C-3424/2009 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - réexamen en matière d'exception aux mesures de lim...
Karar Dilini Çevir:
C-3424/2009 - Abteilung III - Cas individuels d'une extrême gravité - réexamen en matière d'exception aux mesures de lim...
Cour III
C-3424/2009/
{T 0/2}
A r r ê t d u 2 5 m a i 2 0 1 0
Blaise Vuille (président du collège),
Marianne Teuscher, Elena Avenati-Carpani, juges,
Alain Renz, greffier.
1. X._______,
2. Y._______,
3. Z._______,
recourants,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Réexamen en matière d'exception aux mesures de
limitation, dérogations aux conditions d'admission.
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
C-3424/2009
Faits :
A.
Le 26 novembre 1998, X._______, née le 24 novembre 1969, est
entrée en Suisse avec son enfant, Y._______, né le 18 décembre
1994, afin de rejoindre leur époux et père, U._______, qui y séjournait
illégalement.
Le 4 avril 2003, X._______ et son époux ont sollicité après du Service
de la population du canton de Vaud (ci-après SPOP-VD) la
régularisation de leurs conditions de séjour. Le 8 août 2003, le SPOP-
VD a informé les intéressés qu'il était disposé à accepter leur requête,
en précisant toutefois que cette décision était subordonnée à
l'approbation de l'Office fédéral de l'immigration, de l'intégration et de
l'émigration (IMES; actuellement ODM), auquel le dossier était
transmis pour examen sous l'angle de l'art. 13 let. f de l'ordonnance du
6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE, RO 1986
1791).
Le 8 janvier 2004, X._______ a donné naissance prématurément à sa
fille, Z._______.
Le 9 février 2004, l'IMES a informé les intéressés de son intention de
ne pas les exempter des mesures de limitation au sens de l'art. 13 let.
f OLE, tout en leur donnant préalablement la possibilité de faire part
de leurs observations dans le cadre du droit d'être entendu. Dans
leurs déterminations des 31 mars et 15 avril 2004, ces derniers ont
notamment fait valoir leur intégration et leurs attaches en Suisse, ainsi
que l'état de santé de leurs enfants, l'un présentant des séquelles
vertébrales suite à une tuberculose, l'autre nécessitant encore des
soins suite à sa naissance prématurée.
Le 18 mai 2004, l'IMES a prononcé à l'endroit de U._______, de son
épouse X._______ et de leurs deux enfants une décision de refus
d'exception aux mesures de limitation. Il a en particulier retenu que
l'époux ne pouvait pas se prévaloir d'un comportement irréprochable
en Suisse étant donné qu'ils avait délibérément enfreint les
prescriptions de police des étrangers. S'agissant du séjour en ce pays
des intéressés, l'Office fédéral a considéré que sa continuité n'avait
pas pu être étayée par des éléments probants et qu'en tout état de
cause, la durée d'un tel séjour devait de toute façon être relativisée
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par rapport aux nombreuses années que ces derniers avait passées
dans leur pays d'origine. Quant à la situation familiale des intéressés,
l'IMES a observé qu'elle ne se distinguait guère de celle de bon
nombre de leurs concitoyens connaissant les mêmes réalités dans leur
pays d'origine, en relevant en outre que les prénommés avaient
conservé des attaches étroites avec leur patrie. Enfin, l'Office fédéral a
estimé que la présence des enfants en Suisse compte tenu de leur
état de santé ne se révélait pas indispensable, au vu des pièces du
dossier, et qu'un suivi médical pouvait avoir lieu dans leur pays
d'origine.
Le recours interjeté le 18 juin 2004 contre cette décision a été déclaré
irrecevable, par décision du 30 août 2004 du Département fédéral de
justice et police.
Par courriers des 2 mai 2005 et 12 mai 2006, le SPOP-VD a imparti
aux intéressés un délai pour quitter la Suisse.
Par lettre du 7 novembre 2006, le SPOP-VD a informé l'ODM que les
intéressés devaient être considérés comme disparus, ces derniers
demeurant introuvables, et a proposé de prononcer à leur endroit une
mesure d'éloignement du territoire suisse.
