AFFAIRE NĂSTAC c. ROUMANIE
Karar Dilini Çevir:
AFFAIRE NĂSTAC c. ROUMANIE

 
 
 
QUATRIÈME SECTION
 
 
 
 
 
 
AFFAIRE NĂSTAC c. ROUMANIE
 
(Requête no 74238/14)
 
 
 
 
 
 
 
 
ARRÊT
 
 
STRASBOURG
 
21 mai 2019
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de forme.
 

En l’affaire Năstac c. Roumanie,
La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en un comité composé de :
Georges Ravarani, président,
Marko Bošnjak,
Péter Paczolay, juges,
et de Andrea Tamietti, greffier adjoint de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 30 avril 2019,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1.  À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 74238/14) dirigée contre la Roumanie et dont un ressortissant de cet État, M. Mihăiţă Daniel Năstac (« le requérant »), a saisi la Cour le 25 novembre 2014 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2.  Le requérant a été représenté par Me R. Jalbă, avocate à Galați. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») a été représenté par son agente, Mme C. Brumar, du ministère des Affaires étrangères.
3.  Le 17 juin 2015, les griefs concernant les conditions de détention du requérant et le prélèvement de son empreinte génétique ont été communiqués au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus conformément à l’article 54 § 3 du règlement de la Cour.
4.  Le Gouvernement s’oppose à l’examen de la requête par un Comité. Après avoir examiné l’objection du Gouvernement, la Cour la rejette.
EN FAIT
I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
5.  Le requérant est né en 1993 et réside à Ganesti.
6.  Par un jugement du 17 décembre 2013, le tribunal de première instance de Bârlad condamna le requérant à une peine de cinq ans d’emprisonnement du chef de vol avec violences en réunion. Au cours de la procédure, le requérant fut représenté par un avocat de son choix.
7.  Le 10 janvier 2014, le parquet interjeta appel devant la cour d’appel de Iasi. Devant cette juridiction, il contesta la qualification juridique des faits. En outre, il demanda, en se fondant sur l’article 7 de la loi no 76/2008, que le prélèvement de l’empreinte génétique du requérant et son inscription sur le fichier national judiciaire des empreintes génétiques (« le FNJEG ») fussent ordonnés. Une copie de l’appel du parquet fut communiquée au requérant.
8.  Le requérant interjeta également appel. Il nia avoir exercé des violences et demanda une réduction de peine.
9.  À l’audience du 15 mai 2014, le parquet réitéra sa demande de prélèvement de l’ADN du requérant. L’avocat de ce dernier acquiesça partiellement à l’appel du parquet, y compris à sa partie relative au prélèvement de l’empreinte génétique de son client. Entendu en personne par la cour d’appel, le requérant confirma la position exprimée par son avocat.
10.  Par un arrêt définitif du 16 mai 2014, la cour d’appel accueillit partiellement les appels du parquet et du requérant. Elle requalifia les faits, réduisit la peine et fit droit à la demande du parquet concernant le prélèvement et l’inscription sur le FNJEG de l’empreinte génétique du requérant.
11.  D’après la loi no 76/2008, le prélèvement de l’empreinte génétique de la personne condamnée a lieu au début de l’exécution de la peine. Cependant, en l’espèce, le prélèvement n’a pas eu lieu en raison du refus du requérant de consentir à sa réalisation. Selon les informations fournies par le ministère de l’Intérieur, l’obligation de se soumettre à cette mesure demeure valable et le prélèvement pourrait avoir lieu ultérieurement au cours de l’exécution de la peine.
12.  Entre le 31 mai 2013 et le 18 juillet 2014, le requérant a été détenu pendant sept mois et 26 jours au dépôt de police de Vaslui et dans les prisons de Iaşi et de Bacău. Selon les informations fournies par le Gouvernement, l’espace individuel dont le requérant disposait en ces endroits était compris entre 1,73 m2 et 2,32 m2.
13.  En 2017, le requérant a bénéficié d’une libération anticipée, ce qui lui a permis de finir de purger sa peine hors de prison.
