C-2581/2009 - Abteilung III - Approbation d'une autorisation de séjour - refus d'autorisation d'entrée et d'approbation à l...
Karar Dilini Çevir:
C-2581/2009 - Abteilung III - Approbation d'une autorisation de séjour - refus d'autorisation d'entrée et d'approbation à l...
Cour III
C-2581/2009
{T 0/2}
A r r ê t d u 1 5 j u i l l e t 2 0 1 0
Bernard Vaudan (président du collège),
Marianne Teuscher, Antonio Imoberdorf, juges,
Cédric Steffen, greffier.
A._______,
recourante,
contre
Office fédéral des migrations (ODM),
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Refus d'autorisation d'entrée et d'approbation à l'octroi
d'une autorisation de séjour en faveur de C._______.
B u n d e s v e r w a l t u n g s g e r i c h t
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i f f é d é r a l
T r i b u n a l e a m m i n i s t r a t i v o f e d e r a l e
T r i b u n a l a d m i n i s t r a t i v f e d e r a l
Composit ion
Parties
Objet
C-2581/2009
Faits :
A.
Le 10 mai 2007, A._______, ressortissante du Burundi née le 20 juillet
1960, titulaire d'une autorisation d'établissement en Suisse, a sollicité
auprès de l'Office cantonal de la population (OCP) l'octroi d'un visa et
d'une autorisation de séjour pour ses deux nièces B._______, née le
1er décembre 1990, et C._______, née le 8 octobre 1991 [recte: 1992],
toutes deux de nationalité burundaise. Elle a exposé que les deux
jeunes filles vivaient, depuis le décès de leurs parents, avec leur
grand-mère, désormais âgée et malade. Cette dernière ne pouvait plus
s'en occuper correctement. B._______ et C._______ avaient souffert
durant la guerre, l'une d'elles ayant même subi des violences graves
dans un camp de déplacés. Leur enfance avait été bafouée et emplie
de traumatismes. Elle souhaitait pouvoir accueillir les deux jeunes pour
essayer de sauver ce qui pouvait encore l'être.
Le 23 juillet 2007, A._______ a précisé que C._______ était orpheline
de père et de mère. La grand-mère de B._______ et C._______ (mère
de l'intéressée) était régulièrement hospitalisée et les jeunes filles
souvent livrées à elles-mêmes dans un pays en proie à l'insécurité.
A._______ a dit craindre qu'après le décès de sa mère, plus personne
au Burundi ne puisse accueillir les enfants. Depuis le début de la
guerre en 1993, les survivants des membres de sa famille avaient
vécu dispersés, tantôt en camps de déplacés à l'intérieur du pays
(quatre fois) ou en camps de réfugiés en Tanzanie (à deux reprises),
tantôt dans leur propriété où des attaques et pillages avaient
également lieu.
Le 31 octobre 2007, sur requête de l'OCP, A._______ a versé au
dossier plusieurs documents, dont une "attestation" par laquelle sa
mère, qui n'était plus en mesure d'assumer la garde de B._______ et
C._______, déclarait lui avoir confié cette responsabilité.
B.
Le 14 janvier 2008, conformément aux instructions de l'OCP,
C._______ et sa cousine B._______ ont déposé une demande
d'autorisation d'entrée auprès du consulat de Suisse à Bujumbura en
vue d'un placement éducatif.
Le 6 juin 2008, l'Office de la jeunesse du canton de Genève a autorisé
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A._______ à accueillir à son domicile les mineures B._______ et
C._______. Le rapport social a établi que A._______ avait entièrement
financé la prise en charge et les études de ses nièces.
Le 3 septembre 2008, l'OCP s'est montré disposé à octroyer une
autorisation de séjour en faveur de B._______ et C._______ pour
placement éducatif auprès de leur tante. Le dossier a été transmis à
l'ODM pour approbation.
C.
Le 1er octobre 2008, l'ODM a avisé A._______ de son intention de
refuser son approbation, tout en lui donnant la possibilité de faire part
de ses observations.
Dans ses déterminations du 20 octobre 2008, A._______ a relevé que
la situation dans laquelle avaient évolué les enfants ne leur avait pas
permis d'avoir une maturité correspondant à leur âge réel. En outre,
une des filles était très traumatisée pour avoir été violée par les
militaires dans un camp de déplacés. Elle craignait que pareil drame
puisse se reproduire.