Le 13 novembre 2006, l'ODM a prononcé à l'endroit d'X._______ et de
son époux une décision d'interdiction d'entrée en Suisse d'une durée
de trois ans pour infractions graves aux prescriptions de police des
étrangers (séjour et travail sans autorisation).
Par jugement du 27 juillet 2007, le divorce des intéressés a été
prononcé.
Par décision du 12 février 2008, l'ODM a annulé la décision
d'interdiction d'entrée en Suisse prononcée à l'endroit de U._______
suite au mariage de ce dernier avec une ressortissante suisse. Une
autorisation de séjour annuelle lui a alors été délivrée pour lui
permettre de vivre avec sa conjointe.
B.
Le 2 avril 2008, X._______ a sollicité auprès du SPOP-VD le
réexamen de sa demande déposée le 4 avril 2003 en faisant valoir
que, suite à son divorce, elle avait la charge de ses deux enfants et
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que sa fille, Z._______, devait intégrer une école spécialisée en raison
de son état de santé (microcéphalie avec retard de développement et
de langage). Elle a encore allégué que son fils suivait une scolarité
normale et qu'elle avait à Lausanne l'appui et le soutien nécessaires
pour s'occuper de l'éducation de ses enfants. Elle a joint à sa requête
diverses attestations scolaires et médicales.
Par courrier du 27 juin 2008, l'intéressée a encore fourni au SPOP-VD
diverses informations sur sa situation financière et sur la nature des
contacts entretenus par ses enfants avec leur père.
Par lettres des 8 et 13 août 2008 adressée au SPOP-VD, U._______ a
notamment décrit la nature des contacts entretenus avec ses enfants
et produit divers justificatifs concernant le règlement des frais de loyer
de son épouse et de la garderie de sa fille.
Le 25 septembre 2008, le SPOP-VD a informé X._______ qu'il
transmettait pour raison de compétence sa requête du 2 avril 2008 à
l'ODM, tout en en impartissant à l'intéressée un nouveau délai pour
quitter la Suisse.
Par lettre du 14 octobre 2008, X._______ a indiqué au SPOP-VD
qu'elle ne pouvait quitter la Suisse eu égard à sa situation personnelle
et aux besoins particuliers de sa fille liés à son état de santé. Par
courrier du 4 novembre 2008, le SPOP-VD a confirmé l'obligation de
l'intéressée de quitter la Suisse.
C.
Par décision du 21 avril 2009, l'ODM a rejeté la demande de réexamen
du 2 avril 2008 en constatant qu'X._______ se fondait essentiellement
sur sa nouvelle situation familiale et sur la situation personnelle de sa
fille, Z._______, et invoquait les difficultés qu'engendrerait un retour
en Equateur. L'Office fédéral, estimant que les conséquences du
divorce de l'intéressée étaient certes un fait nouveau par rapport au
prononcé du 18 mai 2004, a cependant relevé que celles-ci ne
constituaient pas un fait nouveau important susceptible de lui
permettre de modifier son appréciation du cas dans son ensemble et
de considérer que la situation générale de l'intéressée s'était modifiée
dans une mesure notable depuis le prononcé de ladite décision. Par
ailleurs, l'ODM a estimé que la situation de la fille ne constituait pas un
élément décisif permettant à lui seul de modifier sa position exprimée
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dans cette affaire. Dès lors, l'Office fédéral a conclu que la requérante
ne se trouvait pas personnellement dans une situation de rigueur telle
que son départ en Equateur avec ses enfants ne puisse être exigé.
D.