II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
14.  Le FNJEG a été créé en 2008 par la loi no 76/2008. Il s’agit d’un fichier informatisé, placé sous la responsabilité de l’Inspection générale de la police, qui a pour but la prévention des infractions portant atteinte aux droits et aux libertés fondamentales des personnes, et en particulier à leur intégrité physique et psychique, et la lutte contre ces infractions. Le FNJEG peut également être utilisé pour faciliter l’identification des victimes d’infractions ou de catastrophes naturelles.
15.  L’article 7 § 1 de la loi no 76/2008 est rédigé comme suit :
« Dans la décision prononçant la condamnation définitive à une peine d’emprisonnement, le tribunal ordonne le prélèvement de l’empreinte génétique des personnes condamnées pour les infractions énumérées dans l’annexe à la loi. »
16.  L’annexe à la loi énumère limitativement trente infractions pour lesquelles il y a lieu de procéder à un prélèvement de l’empreinte génétique de leur auteur. Les infractions concernées sont toutes passibles d’une peine d’emprisonnement et ont trait à des faits particulièrement graves, comme notamment des infractions contre l’intégrité physique, des infractions sexuelles, du trafic de drogue, du terrorisme, des crimes contre l’humanité et de l’esclavage.
17.  Les empreintes génétiques inscrites sur le FNJEG sont conservées sous forme numérique jusqu’à la date anniversaire des 60 ans de la personne concernée, ou en cas de décès survenant avant cette date, encore cinq ans après la date du décès. La loi ne prévoit pas de procédure d’effacement avant le délai légal susmentionné.
18.  Le prélèvement est effectué par le laboratoire d’analyses génétiques rattaché au ministère de l’Intérieur ou par d’autres laboratoires accrédités. Les informations recueillies ne doivent pas contenir des données concernant la santé ou être de nature à porter atteinte au respect de la vie privée et familiale de l’intéressé. L’accès aux informations du FNJEG n’est possible que pour les organes de poursuite pénale, les tribunaux et le Service roumain de renseignements dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
19.  Dans un arrêt du 17 mai 2011, la Cour constitutionnelle a estimé que les dispositions de l’article 7 de la loi no 76/2008 étaient conformes à la Constitution et à l’article 8 de la Convention.
20.  Par ailleurs, le Gouvernement a versé au dossier une série de décisions rendues en 2014 par d’autres tribunaux du ressort de la cour d’appel de Iași. Dans ces décisions, qui ont ultérieurement été confirmées par cette dernière juridiction, les tribunaux en question ont prononcé des peines d’emprisonnement pour des vols avec violences sans ordonner le prélèvement des empreintes génétiques des auteurs de ces infractions.
EN DROIT
I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION
21.  Le requérant se plaint de mauvaises conditions de détention dans le dépôt de police de Vaslui et dans les prisons de Iaşi et de Bacău. Il invoque l’article 3 de la Convention, ainsi libellé :
« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »
22.  Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Cour pour l’examen de la compatibilité des conditions de détention du requérant avec les exigences de l’article 3 de la Convention. Il entend toutefois attirer l’attention de la Cour sur les efforts qui auraient été déployés par les autorités internes pour améliorer les conditions de détention dans les lieux susmentionnés.
23.  La Cour renvoie aux principes bien établis dans sa jurisprudence en matière de conditions matérielles de détention (voir, par exemple, Muršić c. Croatie [GC], no 7334/13, §§ 96-101, 20 octobre 2016). Elle rappelle en particulier qu’un grave manque d’espace dans une cellule pénitentiaire, pris soit seul soit combiné à d’autres lacunes, est un facteur à prendre en compte pour la détermination du caractère « dégradant » au sens de l’article 3 des conditions de détention décrites et pour la constatation d’une violation de cet article (idem, §§ 122-141, et Ananyev et autres c. Russie, nos 42525/07 et 60800/08, §§ 149-159, 10 janvier 2012).
