90 I 113 - Schweizerisches Bundesgericht
Karar Dilini Çevir:
90 I 113 - Schweizerisches Bundesgericht
Urteilskopf
90 I 113


18. Arręt du 13 mai 1964 dans la cause Consortium de transports commerciaux SA contre Genčve, Cour de justice.
Regeste
Schweizerisch-italienisches Abkommen über die Anerkennung und Vollstreckung gerichtlicher Entscheidungen, Art. 1 und 2. Ein Genfer Reeder verladet ihm von einem Dritten zum Transport anvertraute Waren in Genua auf ein von ihm gechartertes Schiff. Der Dritte verlangt vom Agenten ("raccomandatario") des Reeders in Genua einen Teil des Frachtgeldes zurück. Der Agent wird von den Genueser Gerichten zur Zahlung eines bestimmten Betrages an den Dritten verurteilt. Dieser verlangt in der Schweiz die Vollstreckung des Urteils gegen den Reeder. 1. Nach italienischem Recht ist der "raccomandatario" ermächtigt, im Rahmen der ihm vom Reeder eingeräumten Vertretungsbefugnisse im Namen desselben Prozess zu führen. 2. Das durch ein zuständiges italienisches Gericht gefällte und den "raccomandatario" verurteilende Urteil verstösst nicht gegen den schweizerischen Ordre public und kann daher in der Schweiz gegen den Reeder vollstreckt werden, und zwar nicht nur, wenn sowohl der "raccomandatario" als auch der Reeder selber als Prozessparteien zu betrachten sind, sondern auch, wenn nur der "raccomandatario" als Prozesspartei zu gelten hat. 3. Als zuständig sowohl in Bezug auf den "raccomandatario" als auch auf den Reeder ist das italienische Gericht zu betrachten, vor welchem der "raccomandatario" sich vorbehaltlos eingelassen hat auf einen Prozess, den der Reeder kannte, verfolgte und durch Erteilung von Instruktionen an seinen "raccomandatario" leitete.
Sachverhalt ab Seite 115
BGE 90 I 113 S. 115
A.- Le Consortium de transports commerciaux SA (ci-aprčs CTC) s'occupe notamment de transports par mer. Il a un agent ("raccomandatario") ŕ Gęnes, la maison Ferraro et Ferraro (ci-aprčs Ferraro). Le 18 décembre 1951, il affréta un navire sur lequel la société Alleanza Industriale Trasporti SA (ci-aprčs AIT) fit charger ŕ Gęnes des matériaux de construction destinés ŕ Conedil SA, ŕ Tanger. Il reçut le fret pour un volume de marchandises d'environ 363 m3. A Tanger, une vérification révéla quelque 175 m3 seulement. AIT réclama alors ŕ Ferraro le remboursement du fret perçu en trop. Le Tribunal civil de Gęnes, par jugement du 24 avril 1957, puis la Cour d'appel de Gęnes, par arręt du 25 février 1958, condamnčrent Ferraro, en sa qualité d'agent de CTC, ŕ restituer une certaine somme.
B.- N'ayant pu obtenir paiement du montant alloué, AIT s'adressa aux tribunaux genevois en demandant principalement l'exequatur de l'arręt de la Cour d'appel de Gęnes, subsidiairement la condamnation de CTC ŕ payer, en francs suisses, les sommes fixées par les juridictions italiennes. Le 1er mai 1962, le Tribunal de premičre instance rejeta cette demande. Le 10 décembre 1963, la Cour de justice l'accueillit notamment par les motifs suivants:Les sentences judiciaires dont l'exécution est demandée ont été rendues par les juridictions italiennes entre AIT, demandeur, et CTC, défendeur, représenté par son "raccomandatario" Ferraro, conformément ŕ l'art. 288 du code BGE 90 I 113 S. 116italien de la navigation (CIN). Elles ont donc été rendues entre les parties qui s'opposent aujourd'hui dans la procédure d'exécution. Il suffit dčs lors de rechercher si les conditions des art. 1er et 2 de la convention italo-suisse sur la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires (ci-aprčs CIS) sont remplies. Cette question doit ętre résolue affirmativement. En effet CTC, qui a personnellement suivi et dirigé le procčs, est entré en matičre sans réserve sur le fond du litige (art. 2 ch. 2 al. 2 CIC). De plus, l'exécution des sentences italiennes ne serait pas contraire ŕ l'ordre public suisse (art. 1er ch. 2 CIS). CTC le conteste, il est vrai, en affirmant que l'institution du "raccomandatario" viole le principe "nul ne plaide par procureur". Il omet toutefois que ce principe, loin d'avoir une portée absolue, subit plusieurs exceptions en vertu tant du droit privé que du droit maritime suisse. Les sentences litigieuses peuvent donc recevoir leur exécution en Suisse.