Par écrit du 26 mai 2009, régularisé le 15 juin 2009, X._______ a
interjeté recours contre la décision du 21 avril 2009. A l'appui de son
pourvoi, elle a fait un bref rappel des faits, à savoir la naissance de sa
fille en janvier 2004, le diagnostic ultérieur des médecins constatant
une microcéphalie avec un retard du développement et du langage de
cette dernière, la procédure de divorce en 2006 et le remariage de son
ancien conjoint en 2007 avec une ressortissante suisse. La recourante
a exposé les conséquences des faits précités en insistant sur les
difficultés pour le père de ses enfants d'exercer son droit de visite en
cas de renvoi en Equateur, sur ses difficultés de réintégration dans
son pays d'origine en tant que mère divorcée avec deux enfants à
charge et sur le suivi médical et les apports éducatifs nécessaires à sa
fille eu égard au handicap dont elle souffre. L'intéressée a estimé que
l'impossibilité de disposer d'un traitement médical et de mesures de
soutien pédagogique adéquats en cas de retour en Equateur était
constitutif d'un « traitement dégradant et inhumain » contraire à l'art. 3 de
la Convention du 4 novembre 1950 de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales (CEDH, RS 0.101). Dès lors,
elle a fait valoir que, contrairement à ce que soutenait l'ODM, les faits
invoqués devaient être considérés comme nouveaux et déterminants
et justifiaient le réexamen de la décision du 18 mai 2004, qui
concernait à l'époque une famille composée de deux parents unis et
d'un enfant de huit ans en bonne santé.
E.
Par courriers des 17 juin et 3 juillet 2009, la recourante a produit
plusieurs attestations et certificats récents de médecins et de la
fondation s'occupant du cas de sa fille, ainsi que deux lettres
confirmant son intégration socio-professionnelle.
F.
Appelé à se prononcer sur le recours, l'ODM en a proposé le rejet
dans son préavis du 19 août 2009.
Invitée à se déterminer sur ce préavis, la recourante, par courrier du
28 septembre 2009, a réitéré ses propos concernant le handicap de
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sa fille et le besoin impératif de soins et de mesures paramédicales
spécialisées. Elle a souligné qu'une prise en charge spécialisée n'était
pas envisageable dans sa région d'origine et qu'en cas de renvoi, sa
fille n'aurait pas accès aux soins et à l'aide nécessaires à son
développement, ce qui est contraire à l'art. 3 de la Convention du 20
novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (RS 0.107). Par ailleurs,
elle a répété que le père de ses enfants vivait désormais en Suisse et
participait activement à leur éducation, de sorte qu'en cas de renvoi de
Suisse, ses enfants ne pourraient plus bénéficier de la présence de ce
dernier et que le droit de visite serait particulièrement entravé.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le
Tribunal, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les
décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968
sur la procédure administrative (PA, RS 172.021) prises par les
autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF.
En particulier, les décisions de réexamen en matière d'exception aux
mesures de limitation rendues par l'ODM - lequel constitue une unité
de l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF - sont
susceptibles de recours au Tribunal, qui statue définitivement (cf. art. 1
al. 2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 5 de la loi du 17 juin 2005
sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110] applicable mutatis mutandis
aux exceptions aux nombres maximums).
1.2 L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la loi fédérale sur les
étrangers du 16 décembre 2005 a entraîné l'abrogation de la loi
fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des
étrangers (LSEE, RS 1 113), conformément à l'art. 125 de la loi
fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers (LEtr, RS 142.20), en
relation avec le chiffre I de son annexe 2, ainsi que celle de certaines
ordonnances d'exécution, telles que l'OLE (cf. art. 91 de l'ordonnance
du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice
d'une activité lucrative [OASA, RS 142.201]). Dès lors que la demande
de réexamen qui est à la base de la présente procédure de recours a
été déposée après l'entrée en vigueur de la LEtr, il y a lieu d'appliquer
le nouveau droit à la présente affaire (cf. dans ce sens les arrêts du
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Tribunal fédéral 2C_638/2008 du 16 octobre 2008 consid. 1 et
2C_706/2008 du 13 octobre 2008 consid. 1).
1.3 A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant
le TAF est régie par la PA (cf. art 37 LTAF).
1.4 X._______ a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Présenté
dans la forme et les délais prescrits par la loi, le recours est recevable
(cf. art. 50 et 52 PA).
1.5 La recourante peut invoquer devant le TAF la violation du droit
fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la
constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que
l'inopportunité de la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité
cantonale a statué comme autorité de recours (cf. art. 49 PA).