24.  En l’espèce, la Cour note qu’il n’est pas contesté par le Gouvernement que le requérant a disposé pendant sa détention dans les endroits susmentionnés d’un espace personnel compris entre 1,73 m2 et 2,32 m2 (paragraphe 12 ci-dessus). Or elle a déjà confirmé que la norme prédominante dans sa jurisprudence, à savoir 3 m² de surface au sol par détenu en cellule collective, était la norme minimale applicable au regard de l’article 3 de la Convention (Muršić, précité, § 136). Lorsque la surface au sol dont dispose un détenu en cellule collective est inférieure à 3 m², le manque d’espace personnel est considéré comme étant à ce point grave qu’il donne lieu à une forte présomption de violation de l’article 3. La charge de la preuve pèse alors sur le gouvernement défendeur, qui peut toutefois réfuter la présomption en démontrant la présence d’éléments propres à compenser cette circonstance de manière adéquate (Ibid., §§ 137-138).
25.  Dans l’arrêt pilote Rezmiveș et autres c. Roumanie (nos 61467/12 et 3 autres, 25 avril 2017), la Cour a déjà conclu à la violation de l’article 3 de la Convention dans des circonstances de fait similaires à celles de la présente affaire.
26.  Ayant examiné tous les éléments qui lui ont été soumis par les parties, la Cour constate que le Gouvernement n’a pas présenté d’éléments susceptibles de renverser la présomption de violation de l’article 3 de la Convention (paragraphe 24 ci-dessus). En outre, elle n’aperçoit aucun fait ou argument susceptible de la conduire en l’espèce à une conclusion différente de celle à laquelle elle est parvenue dans l’arrêt pilote Rezmiveș et autres c. Roumanie (précité). Eu égard à sa jurisprudence en la matière, la Cour estime que les conditions de détention du requérant étaient contraires à l’article 3 de la Convention.
27.  Partant, la Cour estime qu’il y a lieu, en l’espèce, de déclarer le grief tiré de l’article 3 de la Convention recevable et de conclure à la violation de cette disposition.
II.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 8 DE LA CONVENTION
28.  Le requérant dénonce une violation de son droit au respect de sa vie privée en raison de l’obligation pour lui de se soumettre au prélèvement de son empreinte génétique. Il invoque l’article 8 de la Convention, ainsi libellé en ses parties pertinentes :
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée ...
2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien‑être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
A.  Arguments des parties
1.  Le Gouvernement
29.  Le Gouvernement estime que les autorités roumaines n’ont pas porté atteinte au droit du requérant au respect de sa vie privée. À cet égard, il argue que, devant la cour d’appel, le requérant a marqué son accord avec le prélèvement de son empreinte génétique (paragraphe 9 ci-dessus).
30.  Le Gouvernement soutient que, quoi qu’il en soit, le prélèvement n’est pas automatique et que les juridictions internes ont le pouvoir d’apprécier l’opportunité d’inscrire ou non sur le FNJEG les empreintes génétiques des auteurs des infractions énumérées par la loi. Il expose qu’il ressort des exemples de jurisprudence versés au dossier que certains tribunaux internes n’ont pas fait mention de l’inscription sur le FNJEG des empreintes génétiques des auteurs de ce type d’infractions (paragraphe 20 ci-dessus).
31.  Enfin, le Gouvernement allègue que l’ingérence dans la vie privée du requérant était compatible avec les exigences de l’article 8 de la Convention. De l’avis du Gouvernement, des garanties procédurales entourent les conditions d’utilisation, de consultation et de conservation des données enregistrées dans le FNJEG.
2.  Le requérant