Par décision du 23 mars 2009, l'ODM a refusé d'autoriser l'entrée en
Suisse de B._______ et C._______ et a refusé son approbation à
l'octroi d'une autorisation de séjour en leur faveur pour prise de
résidence. Cet Office a retenu, en particulier, que les deux
adolescentes, qui avaient respectivement 16 et 14 ans au moment de
la demande, ne nécessitaient pas les mêmes soins que des enfants
plus jeunes et qu'elles devaient être à même de se prendre en charge.
D'autres alternatives de placement dans le pays d'origine n'avaient
pas été sérieusement étudiées. Un placement en Suisse
représenterait une épreuve supplémentaire pour les intéressées, qui
devraient s'adapter à un cadre de vie totalement nouveau.
D.
Le 22 avril 2009, A._______ a recouru contre cette décision auprès du
Tribunal administratif fédéral (ci-après: le TAF ou le Tribunal),
concluant à son annulation et à l'octroi des autorisations de séjour.
Elle a notamment soutenu qu'en dehors de la famille, le Burundi ne
connaissait aucun système social organisé. Le pays sortait de la
guerre et comptait près d'un million d'orphelins. C._______, suite à
son agression sexuelle, se trouvait dans un état de santé physique et
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morale fragile. Les deux filles, qui avaient grandi durant les années de
guerre, n'avaient pas acquis une maturité suffisante pour être
autonome. A._______ n'avait aucun autre proche au pays qui puisse
s'occuper de ses nièces. Leur placement à Genève leur permettrait de
retrouver un cadre aimant et attentionné, nécessaire à leur
reconstruction physique et psychologique.
E.
Par décision du 24 juin 2009, le TAF a constaté que B._______ avait
déjà atteint sa majorité au moment où l'ODM avait statué le 23 mars
2009, de sorte qu'un placement à des fins éducatives, destiné
uniquement aux enfants mineurs, ne pouvait entrer en ligne de
compte. Le Tribunal a radié le recours du rôle en ce qui la concernait,
mais conformément aux vœux de la recourante, a poursuivi le
traitement du dossier s'agissant de C._______.
F.
Appelé à se prononcer sur le recours, l'ODM en a proposé le rejet par
préavis du 31 juillet 2009. L'autorité inférieure a estimé qu'une
alternative de placement de C._______ existait au Burundi, où des
infrastructures destinées à accueillir des orphelins se mettaient
régulièrement en place.
Dans sa réplique du 27 août 2009, A._______ a expliqué qu'en tant
que famille proche, la responsabilité lui incombait de prendre en
charge sa nièce orpheline. Celle-ci avait été violée dans un camp et
contaminée par le SIDA. Elle suivait une trithérapie et avait besoin
d'aide et d'encadrement. Malgré son âge, elle n'était pas autonome,
son parcours n'ayant pas été favorable au développement de ses
compétences.
Le 10 septembre 2009, le TAF a ordonné un deuxième échange
d'écritures avec l'ODM. Le 29 septembre 2009, l'autorité inférieure,
après avoir constaté que le dossier ne contenait aucun certificat
médical attestant l'atteinte à la santé de C._______, s'est prononcée
pour un rejet du recours. L'ODM a ajouté que le Burundi comptait
environ 120'000 orphelins de moins de 17 ans atteints par le SIDA et
que la législation en vigueur n'avait pas pour vocation de leur
permettre de venir séjourner en Suisse s'il existait d'autres solutions
sur place. Invitée à se déterminer sur ce point, la recourante n'y a pas
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donné suite dans le délai imparti.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), le TAF, en
vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au
sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la
procédure administrative (PA, RS 172.021) prises par les autorités
mentionnées à l'art. 33 LTAF.
En particulier, les décisions en matière d'autorisation d'entrée et de
séjour en Suisse prononcées par l'ODM - lequel constitue une unité de
l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF - sont
susceptibles de recours au TAF, qui statue définitivement (cf. art. 1 al.
2 LTAF en relation avec l'art. 83 let. c ch. 1 et 2 de la loi du 17 juin
2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]).
1.2 L'entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, de la loi fédérale sur les
étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr, RS 142.20) a entraîné
l'abrogation de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et
l'établissement des étrangers (LSEE, RS 1 113), conformément à l'art.