L'autorité de recours n'est pas liée par les motifs invoqués par les
parties (cf. art. 62 al. 4 PA), ni par les considérants de la décision
attaquée (cf. ANDRÉ MOSER, MICHEL BEUSCH ET LORENZ KNEUBÜHLER,
Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, in Handbücher für
die Anwaltspraxis, Tome X, Bâle 2008, p. 181, ad ch. 3.197). Aussi
peut-elle admettre ou rejeter le pourvoi pour d'autres motifs que ceux
invoqués. Dans son arrêt, elle prend en considération l'état de fait ou
de droit (sous réserve du ch. 1.2 ci-dessus) régnant au moment où elle
statue (cf. consid. 1.2 de l'arrêt du Tribunal fédéral 2A.451/2002 du 28
mars 2003, partiellement publié in ATF 129 II 215).
2.
Le TAF ne peut examiner que les rapports de droit sur lesquels
l'autorité inférieure s'est prononcée dans sa décision du 21 avril 2009,
laquelle détermine l'objet de la contestation (cf. ATF 131 II 200 consid.
3.2; 125 V 413 consid. 1 et 2; JAAC 67.66 consid. 6b/bb). En
conséquence, l'objet du litige se limite au seul examen du rejet de la
demande de réexamen de la recourante visant la décision du 18 mai
2004 (décision par laquelle l'Office fédéral a refusé une exception aux
mesures de limitation au sens de l'art. 13 let. f OLE en faveur de
l'intéressée et de sa famille). Les conclusions de la recourante (soit
"l'objet du litige" ou "Streitgegenstand") sont donc limitées par les
questions tranchées dans le dispositif de la décision querellée (soit
"l'objet de la contestation" ou "Anfechtungsgegenstand") et celles qui
en sortent ne sont pas recevables (cf. ATF 125 V 413 consid. 1 p.
413s., et jurisp. cit. ; KÖLZ/HÄNER, op. cit., p. 148ss ; F. GYGI, op. cit., p.
44ss ; J.-F. POUDRET, op. cit., p. 8s., n. 2.2 ; P. MOOR, Droit administratif,
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vol. II : Les actes administratifs et leur contrôle, Berne 1991, p. 438,
444 et 446s.). Dès lors, les conclusions du recours, ainsi que celles
formulées dans les observations du 28 septembre 2009, concernant
l'exécution du renvoi et l'octroi de l'admission provisoire sont
irrecevables, puisque ces questions sont extrinsèques à l'objet du
litige. Le TAF se bornera donc à examiner si c'est à raison que
l'autorité inférieure a rejeté la demande de réexamen présentée par
l'intéressée.
3.
La demande de réexamen (aussi appelée demande de nouvel examen
ou de reconsidération) – définie comme étant une requête non
soumise à des exigences de délai ou de forme, adressée à une
autorité administrative en vue de la reconsidération d'une décision
qu'elle a rendue et qui est entrée en force – n'est pas expressément
prévue par la PA (cf. ATF 109 Ib 246 consid. 4a ; Jurisprudence des
autorités administratives de la Confédération [JAAC] 63.45 consid. 3a
et références citées ; ANDRÉ GRISEL, Traité de droit administratif, vol. II,
Neuchâtel 1984, p. 947). La jurisprudence et la doctrine l'ont
cependant déduite de l'art. 66 PA, qui prévoit le droit de demander la
révision des décisions, de l'art. 8 et de l'art. 29 al. 2 de la Constitution
fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst, RS 101 ; cf.
ATF 127 I 133, consid. 6). Dans la mesure où la demande de
réexamen est un moyen de droit extraordinaire, l'autorité
administrative n'est tenue de s'en saisir qu'à certaines conditions. Tel
est le cas, selon la jurisprudence et la doctrine, lorsque le requérant
invoque l'un des motifs de révision prévus par l'art. 66 PA (notamment
une irrégularité de la procédure ayant abouti à la première décision ou
des faits, respectivement des moyens de preuve importants qu'il ne
connaissait pas lors de la première décision ou dont il ne pouvait se
prévaloir ou n'avait pas de raison de se prévaloir à l'époque), ou
lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable
depuis que la première décision a été rendue (cf. ATF 124 II 1 consid.
