90 IV 8 - Schweizerisches Bundesgericht
Karar Dilini Çevir:
90 IV 8 - Schweizerisches Bundesgericht
Urteilskopf
90 IV 8


3. Arręt de la Cour de cassation pénale du 10 mars 1964 dans la cause Aubert contre Ministčre public du canton de Genčve.
Regeste
Art. 125 und 18 StGB. 1. Welche Massnahmen der Unternehmer zur Verhütung von Unfällen bei Bauarbeiten zu treffen hat, beurteilt sich nach Art. 65 KUVG und 339 OR (Erw. 1). 2. Der mit solchen Massnahmen Beauftragte ist strafrechtlich nur verantwortlich, wenn er Vorkehren ausser acht lässt, die ohne übermässigen Kostenaufwand getroffen werden können. - Vorsichtsmassnahmen für die Handhabung von schweren Betonplatten. - - Was die Arbeiter vom Umgang mit solchen Platten halten, ist nicht entscheidend, so wichtig ihre Auffassung auch sein mag. - - Das Einverständnis von Aufsichts- oder Kontrollstellen schliesst mangelnde Vorsicht des Unternehmers nicht not wendig aus (Erw. 2). 3. Fahrlässiges Verhalten von Personen, die für den Transport von schweren Betonplatten verantwortlich sind (Erw. 3). 4. Adäquater Kausalzusammenhang zwischen diesem Verhalten und dem Unfall eines Arbeiters (Erw. 4).
Sachverhalt ab Seite 9
BGE 90 IV 8 S. 9
A.- L'entreprise Aubert et Pitteloud fabriquait et posait, pour le tunnel alors en construction sous l'aéroport de Cointrin, des dalles de béton, les unes translucides, les autres non. Ces travaux avaient commencé depuis une dizaine de jours, sous la direction du chef d'équipe Freymond, lorsqu'un accident se produisit le 8 septembre 1959. Plusieurs ouvriers, dont Jean Luchini, venaient de démouler une dalle de 3 m de longueur sur 1 m 70 de largeur, pesant 700 ŕ 750 kg., et l'avaient dressée verticalement sur sa tranche, épaisse de 6 cm. Pour l'élever ŕ la hauteur de 40 cm et la placer sur un chariot, spécialement construit pour ce transport, jusqu'au lieu oů, ŕ courte distance, elle était déposée, deux ouvriers ŕ chaque extrémité la soulevaient alternativement et la posaient sur deux carrelets de bois, tandis qu'un groupe de 2 ŕ 3 autres ouvriers se tenait devant chacune des deux faces pour maintenir ŕ la force des bras la position verticale. Deux carrelets avaient déjŕ été glissés sous l'une des extrémités et l'on était en train de placer le second sous l'autre lorsque la dalle bascula. Luchini ne réussit pas ŕ se retirer ŕ temps et fut gričvement blessé.
B.- Luchini a déposé, deux ans plus tard, le 30 septembre 1961, une plainte pénale contre ses employeurs (Aubert et Pitteloud, entrepreneurs ŕ Ecublens/VD), pour BGE 90 IV 8 S. 10lésions corporelles graves. L'enquęte conduisit au renvoi devant le Tribunal de police de Genčve d'Aubert, fils du patron, et de l'ouvrier fonctionnant comme chef d'équipe, Freymond, qui furent condamnés, le 4 novembre 1963, le premier ŕ 8 jours d'arręts avec sursis et 500 fr. d'amende, le second ŕ 100 fr. d'amende en vertu de l'art. 125 CP.Sur appel des condamnés, la Cour de justice de Genčve, par arręt du 13 janvier 1963, acquitta Freymond et condamna Aubert ŕ 500 fr. d'amende et aux frais de par l'article précité.
C.- Contre cet arręt Aubert s'est pourvu en nullité. Il conclut ŕ libération.