125 LEtr, en relation avec le chiffre I de son annexe 2, ainsi que celle
de certaines ordonnances d'exécution (cf. art. 91 de l'ordonnance du
24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une
activité lucrative [OASA, RS 142.201]), telles que l'ordonnance du
6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE, RO 1986
1791), l'ordonnance du 20 avril 1983 sur la procédure d'approbation
en droit des étrangers (OPADE, RO 1983 535) et le règlement
d'exécution du 1er mars 1949 de la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement des étrangers (RSEE, RO 1949 I 232).
La demande qui est l'objet de la présente procédure de recours ayant
été initiée le 10 mai 2007, soit avant l'entrée en vigueur de la LEtr,
l'ancien droit matériel reste applicable à la présente cause,
conformément à l'art. 126 al. 1 LEtr.
1.3 En revanche, la procédure est régie par le nouveau droit (art. 126
al. 2 LEtr).
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A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le
TAF est régie par la PA (art. 37 LTAF).
1.4 A._______ a qualité pour recourir (art. 48 al. 1 PA). Présenté dans
la forme et les délais prescrits par la loi, son recours est recevable
(art. 50 et 52 PA).
2.
La recourante peut invoquer devant le TAF la violation du droit fédéral,
y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation
inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que l'inopportunité de
la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité cantonale a statué
comme autorité de recours (art. 49 PA). A teneur de l'art. 62 al. 4 PA,
l'autorité de recours n'est pas liée par les motifs invoqués à l'appui du
recours. Aussi peut-elle admettre ou rejeter le pourvoi pour d'autres
motifs que ceux invoqués. Dans sa décision, elle prend en
considération l'état de fait et de droit régnant au moment où elle
statue, sous réserve du considérant 1.2 (cf. arrêt du Tribunal fédéral
2A.451/2002 du 28 mars 2003 consid. 1.2, partiellement publié in ATF
129 II 215).
3.
L'autorité statue librement dans le cadre des prescriptions légales et
des traités avec l'étranger sur l'octroi de l'autorisation de séjour ou
d'établissement... (art. 4 LSEE). Cette liberté demeure entière quelles
que soient les dispositions prises par le requérant (art. 8 al. 2 RSEE).
4.
4.1 Selon l'art. 99 LEtr, applicable en vertu de l'art. 126 al. 2 LEtr, le
Conseil fédéral détermine les cas dans lesquels les autorisations de
courte durée, de séjour ou d'établissement sont soumises à
l'approbation de l'ODM. Celui-ci peut refuser son approbation ou
limiter la portée de la décision cantonale (cf. art. 40 al. 1 LEtr).
Conformément à l'art. 85 al. 1 let. a et b OASA, l'ODM a la
compétence d'approuver l'octroi et le renouvellement des autorisations
de séjour et de courte durée, ainsi que l'octroi de l'établissement
lorsqu'il estime qu'une procédure d'approbation est nécessaire pour
certaines catégories de personnes afin d'assurer une pratique
uniforme de la loi ou lorsqu'une procédure d'approbation se révèle
indispensable dans un cas d'espèce. Tel est en particulier le cas lors
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de placements d'enfants (cf. également > Thèmes
> Bases légales > Directives et commentaires > Domaine des
étrangers > Procédure et compétences > Procédure et répartition des
compétences, version 01.07.2009, ch. 1.3.1.2.2 let. d).
Au demeurant, ces dispositions correspondent, dans l'esprit, aux
dispositions abrogées (cf. art. 51 OLE, art. 18 al. 1 et 3 LSEE et art. 1
al. 1 let. c OPADE).
4.2 En vertu de la répartition des compétences qui prévaut dans le
cas particulier, il appartient à l'ODM d'approuver ou de refuser
l'autorisation de séjour en Suisse que l'OCP se propose de délivrer à
C._______. Il bénéficie en la matière d'une totale liberté
d'appréciation, dans le cadre des prescriptions légales et des traités
avec l'étranger (art. 4 LSEE).
Ni le TAF, ni l'ODM ne sont par conséquent liés par la position de
l'OCP du 3 septembre 2008 et peuvent parfaitement s'en écarter.
5.
5.1 Un ressortissant étranger n'a, en principe, pas un droit à la
délivrance d'une autorisation de séjour ou d'établissement, à moins
qu'il ne puisse se prévaloir d'une disposition particulière du droit
fédéral ou d'un traité accordant un tel droit (cf. ATF 135 II 1 consid. 1.1
et la jurisprudence citée).