3a, 120 Ib 42 consid. 2b, 113 Ia 146 consid. 3a, 109 Ib 246 consid. 4a,
100 Ib 368 consid. 3 et références. citées ; JAAC 67.106 consid. 1 et
références citées, 63.45 consid. 3a, 59.28 et références. citées ; cf.
GRISEL, op. cit., vol. II, p. 947ss ; ALFRED KÖLZ/ISABELLE HÄNER,
Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes,
Zurich 1998, p. 156ss ; URSINA BEERLI-BONORAND, Die ausserordentlichen
Rechtsmittel in der Verwaltungsrechtspflege des Bundes und der
Kantone, Zurich 1985, p. 171ss, spécialement p. 179 et 185s. et
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références citées).
La procédure extraordinaire (de révision ou de réexamen) ne saurait
toutefois servir de prétexte pour remettre continuellement en question
des décisions entrées en force (ATF 127 I précité ; 120 Ib 42 consid.
2b, p. 47), ni surtout à éluder les dispositions légales sur les délais de
recours (cf. ATF 120 Ib et 109 Ib précités, ibid. ; JAAC 67.109, 63.45
consid. 3a in fine ; GRISEL, op. cit., vol. II, p. 948). Elle ne saurait non
plus viser à supprimer une erreur de droit (cf. ATF 111 Ib 209 consid. 1
in fine ; JAAC 55.2), à bénéficier d'une nouvelle interprétation ou d'une
nouvelle pratique ou encore à obtenir une nouvelle appréciation de
faits qui étaient déjà connus en procédure ordinaire (cf. ATF 98 Ia 568
consid. 5b ; JAAC 53.4 consid. 4, 53.14 consid. 4 ; BLAISE KNAPP, Précis
de droit administratif, Bâle/Francfort-sur-le-Main 1991, p. 276).
Selon la pratique en vigueur en matière de révision, applicable par
analogie à l'institution du réexamen (cf. BEERLI-BONORAND, op. cit., p.
173), les faits et moyens de preuve nouveaux au sens de l'art. 66 PA
ne peuvent entraîner la révision (respectivement la reconsidération)
d'une décision entrée en force que s'ils sont importants, c'est-à-dire de
nature à influer – ensuite d'une appréciation juridique correcte – sur
l'issue de la contestation ; cela suppose, en d'autres termes, que les
faits nouveaux soient décisifs et que les moyens de preuve offerts
soient propres à les établir (cf. ATF 122 II 17 consid. 3, 110 V 138
consid. 2, 108 V 170 consid. 1 ; JAAC 63.45 consid. 3a, 55.2 ; GRISEL,
op. cit., vol. II, p. 944 ; KÖLZ/ HÄNER, op. cit., p. 156ss ; KNAPP, op. cit., p.
276 ; FRITZ GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, Berne 1983, p.
262s. ; JEAN-FRANÇOIS POUDRET, Commentaire de la loi fédérale
d'organisation judiciaire, vol. V, Berne 1992, p. 18, 27ss et 32ss).
4.
4.1 L'intéressée fonde essentiellement sa requête de réexamen sur la
situation médicale de sa fille et le handicap dont elle souffre, ce qui
nécessite une prise en charge dans un établissement spécialisé, ainsi
que sur le changement de sa situation matrimoniale, à savoir le fait
qu'elle a divorcé de son époux et qu'elle se retrouve désormais seule
avec deux enfants à charge.
L'ODM étant entré en matière sur cette requête le 21 avril 2009 en
estimant que ces éléments constituaient des faits nouveaux, le
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Tribunal doit donc examiner si c'est à bon droit que l'autorité inférieure
a rejeté la demande de réexamen, aux motifs que les arguments
avancés ne permettaient pas de modifier son appréciation du cas dans
son ensemble.