Erwägungen
Considérant en droit:
1. Sur le fond, Aubert conteste uniquement avoir commis une négligence, condition du délit de l'art. 125 CP. Selon l'art. 18 CP, il y a négligence lorsque l'auteur agit par une imprévoyance coupable, sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. L'imprévoyance est coupable lorsqu'il n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle.Il s'agit dčs lors de juger s'il y a eu objectivement un manquement (une imprévoyance), puis, dans l'affirmative, de voir si le manquement peut ętre reproché sur le plan subjectif au recourant.Sur le premier point, la cour cantonale note qu'il n'y a pas de prescription légale concernant le transport de dalles de béton sur les chantiers de construction. Cela est exact en ce sens que ce genre de travail n'est pas spécialement visé dans l'ordonnance du 2 avril 1940 concernant la prévention des accidents dans les travaux du bâtiment. Mais il reste la disposition générale de l'art. 65 al. 1 LAMA, selon laquelle, dans les entreprises assurées, qui comprennent celles de l'industrie du bâtiment, l'employeur ou son représentant doit prendre, pour prévenir les accidents, toutes les mesures dont l'expérience a démontré la nécessité BGE 90 IV 8 S. 11et que les progrčs de la science et les circonstances permettent d'appliquer.C'est au regard de cette prescription légale qu'il faut examiner si le recourant a failli ŕ un devoir de précaution. Au surplus, męme en l'absence d'une telle rčgle, le recourant répondrait du dommage causé par l'omission des mesures de sécurité qui incombent ŕ celui qui crée un danger - et notamment ŕ l'employeur (art. 339 CO).
2. Ainsi que la cour cantonale l'a constaté en fait, le levage ŕ bras d'homme de lourdes plaques de béton constituait un travail dangereux. Il incombait au recourant, responsable de l'exécution de ce travail, d'ordonner les précautions propres ŕ assurer la sécurité des ouvriers. C'est affaire d'appréciation que de dire jusqu'oů vont les mesures de précautions adéquates. On ne saurait éliminer tous les risques et encore moins, par conséquent, imposer des mesures propres ŕ supprimer tout danger. Il y a une certaine marge de risques inévitables, notamment sur les chantiers, et tout accident n'entraîne pas la responsabilité pénale de la personne chargée des mesures de sécurité. Il l'entraîne seulement si cette personne a négligé des précautions que l'on peut prendre sans frais disproportionnés.Le recourant lui-męme admet que tel a bien été le cas, au moins dans une certaine mesure. Il reconnaît en effet qu'il eűt été possible de couler en deux parties les panneaux de 3 m x 1 m 70 et de fixer, aprčs transport, chacune des deux moitiés l'une ŕ l'autre au moyen de joints. Aussi bien la cour cantonale constate-t-elle en fait que ce procédé, adopté déjŕ pour les panneaux plus grands encore, était praticable et eűt été autorisé par les ingénieurs.Le recourant conteste en revanche qu'il eűt été possible en outre, comme l'admet la cour cantonale, de maintenir les dalles en équilibre au moyen d'étais tenus ŕ la main par les ouvriers. Mais cet argument n'est pas recevable, car il se heurte ŕ une constatation de fait souveraine (art. 273 al. 1 lit. b et 227 bis al. 1 PPF). Au reste, la Cour BGE 90 IV 8 S. 12de justice ne mentionne cette mesure qu'ŕ titre d'exemple et l'on peut imaginer d'autres précautions encore qui eussent été adéquates. Enfin et surtout, le partage des panneaux, ŕ lui seul, eűt constitué une sűreté suffisante.La possibilité de parer mieux au danger étant acquise, on doit constater avec la cour cantonale et malgré les avis contraires, d'ailleurs isolés, qui ont pu ętre exprimés, que des précautions plus grandes auraient dű ętre prises.Le danger issu des travaux était ŕ la fois sérieux et apparent. La chute d'une plaque de béton pesant 700 ŕ 750 kg mettait en danger la vie des ouvriers et ce risque tombait sous le sens, tant il est vrai que chacun peut prévoir qu'une dalle de béton longue de 3 m et large de 1 m 70 est en équilibre hautement instable lorsqu'elle est dressée sur sa tranche (6 cm) pour ętre élevée ŕ 40 cm du sol sur des carrelets de bois.Le recourant soutient ŕ tort que le poids ne joue pas de rôle et qu'au contraire l'équilibre d'un corps est d'autant mieux assuré que ce corps est