir été
"persécutés" par les forces de l'ordre ukrainiennes et la mafia locale (cf.
mémoires du 12 juin 2009 p. 3).
Ces allégations – qui ne sont, du reste, nullement établies – n'ont pas
à être examinées dans le cadre de la présente procédure. En effet,
l'ODM et la CRA ont estimé en procédure d'asile que les prétendus
risques encourus par AH._______ en Arménie n'étaient pas
vraisemblables et ne justifiaient ni d'octroyer la qualité de réfugié à la
famille H._______, ni de ne pas exécuter leur renvoi (cf. let. A supra).
Au demeurant, la reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité
ne tend pas à protéger l'étranger contre les conséquences des abus
des autorités étatiques, ni contre les actes de particuliers. (cf. ATAF
2007/44 consid. 5.3 p. 583 et jurisprudence citée).
10.
Le Tribunal n'ignore pas que le retour des recourants en Arménie ou
en Ukraine ne sera pas exempt de difficultés. Rien ne permet toutefois
d'affirmer que ces difficultés seraient plus graves pour eux que pour
n'importe lequel de leurs concitoyens appelé à quitter la Suisse au
terme de son séjour dans ce pays, ou que leur situation serait sans
commune mesure avec celle que connaissent leurs compatriotes
restés sur place.
Au reste, c'est en vain que les recourants invoquent les conditions de
vie précaires régnant en Arménie ou en Ukraine, ou le fait que les
enfants H._______ auraient des perspectives d'avenir meilleures en
Suisse que dans l'une de leurs deux patries (cf. let. C supra). En effet,
une exemption des nombres maximums fixés par le Conseil fédéral n'a
pas pour but de soustraire un ressortissant étranger aux conditions de
vie de son pays d'origine, mais implique que celui-ci se trouve
personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait
exiger de lui, compte tenu notamment de l'intensité des liens qu'il a
noués avec la Suisse, qu'il tente de se réadapter à son existence
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passée. Dans ce contexte, on ne saurait tenir compte des
circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou
scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place,
auxquelles la personne concernée sera également exposée à son
retour, sauf si celle-ci allègue d'importantes difficultés concrètes
propres à son cas particulier (telles une maladie grave ne pouvant être
soignée qu'en Suisse, par exemple), ce qui n'est pas le cas en
l'espèce (cf. ATAF 2007/16 consid. 10 p. 201).
11.
En définitive, l'examen de l'ensemble des éléments de la présente
cause amène le Tribunal à la conclusion que les recourants ne se
trouvent pas dans une situation d'extrême gravité au sens de l'art. 13
let. f OLE.
Il s'ensuite que, par ses décisions du 11 mai 2009, l'ODM n'a ni violé
le droit fédéral, ni constaté des faits pertinents de manière inexacte ou
incomplète ; en outre, la décision attaquée n'est pas inopportune (cf.
art. 49 PA).
En conséquence, les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont
recevables.
12.
Vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la
charge des recourants (cf. art. 63 al. 1 PA et art. 1 à 3 du règlement du
21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le
Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]).
(dispositif page suivante)
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Les causes C-3815/2009, C-3816/2009, C-3817/2009 et C-3818/2009
sont jointes.
2.
Les recours sont rejetés dans la mesure où ils sont recevables.
3.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 1400.-, sont mis à la
charge des recourants. Ce montant est compensé par les avances de
frais versées le 3 août 2009, d'un montant de Fr. 350.- chacune.
4.
Le présent arrêt est adressé :
- aux recourants (recommandé) ;
- à l'autorité inférieure (avec dossiers [...] en retour)
- à l'Office genevois de la population, en copie pour information, avec
dossiers cantonaux en retour.
Le président du collège : La greffière :
Jean-Daniel Dubey Susana Carvalho
Expédition :
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