4.2 S'agissant de l'enfant prénommée Z._______, il ressort du dossier
que cette dernière est née à Lausanne le 8 janvier 2004, soit avant le
prononcé de la décision du 18 mai 2004, mais que ce n'est que dans
le cadre du suivi d'une longue hospitalisation, à l'âge de trois mois,
qu'une microcéphalie progressive assez importante, ainsi qu'un retard
du développement du langage ont été mis en évidence (cf. certificat
médical établi le 8 juin 2006 par le Centre hospitalier universitaire
vaudois [CHUV], Département médico-chirurgical de pédiatrie). Lors
de l'établissement de ce certificat médical, les problèmes relevés ci-
avant devaient encore faire l'objet d'investigations afin d'évaluer
l'évolution du retard de langage et les mesures thérapeutiques à
mettre en oeuvre. Par attestation du 19 mars 2008, Pro Infirmis Vaud a
indiqué que le développement de l'enfant nécessitait une prise en
charge spécialisée pour lui permettre de progresser et l'aider « à
acquérir le plus d'autonomie possible et le plus de chances ». Après une
intégration dans un jardin d'enfant spécialisé, un suivi hebdomadaire
par une éducatrice du Service Educatif Itinérant du mois d'avril 2007
au mois d'août 2008 (cf. certificat de la Fondation de W._______ du 13
mai 2009) et des contrôles réguliers à l'unité de neuropédiatrie du
CHUV, l'enfant a été solarisée à la Fondation de V._______ depuis le
mois d'août 2008, à raison de cinq demi-journées par semaine, pour y
bénéficier notamment d'un traitement logopédique intensif, ainsi que
d'une prise en charge de psychomotricité (cf. certificat de la Fondation
précitée du 19 mai 2009). Selon le psychologue et la logopédiste de la
Fondation V._______ (cf. certificats des 18 et 19 mai 2009), un
enseignement spécialisé sur le long terme est absolument
indispensable, de sorte que sa scolarisation doit se poursuivre au sein
de la fondation précitée, opinion corroborée par l'unité de
neuropédiatrie du CHUV (cf. certificat du 5 juin 2009). En effet, au vu
des difficultés rencontrées par Z._______ et du retard global de son
développement, plus particulièrement sur le plan des acquisitions
langagières, il est « nécessaire de lui offrir une école avec un encadrement
qui lui apporte la stimulation et l'étayage dont elle a besoin pour son
évolution; elle a également besoin d'être soutenue dans sa socialisation ainsi
que dans son développement psychoaffectif » (cf. certificat du 19 mai
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2009), besoins qui sont apparemment satisfaits au sein de la fondation
précitée (cf. op. cit. « Daniela s'est bien adaptée à sa nouvelle école »).
4.3 S'agissant de motifs médicaux, un cas de rigueur au sens de l'art.
13 lettre f OLE peut, selon les circonstances, être reconnu lorsque
l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à la santé qui
nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des
mesures médicales ponctuelles d'urgence, indisponibles dans le pays
d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible
d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le
seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à
celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas à justifier une
exception aux mesures de limitation (cf. arrêt du Tribunal fédéral
2A.575/2006 du 19 février 2007, consid. 4.3).
Le Tribunal de céans retiendra toutefois que plus que l'aspect médical
de la situation, c'est précisément l'encadrement socio-éducatif et
psychothérapeutique de Z._______ qui est déterminant en l'espèce.
Comme cela est relevé dans le certificat médical du 5 juin 2009 de
l'unité de neuropédiatrie du CHUV, il est indispensable que l'enfant
puisse rester à l'école de la Fondation V._______ de manière à
optimiser son intégration dans le milieu scolaire et son développement.
Quant à l'ODM, il n'a pas daigné examiner plus avant la situation de
l'enfant précitée et donc n'a pas été en mesure de démontrer que
l'encadrement spécifique (sous l'angle socio-éducatif) dont a besoin
cette personne puisse être poursuivi dans de bonnes conditions dans
le pays d'origine. Dans ce sens, un éventuel départ de Suisse placerait
Z._______ dans une situation très difficile, puisque cela impliquerait
qu'elle perdrait l'encadrement institutionnel et médical dont elle
bénéfice en ce pays depuis quelques années. En tout état de cause,
un départ de Suisse dans ces conditions entraînerait sans aucun
doute pour cette dernière des conséquences néfastes sur le plan de
son développement psychique, constitutives d'une situation
personnelle d'extrême gravité (cf. dans ce sens l'arrêt du TAF C-
257/2006 du 10 décembre 2007, consid. 5.5.3).