plus lourd. Le travail était précisément dangereux parce qu'en cas de perte d'équilibre, le redressement ŕ bras d'homme d'une dalle de béton est d'autant plus aléatoire qu'elle est plus lourde et parce que le poids d'un objet augmente le danger que provoque sa chute.Le recourant soutient aussi que les ouvriers ne s'étaient pas plaints d'avoir ŕ tenir en équilibre des plaques de 3 m x 1 m 70 pesant 700 ŕ 750 kg et que, d'ailleurs, leurs réclamations visaient le caractčre pénible du travail, non son caractčre dangereux. Sur ce second point tout au moins, l'allégation est contraire aux faits constatés et ne peut ętre retenue. La cour cantonale, en effet, déclare que les ouvriers critiquaient et la difficulté et le danger de leur travail. Sur le premier point, elle dit qu'ils se plaignaient d'avoir ŕ transporter des dalles trop lourdes et trop volumineuses, sans préciser si ces réclamations concernaient les dalles du poids et du format de celle qui causa l'accident ou seulement celles d'un poids et d'un format supérieurs. BGE 90 IV 8 S. 13Supposé que les dalles semblables ŕ celle qui blessa Luchini n'aient pas donné lieu ŕ des plaintes de la part des ouvriers, il ne s'ensuivrait pas que le recourant soit exempt de reproche. Tout d'abord, en effet, les ouvriers peuvent ętre conscients d'un risque, męme excessif, sans élever de plainte pour autant. Ensuite, ils peuvent aussi se tromper quant aux mesures de sécurité ŕ prendre, en mésestimant certains risques ou en redoutant des dangers contre lesquels ils sont déjŕ efficacement protégés. Pour importante qu'elle soit dans l'appréciation du problčme, l'opinion des ouvriers n'est donc pas décisive. Il n'est dčs lors pas indispensable de constater, en l'espčce, si les ouvriers se sont plaints des dangers inhérents au transport de plaques de 3 m x 1 m 70 pesant 700 ŕ 750 kg.Il n'est pas davantage décisif que ni l'autorité cantonale surveillant les chantiers ni la Caisse nationale ne fussent intervenues pour s'opposer au transport ŕ bras d'hommes de dalles de béton lourdes. Lors de l'accident, les travaux de coulage et de transport des dalles n'étaient en cours que depuis une dizaine de jours. Pendant un tel laps de temps, le défaut d'intervention du service de sécurité des chantiers et de l'assureur ne permet pas de conclure ŕ une approbation de leur part. Au surplus, cette approbation n'exclurait pas nécessairement une imprévoyance de l'entrepreneur.Dčs lors, des mesures de précaution complémentaires devaient ętre prises pour parer au danger, d'ailleurs grave, issu de la manipulation de dalles de béton lourdes et encombrantes. En n'ordonnant pas ces mesures, le recourant a commis une imprévoyance.
3. La cour cantonale a jugé que cette imprévoyance était coupable. Effectivement, le recourant est un homme de métier, habile ŕ diriger un chantier oů se coulent puis se transportent des panneaux de béton. Il exerçait, dans l'entreprise Aubert et Pitteloud, l'activité d'un dirigeant. Sa situation personnelle lui permettait ainsi de se rendre compte des dangers courus par les ouvriers. Quant aux BGE 90 IV 8 S. 14circonstances, elles commandaient, ainsi qu'on l'a montré, des mesures de sűreté complémentaires.On est donc fondé ŕ reprocher au recourant, compte tenu de ses facultés et des éléments d'appréciation dont il disposait, de n'avoir pas ordonné des mesures de sűreté efficaces.
4. Le recourant ne semble pas contester qu'il y ait un lien causal adéquat entre son imprévoyance et l'accident de Luchini. C'est ŕ juste titre. La cour cantonale constate que l'accident aurait probablement été évité si la dalle avait été divisée. En outre, il n'est pas nécessaire que le recourant ait prévu le résultat dommageable (RO 88 IV 110). Au reste, on sait qu'Aubert pouvait prévoir ce résultat. Le lien causal n'est pas rompu par la faute concurrente qu'ont pu commettre les ouvriers occupés ŕ manoeuvrer le panneau de béton. Supposé que cette faute existe - question qu'on ne saurait résoudre ŕ la lecture de l'arręt cantonal - elle ne serait pas d'une telle importance (cf. RO 88 IV 106 consid. 3) qu'elle reléguerait ŕ l'arričreplan la négligence du recourant et qu'elle ôterait ŕ cette négligence son caractčre de cause adéquate.
Dispositiv
Par ces motifs, la Cour de cassation pénaleRejette le pourvoi.