C.- Contre l'arręt de la Cour de justice, CTC a recouru en réforme au Tribunal fédéral en concluant, avec suite de frais et dépens, ŕ ce que la demande d'exécution soit écartée. Il se plaint essentiellement d'une violation de la CIS.La Cour de justice se réfčre ŕ son arręt. AIT conclut au rejet du recours.S'agissant exclusivement d'une question d'exequatur, le président de la Cour de droit public et administratif a décidé, d'entente avec le président de la Ire Cour civile, de traiter le recours en réforme de CTC comme un recours de droit public.
Erwägungen
Considérant en droit:
1. Le recours de droit public pour violation de traités internationaux ne peut tendre qu'ŕ l'annulation de l'arręt attaqué (RO 81 I 146). Dans la mesure oů les conclusions du recourant vont au-delŕ, elles sont irrecevables.
2. Un jugement ne peut ętre exécuté que contre une personne ŕ l'égard de laquelle il sortit des effets. En l'espčce, les jugements dont l'exécution est requise ont été rendus BGE 90 I 113 S. 117entre AIT, demandeur, et Ferraro, défendeur. La procédure d'exécution oppose en revanche AIT et CTC. Toutefois Ferraro a agi tout au long de la procédure en Italie comme "raccomandatario" de CTC; c'est en cette qualité qu'il a été attaqué et condamné ŕ payer une certaine somme. Or, en droit italien, le "raccomandatario" est autorisé ŕ agir en justice au nom de l'armateur dans les limites des pouvoirs de représentation que ce dernier lui a accordés (art. 288 CIN). De plus, le litige tranché par les jugements en cause est issu d'un rapport de droit auquel ces pouvoirs de représentation s'appliquaient. Il s'ensuit que les jugements rendus en Italie contre Ferraro sortissent leurs effets ŕ l'égard de CTC, que ce dernier ait été ou non formellement partie au procčs. Ils peuvent donc ętre exécutés contre le recourant en Suisse, s'ils satisfont aux conditions posées par les art. 1er et 2 CIS.
3. L'art. 1er ch. 1 ŕ 4 CIS soumet ŕ diverses exigences l'exécution dans l'un des pays des jugements émanant des juridictions de l'autre. L'art. 1er ch. 4 ne joue pas de rôle en l'espčce, car les jugements en cause n'ont pas été rendus par défaut. Il n'est pas contesté que ces sentences sont passées en force de chose jugée d'aprčs la loi italienne. La condition formulée par l'art. 1er ch. 3 est donc remplie. Il reste ainsi ŕ examiner si les décisions émanent d'une juridiction compétente selon l'art. 2 CIS (art. 1er ch. 1 CIS) et si leur reconnaissance serait contraire ŕ l'ordre public suisse (art. 1er ch. 2 CIS). Le Tribunal fédéral peut revoir ces questions librement, tant en fait qu'en droit (RO 85 I 44).a) En vertu de l'art. 2 ch. 2 al. 2 CIS, la compétence des tribunaux gęnois qui ont statué en l'espčce devra ętre reconnue si le défendeur (Ferraro/CTC) "est entré en matičre, sans réserve, sur le fond du litige".En fait, devant les juridictions italiennes, Ferraro a discuté le fond de la cause sans faire de réserves. Il n'a pas contesté la compétence de ces tribunaux. Il n'a pas davantage prétendu qu'il ne pouvait ętre recherché en qualité de représentant de CTC. Il remplit donc les conditions de BGE 90 I 113 S. 118l'art. 2 ch. 2 al. 2 CIS. Quant ŕ CTC, non seulement il connaissait l'existence du procčs, mais il l'a suivi et męme conduit en donnant des instructions précises ŕ Ferraro. Il ne prétend pas avoir invité celui-ci ŕ soulever une exception d'incompétence et ŕ faire des réserves ŕ cet égard avant d'aborder le fond du litige. Il ne soutient pas davantage que Ferraro aurait agi contrairement ŕ des ordres qui lui auraient été donnés dans ce sens. Dčs lors, l'attitude que ce dernier a adoptée en entrant sans réserve en matičre est opposable ŕ CTC. Il s'ensuit que les décisions dont AIT demande l'exécution en Suisse émanent d'une juridiction italienne compétente au sens de l'art. 2 ch. 2 al. 2 CIS. Cela suffit pour que la condition posée par l'art. 1er ch. 1 CIS soit remplie. Il est inutile de rechercher si les autres hypothčses envisagées par l'art. 2 CIS sont réalisées.b) En vertu de l'art. 1er ch. 2 CIS, les jugements rendus par les tribunaux gęnois seront reconnus et exécutés ŕ Genčve, pourvu que l'ordre public ou les principes du droit public suisse ne s'y opposent pas. Cette condition fera défaut si, par leur contenu ou en raison des rčgles appliquées dans la procédure qui les a précédés, ces jugements heurtent, d'une maničre intolérable, le sentiment du droit, tel qu'il existe généralement en Suisse, et viole les rčgles fondamentales de l'ordre juridique suisse (RO 87 I 78 et 194). La notion d'incompatibilité avec l'ordre public suisse reçoit d'ailleurs, en matičre d'exécution de jugements étrangers, une interprétation plus étroite que lorsqu'il s'agit de