4.3.1 Dès lors, compte tenu de ce qui précède, force est de constater
que le handicap dont souffre Z._______ et ses conséquences en cas
de retour en Equateur constituent bien un fait nouveau et important au
point de justifier à eux seuls déjà la reconsidération de la décision du
18 mai 2004.
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4.3.2 A cela s'ajoute que le changement de la situation matrimoniale
de la recourante constitue lui aussi un fait nouveau qui n'est pas sans
importance dans le contexte de la présente affaire. En effet, la
situation de l'intéressée à l'époque de la décision de l'ODM, le 18 mai
2004, à savoir le fait d'être mariée avec deux enfants dont la charge
était assumée conjointement par les deux membres du couple, diffère
grandement de la situation actuelle, à savoir le fait d'être divorcée avec
deux enfants à charge, dont l'une grandement handicapée. Toutefois,
l'ODM s'est contenté d'écarter cet élément sans examen. Il en va de
même des questions relatives aux liens entretenus par les enfants
avec leur père (exercice du droit de visite) et les conséquences
qu'entraînerait pour les premiers un retour en Equateur, conséquences
qui n'ont pas été abordées par l'autorité inférieure, alors que ces
éléments avaient pourtant été mentionnés dans le cadre de la
demande de réexamen (cf. courriers des 27 juin et 8 août 2008).
Cependant, dans la mesure où, comme relevé ci-avant, la décision
querellée doit déjà être reconsidérée pour le motif cité au considérant
4.3, le Tribunal renonce à examiner plus en détail ces motifs.
4.3.3 Aussi, vu les circonstances prises dans leur globalité, il peut être
dérogé aux conditions d'admission afin de tenir compte des cas
individuels d'une extrême gravité que constitue la situation de la
recourante et de ses enfants.
5.
En conséquence, la décision attaquée n'est pas conforme au droit
fédéral.
Le recours doit être admis, dans la mesure où il est recevable (cf.
consid. 2), la décision attaquée annulée et il est dérogé aux conditions
d'admission en faveur de la recourante et de ses deux enfants (cf. art.
30 al. 1 let. b LEtr, qui reprend le contenu de l'art. 13 let. f OLE).
Bien qu'elle succombe, l'autorité inférieure n'a pas à supporter de frais
de procédure (art. 63 al. 2 PA).
Obtenant gain de cause, la recourante n'a pas à supporter de frais de
procédure (art. 63 al. 1 a contrario et al. 3 PA). Par ailleurs, il ne se
justifie pas d'allouer de dépens, dès lors que l'intéressée a agi seule
dans la présente cause (cf. ATF 113 Ib 357 consid. 6b; Jurisprudence
des autorités administratives de la Confédération [JAAC] 68.56 consid.
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4b) et que l'on ne saurait considérer comme élevés les frais éventuels
qu'elle a eu à supporter (art. 7 al. 4 FITAF [cf. également JAAC
57.35]).
(dispositif page suivante)
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est admis, dans la mesure où il est recevable, et la
recourante et ses deux enfants sont mis au bénéfice d'une dérogation
aux conditions d'admission.
2.
Il n'est pas perçu de frais de procédure. L'avance versée le 3 août
2009, soit Fr. 700.--, sera restituée par le Tribunal.
3.
Il n'est pas alloué de dépens.
4.
Le présent arrêt est adressé :
- aux recourants (Recommandé)
- à l'autorité inférieure, avec dossier n° de réf. 4660020.3 en retour
- en copie au Service de la population du canton de Vaud, division
étrangers, pour information (annexe : dossiers VD 866525).
Le président du collège : Le greffier :
Blaise Vuille Alain Renz
Expédition :
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