84 II 424 - Schweizerisches Bundesgericht
Karar Dilini Çevir:
84 II 424 - Schweizerisches Bundesgericht
Urteilskopf
84 II 424


57. Arręt de la Ire Cour civile du 30 septembre 1958 dans la cause Martinez contre Rodriguez.
Regeste
Dienstvertrag. Lohnanspruch; Vertragsinhalt; Rechtsmissbrauch. Art. 330 Abs. 1, 326 OR; Art. 2 ZGB. Zivilrechtliche Bedeutung eines kantonalen Erlasses, der die Erteilung der Aufenthaltsbewilligung an Fremdarbeiter von der Einhaltung der Vorschriften eines nicht allgemein verbindlich erklärten Gesamtarbeitsvertrags durch den Dienstherrn abhängig macht (Erw. 1). Nichtigkeit einer Lohnvereinbarung, die mit der öffentlich-rechtlichen Regelung nicht übereinstimmt? (Erw. 2). Rechtsmissbräuchliche Berufung auf die Vertragsfreiheit? (Erw. 3).
Sachverhalt ab Seite 424
BGE 84 II 424 S. 424
A.- François Martinez exploite un commerce de primeurs en gros, ŕ Genčve. Il eut ŕ son service, du 1er septembre 1955 ŕ fin novembre 1957, José Rodriguez, de nationalité espagnole, né le 16 février 1940. Il est partie au contrat collectif de travail des importateurs de primeurs en gros; son employé n'est devenu membre d'une association signataire qu'en juin 1957; le contrat n'a pas reçu force obligatoire générale. Un arręté du Conseil d'Etat genevois du 29 juin 1954 (art. 3) subordonne l'octroi aux étrangers d'un permis de séjour en vue de prendre BGE 84 II 424 S. 425emploi ŕ la condition que l'employeur se conforme aux dispositions des contrats collectifs. Martinez s'est abstenu de demander une autorisation de travail pour son employé.
B.- En décembre 1957, Rodriguez a assigné son employeur devant les Conseils de prud'hommes en paiement de 6020 fr., représentant la différence entre le salaire garanti par le contrat collectif et celui qu'il a effectivement touché. Martinez a reconnu devoir 740 fr. pour solde de salaire au 30 septembre 1957; il conteste toute obligation pour la période précédant l'affiliation du demandeur. C. - Le 19 février 1958, les Conseils de prud'hommes ont admis la demande. Ce serait un abus de droit, expose le jugement, que de se soustraire, en s'abstenant de requérir l'autorisation de travail, aux conditions de rémunération fixées impérativement par l'arręté cantonal.Par arręt du 8 avril 1958, la Chambre d'appel a confirmé ce jugement, faisant siens les motifs des premiers juges. Elle considčre comme reconnue une somme de 1100 fr.; elle ajoute au chiffre articulé par le défendeur une somme de 360 fr. représentant la différence due pour les mois d'octobre et novembre 1957: l'employé est resté affilié, en effet, jusqu'ŕ la cessation des services.
D.- Martinez recourt en réforme. L'intimé a conclu au rejet.
Erwägungen
Considérant en droit:
1. Les conditions du contrat de travail peuvent ętre fixées librement, pourvu qu'elles ne soient contraires ni ŕ la loi ni aux moeurs (art. 326 CO). L'employeur paie le salaire convenu, usuel ou fixé par des contrats-types ou des contrats collectifs obligatoires pour lui (art. 330 al. 1 CO).a) L'intimé soutient que l'arręté cantonal du 29 juin 1954 produit des effets de droit civil et confčre ŕ l'employé un droit au salaire minimum prévu dans la convention collective. Suivant l'arręt attaqué, cependant, telle n'est pas la portée de cette réglementation, qui, par les conditions BGE 84 II 424 S. 426mises ŕ l'octroi du permis de séjour, se borne ŕ contraindre indirectement l'employeur ŕ s'engager ŕ rémunérer son personnel étranger d'aprčs la convention; c'est pourquoi les premiers juges ont eu recours ŕ la notion d'abus de droit. S'agissant de l'application du droit cantonal, le Tribunal fédéral n'a pas ŕ revoir l'interprétation qu'ils en ont donnée.b) Il n'est d'ailleurs gučre concevable qu'une prétention civile puisse ętre déduite d'une rčgle de droit public qui se borne ŕ exercer une pression pour amener les parties ŕ contracter ŕ des conditions déterminées. On ne saurait suivre l'intimé lorsqu'il invoque, par analogie, l'art. 27 de la loi fédérale sur le travail dans les fabriques. Cette prescription, interprétée comme une norme impérative de droit civil, applicable męme en l'absence d'une autorisation au sens des art. 48 et 52 de la loi, détermine le montant du supplément de salaire prévu ŕ l'art. 336 al. 2 CO (OSER/SCHÖNENBERGER, N. 7 ad art. 336 CO; SCHÖNENBERGER, ZSR 1933, p. 89 a, 90 a); en dehors du cadre de la LTF, une rčgle cantonale impérative n'est valide que si elle peut se fonder sur cette disposition du code des