5.2 Dans la mesure où un placement éducatif en Suisse est envisagé,
l'art. 35 OLE est seul applicable. Il s'agit là d'une disposition de nature
purement potestative, de sorte qu'un ressortissant étranger ne saurait
en déduire un droit de séjourner sur le territoire helvétique (cf. arrêt du
Tribunal fédéral 2P.18/2007 du 29 juin 2007 consid. 3.1).
6.
6.1 En vertu de l'art. 35 OLE, des autorisations de séjour peuvent être
accordées à des enfants placés si les conditions auxquelles le Code
civil suisse soumet l'accueil de ces enfants sont remplies (cf. à ce
sujet, MARC SPESCHA, Handbuch zum Ausländerrecht, Berne/Stuttgart/
Vienne 1999, p. 101s.; PETER KOTTUSCH, Die Bestimmungen über die
Begrenzung der Zahl der Ausländer, Revue suisse de jurisprudence
[RSJ/SJZ] 1998 p. 42ss, spécialement p. 44).
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6.2 A cet égard, il sied de prendre en considération, outre l'art. 316 du
Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC, RS 210), les dispositions
de l'ordonnance réglant le placement d'enfants à des fins d'entretien et
en vue de l'adoption du 19 octobre 1977 (OPEE, RS 211.222.338; cf.
NICCOLÒ RASELLI / CHRISTINA HAUSAMMANN / URS PETER MÖCKLI / DAVID
URWYLER, Ausländische Kinder sowie andere Angehörige in
Ausländerrecht, Eine umfassende Darstellung der Rechtsstellung von
Ausländerrinnen und Ausländern in der Schweiz von A(syl) bis
Z(ivilrecht), 2ème éd., PETER UEBERSAX / BEAT RUDIN / THOMAS HUGI YAR /
THOMAS GEISER [éd.], Bâle 2009, ch. 16.81, en particulier ch. 16.90ss).
L'art. 6 al. 1 OPEE précise qu'un enfant de nationalité étrangère qui a
vécu jusqu'alors à l'étranger ne peut être placé en Suisse chez des
parents nourriciers qui n'ont pas l'intention de l'adopter que s'il existe
un motif important. L'autorité doit déterminer de manière appropriée si
les conditions d'accueil sont remplies, surtout en procédant à des
visites à domicile et en prenant, s'il le faut, l'avis d'un expert (art. 7
OPEE).
En ce qui concerne le placement du mineur chez des parents
nourriciers, c'est en principe l'autorité tutélaire du lieu de placement
qui est compétente (art. 2 al. 1 ch. a OPEE). Toutefois, les cantons
peuvent charger d'autres autorités ou offices d'assumer cette tâche
(art. 2 al. 2 OPEE).
Les parents nourriciers doivent requérir l'autorisation avant d'accueillir
l'enfant (art. 8 al. 1 OPEE). L'autorité transmet à la police cantonale
des étrangers l'autorisation d'accueillir un enfant de nationalité
étrangère qui a vécu jusqu'alors à l'étranger, accompagnée de son
rapport sur la famille nourricière (art. 8a al. 1 OPEE).
Aussi, la question de savoir s'il existe un motif important au sens de
l'art. 6 al. 1 OPEE ou si les conditions liées à l'accueil des enfants sont
remplies relève de la compétence des autorités désignée à l'art. 2
OPEE. Dans le cas présent, il s'agit de l'Office de la Jeunesse du
canton de Genève, par sa section Evaluation des lieux de placement,
qui a mené son enquête et rendu un rapport détaillé sur lequel ni
l'ODM ni le TAF n'ont à se prononcer.
6.3 Dans l'examen de l'octroi d'une autorisation de séjour sur la base
de l'art. 35 OLE, les autorités de police des étrangers devront tenir
compte des intérêts moraux et économiques du pays ainsi que du
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degré de surpopulation étrangère (cf. art. 16 al. 1 LSEE et art. 8 al. 1
RSEE) et veiller à maintenir un rapport équilibré entre l'effectif de la
population suisse et celui de la population étrangère résidante (cf. art.
1 let. a OLE, ATF 122 II 1 consid. 3a).