l'application directe de la loi étrangčre par le juge suisse (RO 87 I 193/194).A cet égard, on peut interpréter l'argumentation présentée par CTC dans son recours en ce sens que la reconnaissance en Suisse des jugements italiens en cause serait contraire ŕ l'ordre public suisse parce que la représentation de l'armateur par le "raccomandatario" heurterait elle-męme cet ordre public.L'art. 288 CIN pourrait signifier que, du point de vue formel, non seulement le "raccomandatario", mais aussi l'armateur sont parties au procčs. Supposé que tel soit le BGE 90 I 113 S. 119cas, le "raccommandatario" ne serait que la personne autorisée ŕ conduire le procčs; il ferait valoir le droit d'un tiers sans que ce dernier soit dépourvu de la capacité d'ester en justice. Un tel systčme n'est pas ignoré du droit suisse. Ainsi, en vertu de l'art. 168 al. 2 CC, le mari a seul qualité pour conduire le procčs relatif aux apports de sa femme, laquelle n'en est pas moins partie ŕ la contestation. De męme, l'art. 55 de la loi fédérale du 23 septembre 1953 sur la navigation maritime sous pavillon suisse prévoit que "le capitaine est le représentant légal de l'armateur" (al. 1) et que, dans les litiges relatifs au navire, il "représente l'armateur en justice, tant en demandant qu'en défendant", aussi longtemps que ce dernier n'intervient pas par un autre mandataire (voir dans le męme sens l'art. 42 de l'arręté du Conseil fédéral du 9 avril 1941 concernant la navigation maritime sous pavillon suisse). Sans doute, la situation de l'agent établi dans un port est distincte de celle du capitaine d'un navire. Peu importe cependant. Ce qui est décisif, c'est que, dans certains cas et en droit suisse comme en droit italien, l'armateur peut ętre légalement représenté en justice par un tiers et se voir opposer les effets du jugement. Un tel systčme n'a donc rien de contraire ŕ l'ordre public suisse.Il est vrai que l'art. 288 CIN pourrait aussi signifier que seul le "raccomandatario" est formellement partie au procčs. Or, en droit suisse, un jugement n'est obligatoire qu'entre les parties (RO 89 II 434). Toutefois, ce principe souffre des exceptions. Ainsi, en vertu de l'art. 706 al. 5 CO, le jugement qui annule une décision de l'assemblée générale d'une société anonyme est opposable męme aux actionnaires qui n'étaient pas parties au procčs. Le Tribunal fédéral a admis également une dérogation au principe précité lorsqu'une personne qui est partie au rapport de droit litigieux mais n'a pas été appelée au procčs alors qu'elle aurait pu l'ętre, déclare d'avance accepter de se laisser opposer le jugement (RO 89 II 435). De plus, l'art. 193 al. 2 CO, applicable directement ŕ l'échange (art. 237 CO) et au contrat d'entreprise (art. 365 CO), et BGE 90 I 113 S. 120par analogie au bail (art. 258 et 280 CO), permet de poser la rčgle générale suivante: lorsque, en vertu du rapport de droit en cause, celui auquel le litige est dénoncé doit soutenir le dénonçant dans le procčs, l'issue défavorable de ce dernier lui est opposable, si elle n'est pas due ŕ la faute du dénonçant et que la dénonciation ait été faite ŕ temps (cf. GULDENER, Schw. Zivilprozessrecht, p. 284/285 et RDS 68 p. 251, note 46; en ce qui concerne le mandat et autres rapports juridiques analogues, cf. GULDENER, RDS 68 p. 239/240). KUMMER affirme d'ailleurs que si, en rčgle générale, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'entre parties, il faut cependant en étendre les effets "wo es aus Gründen folgerichtiger Rechtsverwirklichung geboten und ohne Beeinträchtigung der Rechte Dritter möglich ist" (KUMMER, Das Klagerecht und die materielle Rechtskraft im schw. Recht, p. 142). Vu ce qui précčde, ni le sentiment suisse du droit ni les rčgles fondamentales de l'ordre juridique suisse ne seraient violés d'une maničre intolérable si, ŕ supposer que CTC n'ait pas été formellement partie au procčs, il se voyait néanmoins opposer les jugements dont l'exécution est requise. Ils le seraient d'autant moins que CTC connaissait l'existence du procčs intenté ŕ Ferraro et qu'il a donné des instructions ŕ ce dernier sur la maničre de le conduire; il a pu ainsi y défendre ses intéręts; il ne prétend du reste pas que l'issue défavorable du litige serait la conséquence d'une faute du "raccomandatario".En conséquence, les conditions de l'art. 1er ch. 2 CIS sont également remplies. C'est dčs lors ŕ juste titre que l'exécution des jugements en cause a été accordée en Suisse.
4. Le recours devant ętre rejeté, il est inutile d'examiner s'il n'aurait pas dű ętre déclaré irrecevable faute de contenir l'exposé des faits exigé par l'art. 90 litt. b OJ.
Dispositiv
Par ces motifs, le Tribunal fédéralRejette le recours en tant qu'il est recevable.