32.  Le requérant soutient que le prélèvement de son empreinte génétique était obligatoire au motif que cette mesure était imposée par la loi. En effet, l’article 7 de la loi no 76/2008 ne laisserait aucune marge d’appréciation aux juridictions amenées à prononcer une condamnation pour l’une des infractions énumérées dans l’annexe à la loi (paragraphe 16 ci-dessus). Ainsi, aux dires de l’intéressé, son acquiescement à l’appel du parquet n’avait aucune conséquence car ce prélèvement découlerait automatiquement de la condamnation prononcée par la cour d’appel.
33.  Le requérant considère en outre que la conservation de son empreinte génétique jusqu’à la date anniversaire de ses 60 ans est disproportionnée.
B.  Appréciation de la Cour
34. La Cour rappelle que, dans sa jurisprudence, le simple fait de mémoriser des données relatives à la vie privée d’un individu constitue une ingérence au sens de l’article 8 de la Convention. Peu importe que les informations mémorisées soient ou non utilisées par la suite. Quant aux profils ADN, ils contiennent une quantité importante de données à caractère personnel uniques (Aycaguer c. France, no 8806/12, § 33, 22 juin 2017).
35.  Pour ce qui est des circonstances particulières de la présente espèce, la Cour note d’emblée que le prélèvement ordonné par la cour d’appel n’a pas été effectué en raison du refus du requérant de consentir à sa réalisation, mais que l’obligation de se soumettre à cette mesure demeure valable et que l’intéressé pourrait y être contraint au cours de l’exécution de la peine (paragraphe 11 ci-dessus). Dès lors, la Cour considère que la condamnation à voir son empreinte génétique inscrite sur le FNJEG constitue une ingérence dans le droit du requérant au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 § 1 de la Convention.
36.  Cela étant, compte tenu de l’acquiescement du requérant à l’appel du parquet (paragraphe 9 ci-dessus), la Cour estime qu’il convient de se pencher sur la question de savoir s’il y a lieu de considérer que l’intéressé a renoncé à un éventuel droit de s’opposer au prélèvement de son empreinte génétique au titre de l’article 8 de la Convention.
37.  La jurisprudence de la Cour exige que la renonciation à un droit garanti par la Convention – pour autant qu’elle soit licite – se trouve établie de manière non équivoque, qu’elle ait lieu en connaissance de cause, c’est‑à-dire sur la base d’un consentement éclairé, et qu’elle soit effectuée sans contrainte (D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, § 202, CEDH 2007‑IV). De plus, une telle renonciation ne doit se heurter à aucun intérêt public important (voir, mutatis mutandis et sous l’angle de l’article 6 de la Convention, Hermi c. Italie [GC], no 18114/02, § 73, CEDH 2006‑XII).
38.  En l’espèce, la Cour relève que le requérant, qui a été assisté tout au long de la procédure interne par un avocat de son choix (paragraphe 6 ci‑dessus), a disposé d’un délai suffisamment long pour étudier l’appel du parquet et y répondre (paragraphe 7 ci-dessus). Or elle constate qu’il ne s’est opposé à la demande de prélèvement ni dans les motifs de son appel ni oralement au cours des audiences devant la cour d’appel. Bien au contraire, à l’audience du 15 mai 2014, l’intéressé a personnellement et par l’intermédiaire de son avocat acquiescé à la demande du parquet de prélèvement de son empreinte génétique (paragraphe 9 ci-dessus).
39.  Au vu de ces éléments, la Cour estime que le requérant a renoncé de manière non équivoque et en connaissance de cause, c’est-à-dire sur la base d’un consentement éclairé, à s’opposer à l’inscription de son empreinte génétique sur le FNJEG.
40.  La Cour ne juge pas probant l’argument du requérant selon lequel son acquiescement à l’appel du parquet n’avait aucune conséquence puisque le prélèvement découlerait automatiquement de la condamnation prononcée par la cour d’appel (paragraphe 32 ci-dessus).
41.  La Cour n’est pas persuadée qu’il eût été vain de s’opposer à la demande du parquet. À cet égard, elle note que, dans des affaires similaires, les juridictions dans le ressort de la cour d’appel de Iași n’ont pas ordonné le prélèvement des empreintes génétiques des auteurs de vols avec violences (paragraphe 20 ci-dessus).