Elles ne peuvent ainsi accueillir tous les étrangers qui désirent venir
dans ce pays, que ce soit pour des séjours de courte ou de longue
durée, et sont donc tenues d'appliquer une politique restrictive
d'admission. Confrontées de façon récurrente à des abus dans ce
domaine, les autorités helvétiques ont le devoir de s'assurer, avant de
délivrer une autorisation de séjour fondée sur l'art. 35 OLE, qu'aucune
autre solution n'a pu être trouvée dans le pays d'origine de l'enfant
placé. Il convient également de ne pas perdre de vue que l'Etat en
provenance duquel est originaire le requérant ne saurait se soustraire
aux devoirs qui lui incombent à l'égard de ses propres citoyens,
notamment en matière d'assistance et d'éducation.
6.4 Dans ce contexte, les autorités de police des étrangers, qui se
fondent sur des critères d'application qui leur sont propres, ne sont
pas liées par les décisions prises par les autorités de justice civile,
moins encore par une "attestation de droit de garde" du 9 octobre
2007, établie dans la Commune de Giteranyi, par laquelle la mère de
A._______ a "déclaré sur l'honneur, avoir confié à sa fille […] la garde de
ses petites-filles" (cf. art. 8 al. 2 RSEE; ANDRÉ GRISEL, Traité de droit
administratif, vol. I, Neuchâtel 1984, p. 180ss). En effet, l'adoption, a
fortiori l'attribution de l'autorité parentale ou du droit de garde, est une
institution de droit civil déployant ses effets en premier lieu sur le plan
civil et qui n'a pas d'effet contraignant en matière de police des
étrangers, en ce sens qu'elle ne conduit pas automatiquement à
l'octroi d'une autorisation de séjour ou d'établissement (cf. arrêt du
Tribunal administratif fédéral C-419/2006 du 5 décembre 2008 consid.
7.5 et la référence).
6.5 L'octroi d'une autorisation de séjour dans le cadre d'un placement
auprès de parents nourriciers en Suisse ne se justifiera que lorsqu'un
enfant est orphelin à la fois de père et de mère, ou qu'il a été
abandonné, ou encore que les parents sont dans l'absolue incapacité
de s'en occuper. Il faudra en outre que le placement en Suisse
demeure la solution la plus appropriée.
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7.
7.1 En l'espèce, C._______ avait 14 ans et demi au moment du dépôt
de la demande de placement éducatif. Elle est actuellement âgée de
17 ans et 9 mois. Le Tribunal n'ignore pas qu'elle a vécu une enfance
difficile, faites de déplacements, de violence et d'épreuves dans un
pays en guerre. Il n'en demeure pas moins que selon le rapport social
de l'Office de la Jeunesse du 6 juin 2008, elle a été élevée par sa
grand-mère et a toujours été scolarisée. Malgré les difficultés
auxquelles elle a été confrontée durant sa jeunesse, elle a vécu les
années déterminantes de son adolescence dans son pays d'origine.
Or, la scolarité correspondant à cette période spécifique contribue de
manière décisive à l'intégration de l'enfant dans une communauté
socioculturelle déterminée.
Le Tribunal fédéral n'a pas manqué de rappeler (dans des contextes
différents, mais face à une problématique similaire) que le
déplacement du cadre de vie d'un mineur peut constituer un véritable
déracinement pour lui et s'accompagner de grandes difficultés
d'intégration dans un nouveau pays d'accueil. C'est pourquoi, il se
justifie autant que possible de privilégier la venue en Suisse de jeunes
enfants, mieux à même de s'adapter à un nouvel environnement que
des adolescents ou des enfants proches de l'adolescence (ATF 133 II
6 consid. 3.1.1 et 5.3, 123 II 125 consid. 4b p. 130; voir également
arrêt du Tribunal fédéral 2C_507/2007 du 20 novembre 2007,
consid. 3.1, arrêt du Tribunal fédéral 2A.718/2006 du 21 mars 2007
consid. 3).
7.2 Certes, C._______ a connu un parcours chaotique et elle n'a peut-
être pas atteint un degré de maturité en rapport avec son âge. Elle a
toutefois toujours pu compter sur le soutien de sa cousine B._______,
avec qui elle a depuis son plus jeune âge partagé les vicissitudes de
l'existence. Les deux cousines, qui ont souvent été livrée à elles-
mêmes durant les phases d'hospitalisation de leur grand-mère (cf.
lettre explicative du 23 juillet 2007), ont appris ou dû apprendre à
s'organiser, à se prendre en charge et à s'entraider mutuellement dans
l'adversité. Si cette situation n'est pas idéale, le Tribunal demeure
convaincu que dans la mesure où B._______ ne peut bénéficier d'un
placement éducatif en Suisse (supra let. E), une séparation des deux
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jeunes filles, qui se considèrent comme de véritables soeurs, n'est pas
dans l'intérêt supérieur de C._______. La recourante était d'ailleurs
arrivée à une conclusion identique, jugeant dans un premier temps
qu'il n'était pas envisageable de les éloigner l'une de l'autre (cf.
