AKBULUT c. TURQUIE
Karar Dilini Çevir:
AKBULUT c. TURQUIE

 
 
DEUXIÈME SECTION
DÉCISION
Requête no 36647/11
Nuri AKBULUT
contre la Turquie
 
La Cour européenne des droits de l’homme (deuxième section), siégeant le 28 mai 2019 en un comité composé de :
Valeriu Griţco, président,
Egidijus Kūris,
Darian Pavli, juges,
et de Hasan Bakırcı, greffier adjoint de section,
Vu la requête susmentionnée introduite le 5 janvier 2011,
Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,
Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :
EN FAIT
1.  Le requérant, M. Nuri Akbulut, est un ressortissant turc né en 1965 et résidant à Tekirdağ.
2.  Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent.
Les circonstances de l’espèce
3.  Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.
4.  Le 10 mars 2007, le requérant fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité aggravée. Il purgea sa peine à la prison de Midyat jusqu’au 18 octobre 2010.
5.  À partir de cette dernière date et jusqu’au 24 septembre 2012, il demeura à la prison de type L d’Alanya. Il fut maintenu dans une unité de vie de 12 m2, équipée de toilettes et d’une cabine de douche, ainsi que d’un lit, d’une table, d’une chaise et d’une radio. Deux fenêtres de 90 cm sur 110 cm chacune, qui laissaient pénétrer la lumière naturelle, donnaient sur la cour de promenade, à laquelle le détenu pouvait avoir accès au minimum une heure par jour. À partir du 3 février 2011, le requérant fut autorisé à accéder quotidiennement à la cour de promenade entre 9 heures et 12 heures et entre 13 heures et 17 heures. Le Gouvernement indique que les détenus ont la possibilité de s’acheter un téléviseur, un réfrigérateur, des objets pour leur confort personnel, et qu’ils peuvent garder des vêtements et des livres dans leur unité de vie. À cet égard, il a fourni une liste des livres que le requérant avait empruntés. L’intéressé put s’entretenir quotidiennement pendant une demi-heure avec un autre détenu, MSB, et ils participèrent ensemble à des activités sportives communes. Le requérant bénéficia également tous les quinze jours de dix minutes de conversation téléphonique avec les membres de sa famille. Les visites des proches étaient limitées à une heure tous les quinze jours, mais le requérant ne reçut aucune visite familiale dans cet établissement. Pendant sa détention à la prison d’Alanya, le requérant s’entretint à quatre reprises avec des avocats, envoya 377 lettres et en reçut 352, y compris des télécopies.
6.  Le requérant sollicita à plusieurs reprises son transfert dans différentes prisons. Ses demandes furent rejetées, principalement au motif que la capacité maximale des prisons mentionnées dans ses demandes était atteinte, mais aussi en raison des sanctions disciplinaires qui lui avaient été infligées.
7.  Le 30 juillet 2012, le requérant soumit une demande de transfert à la prison de Tekirdağ, qui fut acceptée. Le 24 septembre 2012, il fut donc transféré à la prison de type F de Tekirdağ, où il se trouve actuellement. Le Gouvernement indique que dans cette prison les détenus peuvent recevoir des visites tous les quinze jours en plus des visites ponctuelles lors desquelles les détenus ne sont pas séparés de leurs visiteurs par une cloison vitrée. Jusqu’en 2018, le requérant reçut dans cette prison onze visites des membres de sa famille. Il était autorisé à accéder à la cour de promenade trois heures par jour et à faire du sport une heure par jour soit sur un terrain de gazon naturel soit sur de la pelouse synthétique. Il avait accès à la bibliothèque tous les quinze jours et pouvait emprunter des livres. Il pouvait aussi s’acheter des journaux et des revues à la cantine et bénéficier d’échanges épistolaires.
GRIEFS
8.  Sans invoquer un article précis de la Convention, le requérant dénonce ses conditions de détention qu’il qualifie d’isolement. Il se plaint aussi de la difficulté à recevoir la visite de ses proches à laquelle il s’est trouvé confronté durant son séjour à la prison d’Alanya, en raison de la distance séparant le lieu de résidence de ceux-ci et cet établissement.
EN DROIT
9.  Le requérant se plaint d’être soumis à un isolement social en prison. Il allègue en particulier que la prison d’Alanya était trop éloignée du lieu de résidence de ses proches et qu’il lui était donc difficile d’y recevoir des visites.
10.  Le Gouvernement précise les conditions de détention du requérant (paragraphes 5 et 7 ci-dessus) et conteste les allégations formulées par celui‑ci.
11.  En ce qui concerne les griefs soulevés relativement au régime carcéral par des requérants condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité aggravée et l’allégation d’isolement qui en découle, la Cour rappelle qu’elle a déjà déclaré irrecevable un grief identique, examiné sous l’angle de l’article 3 de la Convention, dans son arrêt Öcalan c. Turquie (no 2) (nos 24069/03, 197/04, 6201/06 et 10464/07, §§ 148‑149, 18 mars 2014) et dans sa décision Karsu et autres c. Turquie ((déc.), nos 34971/05, 34974/05 et 1057/06, §§ 69-79, 27 mars 2018). En l’espèce, elle ne relève aucun élément ou argument qui lui permettrait de s’écarter de ses conclusions précédentes (voir aussi les paragraphes 5 et 7 ci-dessus pour une description des conditions de détention du requérant).
12.  En ce qui concerne plus particulièrement l’allégation selon laquelle le requérant n’a pas pu recevoir la visite de ses proches en raison de la distance séparant la prison d’Alanya et le lieu de résidence de ceux-ci, allégation qui pourrait être examinée dans le cadre de l’article 8 de la Convention, la Cour observe que le requérant ne mentionne pas le nom de la ville de résidence de ses proches ni les difficultés concrètes rencontrées par eux, par exemple la pénibilité du trajet, le coût trop élevé du voyage et de l’hébergement ou leur indigence, de telle sorte qu’il lui est impossible de procéder à une évaluation concrète de la situation. Relevant que le requérant a bénéficié de moyens de communication raisonnable et que la situation dont il se plaint s’est limitée à son séjour à la prison d’Alanya, la Cour considère que ce grief, lié à la seule distance, d’ailleurs non précisée, n’est pas suffisamment étayé pour lui permettre de procéder à un examen plus poussé (à titre de comparaison avec des affaires similaires, voir Trosin c. Ukraine, no 39758/05, §§ 42 à 44, 23 février 2012, et Khoroshenko c. Russie [GC], no 41418/04, §§ 123 à 126, CEDH 2015).
13.  Au vu de ce qui précède, la Cour déclare la requête irrecevable pour défaut manifeste de fondement, en application de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Déclare la requête irrecevable.
Fait en français puis communiqué par écrit le 20 juin 2019.
Hasan BakırcıValeriu Griţco
Greffier AdjointPrésident

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