42.  Eu égard à cette jurisprudence, la Cour estime qu’il n’est pas établi que les juridictions internes n’avaient pas le pouvoir d’apprécier l’opportunité d’inscrire ou non sur le FNJEG l’empreinte génétique d’une personne condamnée pour l’une des infractions énumérées dans l’annexe à la loi no 76/2008. En tout état de cause, la Cour rappelle que le simple fait de nourrir des doutes quant aux perspectives de succès d’un recours donné qui n’est pas de toute évidence voué à l’échec ne constitue pas une raison propre à justifier la non‑utilisation du recours en question (Vučković et autres c. Serbie (exception préliminaire) [GC], nos 17153/11 et 29 autres, § 84, 25 mars 2014).
43.  Enfin, sans spéculer sur ce qu’aurait pu être la décision de la cour d’appel si le requérant avait soulevé, au moins en substance, le grief concernant l’atteinte alléguée au respect de sa vie privée, la Cour note que des garanties entourent les conditions d’inscription des empreintes génétiques sur le FNJEG et d’utilisation des données enregistrées dans ce fichier.
44.  En particulier, elle relève que seules les infractions limitativement énumérées dans l’annexe à la loi et présentant un degré élevé de gravité donnent lieu à une inscription sur le FNJEG (paragraphe 16 ci-dessus), que les informations recueillies ne doivent pas contenir des données concernant la santé ou être de nature à porter atteinte au respect de la vie privée et familiale de l’intéressé et que la consultation de ce fichier n’est possible que par les personnes dûment autorisées (paragraphe 18 ci-dessus). Compte tenu de ces garanties, la Cour considère que la renonciation du requérant ne se heurte à aucun intérêt public important.
45.  À la lumière de ce qui précède, la Cour estime que le grief tiré de l’article 8 de la Convention est manifestement mal fondé et qu’il doit être rejeté, en application de l’article 35 §§ 3 et 4.
III.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
46.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A.  Dommage
47.  Le requérant réclame 4 000 euros (EUR) pour dommage moral en raison des traitements dégradants auxquels il dit avoir été soumis pendant sa détention dans le dépôt de police de Vaslui et dans les prisons de Iași et de Bacău.
48.  Le Gouvernement estime que la somme réclamée est excessive.
49.  Statuant en équité, comme l’exige l’article 41 de la Convention, la Cour considère qu’il y a lieu d’octroyer au requérant 1 000 EUR au titre du préjudice moral.
B.  Frais et dépens
50.  Le requérant demande également 300 EUR pour les frais et dépens qu’il dit avoir exposés dans la procédure engagée devant la Cour. Il fournit la copie du contrat d’assistance juridique conclu avec son avocate, d’après lequel il s’est engagé à verser à celle-ci la somme susmentionnée à la fin de la procédure engagée devant la Cour.
51.  Le Gouvernement indique que le requérant n’a pas encore versé la somme demandée.
52.  Compte tenu des documents dont elle dispose et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 300 EUR pour la procédure devant elle et l’accorde au requérant.
C.  Intérêts moratoires
53.  La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,
1.  Déclare la requête recevable quant au grief tiré de l’article 3 de la Convention et irrecevable pour le surplus ;
 
2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention ;
 
3.  Dit
a)  que l’État défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, les sommes suivantes, à convertir dans la monnaie de l’État défendeur au taux applicable à la date du règlement :
i.  1 000 EUR (mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour préjudice moral,
ii.  300 EUR (trois cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par le requérant, pour frais et dépens,
b)  qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;
 
4.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 21 mai 2019, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.
Andrea TamiettiGeorges Ravarani
Greffier adjointPrésident
 

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