rapport social du 6 juin 2008). En outre, en dépit des traumatismes
subis, les deux nièces ne sont plus des enfants: elles ont atteint un
âge où elles verront leur autonomie aller grandissante, étant rappelé
que B._______ est déjà majeure et que C._______ aura 18 ans dans
trois mois. Dans ces circonstances, le besoin d'un encadrement dans
la durée n'apparaît pas absolument nécessaire, une solution de
soutien temporaire pouvant être privilégiée.
7.3 A la lecture du mémoire de recours, il ressort que c'est également
des considérations sécuritaires qui motivent la démarche de
A._______. Elle redoute en effet qu'au vu de l'instabilité et de la
violence qui règne dans son pays d'origine, C._______ puisse à
nouveau être victime d'une agression. Ces craintes sont
compréhensibles. A l'instar de l'ODM, le Tribunal est néanmoins d'avis
que des alternatives de placement dans le pays d'origine sont
possibles, et d'autant préférables qu'au vu de l'âge de C._______, ces
solutions seront limitées dans le temps. On pense avant tout à un
séjour en internat, lequel fournirait non seulement à C._______ un
cadre stabilisant, mais lui donnerait aussi la possibilité de poursuivre
sa scolarité dans des conditions satisfaisantes. Les écoles ou lycées
couplés à un internat sont relativement nombreux au Burundi, bien
que tous les élèves n'y aient pas forcément accès, faute de moyens
financiers. C._______ ne semble cependant pas entrer dans cette
catégorie, elle qui a toujours pu compter sur la générosité de la
recourante. En outre, le fait que l'une des deux jeunes filles soit
majeure rend possible un transfert d'argent de personne à personne,
sans obligatoirement passer par un tiers qui ponctionne les sommes
envoyées depuis la Suisse avant de les acheminer à leur destinataire,
ce qui était l'un des soucis manifesté par la recourante. Au demeurant,
la venue en Suisse pour des raisons médicales ne s'impose pas non
plus, C._______, infectée par le VIH, étant au bénéfice depuis
plusieurs années d'un traitement antirétroviral au Burundi.
Aussi, en dépit du vécu tragique de C._______, le soutien de sa tante
la place dans une position plus favorable que nombre d'orphelins sans
moyens d'existence ou parrainage économique extérieur. A._______,
qui avait mis un point d'honneur à accueillir C._______ dans sa propre
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famille, n'affirme ni ne démontre qu'un placement en internat, voire en
orphelinat, d'une jeune fille de plus de 17 ans n'est pas une option
acceptable et réalisable.
8.
Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, plus particulièrement
du fait que C._______ soit proche de la majorité et qu'elle entretienne
une relation privilégiée avec sa cousine, il apparaît qu'une solution sur
place au Burundi est non seulement envisageable, mais préférable,
respectivement que toutes les possibilités de placement n'ont pas été
sérieusement étudiée ou tentées.
9.
L'autorisation de séjour n'ayant pas été délivrée, l'ODM était légitimée
à refuser l'autorisation d'entrée à C._______.
10.
Par sa décision du 23 mars 2009, l'autorité de première instance n'a
donc ni violé le droit fédéral, ni constaté des faits pertinents de
manière inexacte ou incomplète. En outre, la décision attaquée
n'apparaît pas inopportune (cf. art. 49 PA).
En conséquence, le recours est rejeté.
Vu l'issue de la cause, les frais de procédure sont mis à la charge de
la recourante (cf. art. 63 al. 1 PA et art. 1 à 3 du règlement du 21
février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le
Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]).
(dispositif page suivante)
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Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté.
2.
Les frais de procédure, de Fr. 800.--, sont mis à la charge de la
recourante. Ce montant est compensé par l'avance de frais versée le
12 mai 2009.
3.
Le présent arrêt est adressé :
- à la recourante (Recommandé)
- à l'autorité inférieure, avec dossier SYMIC 7480646.9
- en copie pour information à l'Office cantonal de la population,
Genève, avec dossier cantonal en retour.
Le président du collège : Le greffier :
Bernard Vaudan Cédric Steffen
Expédition :
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