obligations. En l'espčce, le droit civil fédéral ne confčre pas un droit au salaire minimum.c) Il n'est pas moins douteux que le législateur cantonal, eűt-il imposé directement les conditions de salaire pratiquées dans le contrat collectif, aurait été habilité ŕ édicter une telle rčgle de droit civil. Certes il a été jugé que lorsqu'un canton introduit une réforme sociale en harmonie avec le droit fédéral, il peut en accroître l'efficacité par un moyen de droit privé (RO 73 I 229), sans outrepasser le cadre de l'art. 6 al. 1 CC. Pour des raisons plausibles d'ordre public, le législateur cantonal recourt ŕ des moyens de contrainte d'ordre civil qui ne heurtent ni le sens ni l'esprit du droit privé fédéral. L'arręt cité a trait aux vacances payées rendues obligatoires pour sauvegarder la santé publique; le moyen civil, dans ce cas, servait le but d'intéręt public. En l'espčce, la garantie BGE 84 II 424 S. 427d'un salaire minimum aux seuls employés étrangers constituerait, en l'absence de toute réforme sociale, une norme indépendante dérogeant aux principes fondamentaux du droit des contrats; on évite efficacement la sous-enchčre des travailleurs étrangers par la contrainte indirecte prévue dans l'arręté cantonal.Il suit de lŕ que le demandeur, en l'absence d'une convention, ne peut fonder une prétention civile sur l'arręté du 29 juin 1954. Les conditions fixées par le contrat collectif de travail des importateurs de primeurs en gros lient les parties du 1er juin 1957 ŕ fin novembre 1957, soit dčs l'affiliation de l'intimé ŕ une association signataire (RO 71 I 306) jusqu'ŕ la cessation des rapports de service. Suivant l'arręt attaqué, la différence entre le salaire touché et le salaire garanti s'élčve ŕ 1100 fr. L'intimé n'a pas réclamé l'intéręt moratoire.
2. L'intimé invoque en outre la nullité des clauses contractuelles relatives au paiement du salaire.L'art. 326 CO est un cas d'application des art. 19 et 20 CO (OSER/SCHÖNENBERGER, N. 2 ad art. 326 CO). Une convention privée contraire ŕ une réglementation de droit public n'est inefficace que si la nullité est expressément prévue comme sanction de l'illicéité, ou découle du sens et du but de la rčgle violée (RO 45 II 551; 47 II 464; 60 II 315; 80 II 329; 81 II 619). Il ne ressort pas de l'arręt attaqué que tel soit l'effet recherché par l'arręté du 29 juin 1954. On peut d'ailleurs douter que le recourant eűt consenti ŕ payer d'emblée un salaire de magasinier au jeune Rodriguez, âgé de 15 1/2 ans, alors que les apprentis ont droit, d'aprčs le contrat collectif, ŕ 100, 150 ou 200 fr. (cf. art. 20 al. 2 CO).
3. La juridiction cantonale, délaissant les moyens de l'intimé, se fonde sur l'abus de droit. Selon l'art. 4 de l'arręté genevois, l'employeur doit s'assurer, avant de laisser travailler un étranger, que celui-ci est autorisé ŕ prendre un emploi; Martinez n'en a rien fait.Il est certes choquant que le recourant tire profit de BGE 84 II 424 S. 428son omission. Toutefois c'est d'accord avec son employé, soit son représentant légal, également au service du recourant, que Martmez a fixé un salaire (250 fr. par mois, au début, avec augmentations successives jusqu'ŕ 450 fr., en mai 1957) qui paraît normal, vu l'âge de l'employé; l'intimé n'a d'ailleurs formé sa demande qu'aprčs avoir signifié son congé. Or, seule une atteinte portée délibérément et de mauvaise foi aux droits privés d'une partie procéderait de l'exercice abusif d'un droit; en l'absence de tout élément autre que l'infraction aux prescriptions de police, le moyen tiré de l'art. 2 al. 2 CC reviendrait ŕ conférer, par un détour, ŕ la réglementation de droit public le caractčre de disposition impérative de droit civil; il ne serait fondé que si l'employeur, par une attitude contraire ŕ la bonne foi, avait dissuadé son employé de s'annoncer ŕ la police des étrangers ou l'en avait empęché. L'arręt attaqué ne constate rien de tel. Accordée ŕ des mineurs étrangers, l'autorisation de prendre emploi se limite d'ailleurs, dans la rčgle, ŕ la qualité de garçon de course ou d'apprenti; la rémunération actuelle de ces derniers s'élčve ŕ 100 fr. par mois pour la premičre année; il est douteux que l'intimé eűt pu prétendre d'emblée au salaire de magasinier, qui était de 530 fr. ŕ son entrée au service du recourant.
Dispositiv
Par ces motifs, le Tribunal fédéralAdmet partiellement le recours et réforme l'arręt attaqué en ce sens que le recourant est condamné ŕ payer ŕ l'intimé José Rodriguez 1100 fr.